La copropriété est-elle sûre de récupérer la totalité d’une dette de charge en cas de vente amiable ?
La copropriété est-elle sûre de récupérer la totalité d’une dette de charge en cas de vente amiable ?
Question :
On affirme souvent que lorsqu’un « gros » débiteur vend à l’amiable son bien, la copropriété est sûre de récupérer l’ensemble de la dette de ce copropriétaire. Cet argument est parfois utilisé pour stopper certaines procédures judiciaires en cours, en attente d’une vente amiable annoncée par le débiteur.
Mais est-ce vrai ? « Est-ce qu’en cas de vente amiable le syndicat récupère systématiquement l’ensemble de la dette du copropriétaire vendeur ? »
Réponse :
La réponse est, juridiquement, NON.
Il y a toujours un risque que la copropriété ne récupère pas l’ensemble de la dette du copropriétaire, même si dans les faits, en cas de vente amiable, la copropriété est très généralement intégralement remboursée.
En effet, en cas de vente, la copropriété bénéficie d’un privilège spécial, appelé « superprivilège » défini par l’article 2103 du Code civil. Ce superprivilège permet à la copropriété d’être prioritaire sur les éventuels autres créanciers pour récupérer les dettes de charges et travaux de l’année en cours (N) et des 2 dernières années échues (N-1 et N-2). Au-delà de ce délai, la copropriété est en concurrence avec le prêteur de deniers (la banque) pour les deux exercices antérieurs (N-3 et N-4).
De ce fait, ce « superprivilège » accorde à la copropriété la certitude de récupérer jusqu’à 3 ans de charges impayées (aussi bien les charges courantes que les travaux et éventuellement les frais de procédures pour lesquels le copropriétaire aurait été condamné), mais ne garantit pas le recouvrement au-delà de ce superprivilège, si d’autres créanciers comme la banque réclament aussi le remboursement d’une dette.
Pour se prévaloir du privilège spécial, en cas de vente amiable, il est nécessaire que le syndic, conformément à l’article 20 de la loi du 10 juillet 1965 (que nous citons ci-dessous), fasse opposition au versement des fonds pour obtenir le paiement des sommes dues par le copropriétaire vendeur.
« Lors de la mutation à titre onéreux d'un lot, et si le vendeur n'a pas présenté au notaire un certificat du syndic ayant moins d'un mois de date, attestant qu'il est libre de toute obligation à l'égard du syndicat, avis de la mutation doit être donné par le notaire au syndic de l'immeuble par lettre recommandée avec avis de réception dans un délai de quinze jours à compter de la date du transfert de propriété. Avant l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de la réception de cet avis, le syndic peut former au domicile élu, par acte extrajudiciaire (exploit d’huissier), opposition au versement des fonds […] pour obtenir le paiement des sommes restantes dues par l'ancien propriétaire. Cette opposition […], à peine de nullité, énonce le montant et les causes de la créance. Le notaire libère les fonds dès l'accord entre le syndic et le vendeur sur les sommes restant dues. »
Il faut comprendre que le privilège ne vaut que si l’opposition est régulière (faite dans les formes), c’est d’ailleurs cette opposition qui vaut mise en œuvre du « superprivilège ». A défaut, la copropriété ne pourra y prétendre.
En ce qui concerne les dettes au-delà du superprivilège, si le prix de vente ne permet pas de « désintéresser » la copropriété pour la totalité des dettes, c’est aux autres copropriétaires de devoir supporter ce qu’on appelle « les créances irrécouvrables ».
Cela peut arriver si, par exemple, ce que réclament la banque et la copropriété est supérieur au montant du prix de vente.
Mais, dans les faits, en cas de vente amiable, le prix de vente permet presque systématiquement de désintéresser tous les potentiels créanciers et la copropriété récupère toutes les sommes dues (au-delà du superprivilège).
Les risques sont plus grands pour la copropriété en cas de vente judiciaire (saisie immobilière) car le prix de vente est beaucoup plus faible qu’en cas de vente amiable.
Cependant, il est très important de retenir qu’il existe un risque de ne pas récupérer toutes les sommes dues. Cela peut exister dans les cas de dette sur des biens de faible valeur (parkings, etc.).
Il est donc nécessaire d’avoir un regard permanent sur l’évolution des impayés de la copropriété et sur leur suivi par le syndic. Laisser une situation s’aggraver, c’est augmenter le risque de créance irrécouvrable.
Il ne faut jamais laisser une dette dériver, même si le débiteur « promet » une vente amiable : il faut « sécuriser » la dette et la limiter. Vous retrouverez tous nos conseils à ce sujet dans les ouvrages suivants : « savoir traiter les impayés en copropriété » : www.arc-copro.com/61eh et: « copropriété les impayés en 25 questions » www.arc-copro.com/bt7w.
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