Sommaire entretien de la Copropriété
- Moyens de détection et d'alarme - Moyens de lutte contre l'incendie, dans les bâtiments d'habitation
Face à des occupations illicites de parties communes, certains syndicats hésitent à engager une procédure pour faire cesser cette situation pour divers motifs (indifférence, coût et aléa d’une instance, qui pourrait se révéler au demeurant prescrite).
La Cour de cassation rappelle dans un arrêt du 24 octobre 2019 les fondamentaux du contentieux de remise en état de parties communes occupées illégalement par un copropriétaire.
Conformément à l’article 4 de la loi du 10 juillet 1965, les parties communes générales de la résidence appartiennent à tous les propriétaires d’un lot, les parties communes spéciales uniquement à certains d’entre eux.
Ces parties communes ne peuvent donc faire l’objet d’une appropriation illicite par un copropriétaire qui empêcherait les autres résidents de pouvoir également en disposer, sans autorisation préalable de l’assemblée générale. L’article 9 de la même loi proscrit ce genre de comportement.
Si tel est le cas, et sans restitution volontaire de celle-ci par le copropriétaire dans le cadre d’un règlement amiable, la seule alternative prend la forme d’une action judiciaire.
Cette dernière peut être introduite par le syndicat des copropriétaires. L’objet du syndicat consiste dans l’administration des parties communes et dans le respect du règlement de copropriété, qui définit les parties communes et les parties privatives.
Dans ce cas, le syndic doit bénéficier d’une habilitation de l’assemblée générale consentie à la majorité de l’article 24 de la loi du 10 juillet 1965 (article 55 du décret du 17 mars 1967).
Cette action peut aussi être engagée par le propriétaire d’un lot qui doit pouvoir également utiliser cette partie commune. Cette occupation exclusive par un copropriétaire s’analyse en une dépossession d’un bien immobilier lui appartenant ainsi qu’à d’autres ou tous les autres copropriétaires.
Ce copropriétaire peut, dans la même procédure, assigner le syndicat des copropriétaires pour n’avoir pas fait cesser ce trouble de jouissance et rechercher sa responsabilité civile si cela lui cause un préjudice.
Une telle action est possible dans le cadre de délais fixés par la loi.
Les travaux illicites (sans l’aval de l’assemblée générale) réalisé par un propriétaire peuvent avoir des conséquences différentes, qui conditionnent les délais de prescriptions pour engager une action en vue de leur suppression.
D’une part, si ce sont de simples aménagements (remplacement de la fenêtre de son lot par un autre modèle, de sa porte palière par un modèle divergent de la référence collective, destruction d’un mur porteur…), la procédure se prescrit désormais dans un délai de 5 ans (depuis la loi ELAN du 23 octobre 2018, 10 ans sous l’ancien régime juridique) à compter de leur exécution (article 42 de la loi du 10 juillet 1965).
D’autre part, si ce sont des opérations permettant ou représentant une appropriation des parties communes (par exemple : la construction d’un mur pour annexer une fraction du couloir à son lot), la poursuite se prescrit dans ce cas par 30 ans (article 2272 du Code civil). Nous sommes alors dans le cadre d’une action réelle, car elle porte sur le droit de propriété d’un bien immobilier.
Dans une résidence en copropriété nancéenne (54), les propriétaires d’un lot intègrent illégalement un tronçon de couloir à leur lot par l’édification d’un mur, et empêchent le propriétaire d’un autre lot d’avoir accès à ce couloir.
Face au laxisme du syndicat, le propriétaire du lot lésé assigne la copropriété ainsi que les contrevenants en restitution des parties communes et en indemnisation de son préjudice personnel.
La Cour d’appel de Nancy rejette cette demande au motif qu’elle serait soumise au délai de 10 ans et donc prescrite.
La Cour de cassation n’analyse pas cette affaire de la même manière, dans son arrêt n° 18-19172 du 24 octobre 2019 :
« […] Attendu que, pour déclarer irrecevable, comme prescrite, l'action de M. N..., l'arrêt retient que celle-ci ne tend pas à la revendication des parties communes, mais à contraindre M. et Mme M... à mettre fin au trouble résultant de cette occupation et à libérer ces parties communes, de sorte qu'il ne s'agit pas d'une action réelle et qu'elle est en conséquence soumise à la prescription décennale ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si l'annexion au lot de M. et Mme M... du fond du couloir du rez-de-chaussée de l'immeuble ne caractérisait pas un acte d'appropriation d'une partie commune, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision […] ».
Cet arrêt de la Cour de cassation s’inscrit dans sa jurisprudence constante, soulignant la distinction de travaux privatifs illicites affectant les parties communes constituant de simples aménagements de ceux représentant une appropriation et de la prescription applicable à l’action judiciaire en suppression de ceux-ci.
Cette action peut être engagée aussi bien collectivement par le syndicat, représenté par son syndic, qu’individuellement par le propriétaire d’un lot dans la résidence concernée.
Aussi surprenant que cela puisse paraître, une décision d’assemblée générale même irrégulière s’impose aux copropriétaires dès lors qu’elle n’a fait l’objet d’aucune contestation en justice dans les délais impartis, à savoir 2 mois à compter de la notification du procès-verbal d’assemblée générale (article 42, alinéa 2 de la loi de 1965).
De nombreux copropriétaires sont réticents à saisir un juge dans le cadre de litiges liés à la copropriété ou à certaines décisions.
Cette position de la jurisprudence est l’un des principes fondamentaux à connaître en matière de copropriété, pour savoir à quel risque s’exposent les copropriétaires qui laisseraient le délai de 2 mois courir et expirer sans avoir entrepris aucune action judiciaire.
Or, bien souvent, ils peuvent – de bonne foi – penser que de simples discussions ou démarches amiables par courrier (même recommandé) peuvent permettre de remettre en question des décisions votées en assemblée, ce qui n’est pas le cas.
En effet, tant qu’une délibération n’a pas été annulée par un juge, elle doit être exécutée et le syndic est tenu d’en assurer le respect (article 18 de la loi de 1965). Un arrêt de 1987 avait déjà posé ce principe (Cass, 3e civ., 29 avril 1987, n° 85-18656).
L’arrêt de 2017 précise clairement que même contraire au règlement de copropriété, une décision d’assemblée générale non contestée dans le délai imparti doit être exécutée car devenue définitive au terme de ce délai.
Les copropriétaires doivent donc bien prêter attention aux situations où un copropriétaire souhaiterait obtenir une décision d’assemblée en sa faveur (telle qu’une autorisation de travaux ou un droit de jouissance particulier sur une partie commune) alors qu’elle contreviendrait au règlement de copropriété ou à une précédente décision d’assemblée.
Ce pourrait être une prise de risque « payante » pour lui si la résolution est adoptée et devient définitive faute de contestation dans les temps.
Dans cette affaire, l’assemblée générale avait autorisé les copropriétaires à entreposer leurs vélos dans la cour intérieure de l’immeuble, alors que le règlement de copropriété l’interdisait.
Un copropriétaire a donc assigné le syndicat des copropriétaires et le syndic pour faire retirer tout objet déposé dans la cour et pour obtenir une indemnisation de son préjudice de jouissance.
La Cour d’appel de Versailles a donné droit à sa demande, en se fondant sur les stipulations du règlement de copropriété, qui s’imposait à tous les copropriétaires à partir du moment où elles n’ont pas été annulées ou abrogées. Pour la Cour d’appel, le syndicat et le syndic engageaient leur responsabilité vis-à-vis des copropriétaires dans la mesure où le règlement de copropriété n’avait pas été modifié au préalable et où il devait recevoir application.
L’arrêt d’appel est cassé.
La Cour de cassation considère, en effet, que le copropriétaire ne peut pas agir en responsabilité à l’encontre du syndicat et du syndic, alors qu’il aurait dû, s’il voulait remettre en cause la décision d’assemblée votée, la contester en justice dans le délai légal de 2 mois.
Faute d’action dans ce délai, la décision, même irrégulière, est devenue définitive et s’imposait à tous.
Là encore, nous sommes sur un principe bien établi et depuis longtemps : seul un copropriétaire peut saisir le juge pour contester une décision d’assemblée générale.
Dans le cas où une personne autre qu’un copropriétaire agirait sur ce fondement, le juge déclarerait son action irrecevable et ce motif serait suffisant pour rejeter d’emblée sa demande, sans examen sur le fond de cette demande.
Le principe peut paraître évident mais plusieurs décisions de justice ont dû se prononcer pour le rappeler (Tribunal de Grande instance de Marseille, 27 mai 1977, JCP éd. N 1980, II, n° 72 ; CA de Paris, 14e ch. A, 18 janvier 2006, n° 05/11561 ; Cass., 3e civ., 15 février 2006, n° 05-10471 ; CA de Paris, 14e ch. B, 12 octobre 2007, n° 07/05121).
Par exemple, ne peuvent contester les décisions d’assemblée ni le vendeur d’un lot en ce qui concerne les décisions postérieures à la vente, ni le locataire d’un lot, ni le syndicat des copropriétaires, ni des tiers tels que les promoteurs… ni même le syndic qui souhaiterait contester sa propre révocation !
Une précision importante : seul un copropriétaire « opposant ou défaillant » peut contester une résolution d’assemblée générale. L’opposant est celui qui a voté « contre » une résolution adoptée en assemblée ou bien « pour » une résolution rejetée en assemblée. Le copropriétaire défaillant est celui qui n’était ni présent, ni représenté à l’assemblée.
La jurisprudence a eu l’occasion d’apporter une autre précision, à savoir qu’un copropriétaire ne peut pas solliciter l’annulation d’une assemblée générale dans son intégralité s’il a approuvé certaines de ses décisions. S’il était présent à l’assemblée, il ne pourrait la contester qu’en ayant rejeté intégralement les résolutions, auquel cas il serait considéré effectivement comme « opposant » (Cass., 3e civ., 7 septembre 2011, n° 10-18312 ; Cass., 3e civ., 24 mars 2015, n° 13-28799).
Selon la formule consacrée, l’assemblée générale des copropriétaires est l’organe souverain en copropriété.
C’est au sein des assemblées que sont prises la plupart des décisions affectant les copropriétaires, hormis les cas de jouissance purement privative des lots et les quelques pouvoirs d’initiative du syndic (travaux urgents, gestion du personnel de la copropriété…).
Si le vote des décisions respecte un principe démocratique de majorité – quoiqu’adapté à la spécificité des copropriétés puisque différentes majorités existent – celui-ci souffre bien souvent de difficultés pratiques, liées parfois à l’absentéisme, parfois également à des situations de blocage.
C’est le cas notamment de la position majoritaire ou influente d’un ou plusieurs copropriétaires qui, par l’importance de leurs lots et donc de leurs voix, peuvent abuser de leur position pour obtenir des décisions uniquement à leur avantage ou bloquer des décisions qui ne leur conviendraient pas.
L’incidence est d’autant plus grande que la copropriété est petite. L’influence d’un copropriétaire peut s’avérer considérable.
D’abord, par souci d’équité, la loi prévoit une réduction des voix en cas de copropriétaire majoritaire : « lorsqu'un copropriétaire possède une quote-part des parties communes supérieure à la moitié, le nombre de voix dont il dispose est réduit à la somme des voix des autres copropriétaires » (article 22, alinéa 2 de la loi de 1965).
Ceci dit, les décisions les plus courantes sont prises à la majorité simple de l’article 24 de la loi de 1965 (majorité des voix des copropriétaires présents ou représentés), notamment pour ce qui concerne les travaux nécessaires à la conservation de l’immeuble. Les copropriétaires disposant d’un nombre de voix important peuvent donc facilement influencer les prises de décision surtout en cas d’absentéisme important en assemblée.
De la même manière, ils peuvent bloquer les décisions impliquant une majorité renforcée.
Dans cette affaire, un copropriétaire avait demandé une autorisation en AG afin de faire de son habitation un local professionnel, autorisation refusée par l’assemblée.
La Cour d’appel a annulé la décision dans la mesure où le changement de destination du lot respectait la destination de l’immeuble, le règlement de copropriété et les droits des autres copropriétaires, de sorte que le refus de l’assemblée était abusif.
La Cour de cassation casse l’arrêt d’appel et juge que la Cour d’appel, pour pouvoir considérer la délibération comme abusive et l’annuler, devait caractériser l’abus de majorité, qui obéit à certains critères.
Ainsi, une décision d’assemblée est abusive si elle est « contraire aux intérêts collectifs des copropriétaires ou avait été prise dans le seul but de favoriser les intérêts personnels des copropriétaires majoritaires au détriment des copropriétaires minoritaires ».
Autrement dit, ce n’est pas parce que le copropriétaire qui sollicite l’autorisation de l’assemblée a des arguments valables pour l’obtenir qu’il peut faire annuler le refus de sa demande. Tout refus d’autorisation d’une assemblée à un copropriétaire n’est pas en soi abusif.
La Cour d’appel ne devait pas rechercher en quoi la demande de ce copropriétaire était justifiée, mais plutôt en quoi l’assemblée avait commis un abus en la rejetant.
Pour que le refus constitue un abus de majorité, il faut donc, soit que la décision contrevienne aux intérêts collectifs des copropriétaires, soit qu’elle n’ait eu pour objectif que de privilégier les intérêts personnels des copropriétaires majoritaires.
C’est au copropriétaire demandeur d’en apporter la preuve.
Par exemple, la Cour de cassation a déjà jugé que le refus de l’assemblée d’autoriser des travaux sans motif valable, refus qui mettait en péril une partie commune de l’immeuble, constituait un abus de majorité (Cass., 3e civ., 11 janvier 1984, RDI 1984, 450).
Dans cette affaire, l’assemblée générale des copropriétaires avait voté la condamnation d’un vide-ordures et le procès-verbal d’assemblée mentionnait une majorité erronée, à savoir la majorité simple de l’article 24, alors que le vote était soumis à la majorité absolue de l’article 25.
La Cour de cassation refuse d’annuler la délibération en question pour le seul motif que la majorité mentionnée sur le procès-verbal était erronée, car la majorité absolue avait été atteinte en assemblée.
Elle prend donc en compte le fait que la majorité a bien été atteinte pour le vote de la délibération, peu importe que le PV fasse état d’une majorité erronée.
Le délai de 30 ans concerne les actions réelles, c’est-à-dire portant sur une chose, tandis que le délai de droit commun de 5 ans concerne les actions dites personnelles, c’est-à-dire les actions tendant à faire reconnaître un droit d’une personne contre une autre (on parle aussi de droit de créance).
Les actions personnelles concernent les actions entre le syndicat des copropriétaires et un copropriétaire (ou plusieurs), ou entre des copropriétaires entre eux, par exemple en matière de recouvrement de charges, d’actions en responsabilité…
L’action d’un syndicat de copropriétaire qui tend à faire cesser une emprise sur une partie commune et à faire condamner un copropriétaire à remettre en état les lieux concerne un droit réel du syndicat sur ce bien. Il peut donc agir dans le délai trentenaire.
Nous sommes dans le cadre d’une copropriété composée de deux bâtiments, les bâtiments A et B, séparés par un mur mitoyen. Ce mur est qualifié de partie commune par le règlement de copropriété.
Un copropriétaire, la SCI V. est copropriétaire de plusieurs lots, deux lots dans le bâtiment A et un troisième lot, dans le bâtiment B. Depuis l’origine, les lots n° 159 et 160 du bâtiment A sont référencés à usage commercial dans le règlement de copropriété (ils sont utilisés pour une activité de restauration). Le lot situé dans le bâtiment B est à usage d’habitation.
À une date indéterminée (il y a plus de dix ans), le mur séparatif entre les deux bâtiments a été percé et le lot du bâtiment B (à usage d’habitation), a été transformé en cuisine pour les besoins de l’activité de restauration des locaux commerciaux du bâtiment A. De nombreuses années après le percement du mur, les copropriétaires d’un autre lot, situé dans le bâtiment B, ont assigné la SCI V. et ont demandé, entre autres, la remise en état des lieux.
Ces copropriétaires, demandeurs à l’action, motivent leur demande en invoquant le fait que le mur est qualifié de partie commune dans le règlement de copropriété. La SCI fait valoir qu’on ne pouvait plus engager d’action, puisque le délai de prescription de 10 ans prévu par l’article 42, alinéa 1 de la loi du 10 juillet 1965 est écoulé. Les copropriétaires qui ont engagé l’action invoquent de leur côté que ce n’est pas la prescription de 10 ans qu’il faut retenir, mais la prescription trentenaire, dans la mesure où il ne s’agit pas d’une action personnelle (délai de 10 ans), mais d’une action réelle (30 ans).
Tout le monde s’accorde à dire que l’ouverture du mur constitue bien des travaux, mais la question est de savoir s’il s’agit de travaux privatifs affectant les parties communes ou, au contraire, si la nature et l’étendue de ces travaux est telle, qu’ils constituent une appropriation de parties communes.
Deux interprétations sont, à priori, possibles :
Les travaux affectent simplement une partie commune. Le copropriétaire, en l’occurrence, la SCI, aurait dû demander, préalablement à la réalisation des travaux, l’autorisation de l’assemblée générale, conformément à l’article 25 b) de la loi du 10 juillet 1965 (« Autorisation donnée à M. et Mme… d’effectuer les travaux de percement du mur… »).
À défaut de demande d’autorisation, en cas de contestation, on pourrait considérer qu’il s’agit d’une action personnelle dont l’action se prescrit par 10 ans (c’est ce que la SCI prétendait).
Le mur constitue une partie commune. Il est expressément qualifié ainsi dans le règlement de copropriété. Selon cette seconde lecture, l’ouverture ne constitue pas de « simples » travaux affectant les parties communes, mais une véritable appropriation desdites parties communes.
L’action est donc une action réelle, se prescrivant par 30 ans.
La Cour de cassation a opté pour la seconde interprétation. Elle a considéré que les travaux en cause ne sont pas de simples travaux qui affectent les parties communes, mais équivalaient à une appropriation puisqu’une partie de la structure a été détruite et le volume correspondant a été récupéré par la SCI V.
La Cour de cassation, considérant qu’il s’agissait d’une action réelle, a retenu le principe de la prescription trentenaire. La SCI V. a été condamnée à restituer le mur, partie commune, c’est-à-dire à reboucher l’ouverture réalisée.
Après lecture attentive de l’arrêt de la Cour de Cassation, celle-ci semble être plus subtile puisqu’elle opère la distinction entre :
Il s’agit d’une atteinte à une partie commune expressément qualifiée, l’action vise à récupérer ces parties communes le délai d’action est donc de 30 ans. C’est bien parce que « la transformation litigieuse s’est effectuée en ménageant une ouverture dans le mur séparatif entre le bâtiment A et B, lequel selon le règlement de copropriété constituant une partie commune, qu’il s’agit d’une action touchant sur la « chose » (= la partie commune dûment qualifiée).
D’ailleurs, la Cour précise bien pour terminer que « l’action tendait donc à restituer des parties communes et non pas uniquement à sanctionner la méconnaissance du règlement de copropriété ».
Le syndicat est régulièrement confronté à des sollicitations individuelles de travaux sur les parties communes par un copropriétaire.
Le syndicat se doit dans ce cas, d’identifier précisément le droit envisagé au profit du demandeur. En cas de qualification erronée, la résolution de l’assemblée générale illicite s’expose à une action judiciaire en annulation de la part de tout copropriétaire opposant ou défaillant, comme le rappelle la cour de cassation dans un récent arrêt du 26 mars 2020.
En l’espèce, une résidence en copropriété située dans le 10ème arrondissement de Paris est composée de plusieurs bâtiments, de 5 étages, ainsi que des combles parties communes au 6ème et dernier étage.
Les détenteurs d’un lot n° 13 se trouvant dans le bâtiment A au 5ème étage souhaitent installer dans les combles un ballon d’eau chaude privatif.
Dans la mesure où l’aménagement escompté affecte les parties communes, ils doivent requérir l’autorisation de l’organe décisionnaire du syndicat des copropriétaires, son assemblée générale (art. 17 de la loi du 10 juillet 1965).
Ils obtiennent l’aval de la collectivité moyennant par une résolution n° 21 d’une assemblée générale du 31 janvier 2013, soumise à la majorité des voix du syndicat des copropriétaires, dans la mesure où ils assimilent l’opération envisagée aux travaux affectant les parties communes (prévus par l’alinéa b de l’article 25 de la loi du 10 juillet 1965).
Un couple de propriétaires défaillants (absents non représentés à l’assemblée générale) contestent la régularité des diverses décisions dont la numéro 21 relative à la pose du ballon d’eau chaude dans les combles parties communes au bénéfice du lot n° 13 et sollicitent en conséquence leur nullité en assignant le 9 avril 2013 le syndicat, représenté par le syndic, auprès du T.G.I. de Paris.
Le jugement n° 13 - 05302 du 3 juillet 2015 de cette juridiction rejette cette requête, confirmé par un arrêt n° 15 - 16794 de la cour d’appel de Paris du 13 décembre 2017.
Ces deux propriétaires décident alors de se pourvoir en cassation.
Le couple de propriétaires défaillants soulève devant la cour de cassation le même argumentaire juridique. Ils considèrent notamment que la résolution n° 21 de l’assemblée générale est illégale, en raison d’une qualification erronée de la demande du propriétaire aboutissant à l’application d’une majorité inexacte.
En effet, la requête du propriétaire ne se résume pas selon eux à une simple autorisation de travaux affectant les parties communes relevant effectivement de la majorité de l’article 25 de la loi du 10 juillet 1965, mais à un droit de jouissance exclusif de celles-ci (combles) au profit de son lot correspondant à un acte de disposition soumis dans ce cas à la double majorité de l’article 26 de la même loi.
Dans son arrêt n° 19 - 102010 du 26 mars 2020, les juges n’ont d’autre choix que de faire droit à ce recours par une interprétation littérale de la décision n° 21 de l’assemblée générale, fondée sur une confusion juridique manifeste du syndicat au profit des propriétaires du lot n° 13 du 5ème étage du bâtiment A quant à la fixation de leur ballon d’eau chaude privatif dans les combles parties communes : " …Qu'en statuant ainsi, alors que la décision n° 21 prise lors de l'assemblée générale du 31 janvier 2013 accordait, aux deux copropriétaires qui avaient sollicité cette délibération, la jouissance exclusive des combles situés au-dessus du lot 13, ce dont il résultait que la décision devait être prise à la majorité prévue à l'article 26 de la loi précitée, la cour d'appel, qui a dénaturé le procès-verbal d'assemblée générale, a violé les textes et le principe susvisés ;"
Le président de séance, sur les éventuelles recommandations du syndic, se doit de procéder à une juste qualification juridique des questions inscrites à l’ordre du jour de l’assemblée générale, afin de déterminer avec exactitude la majorité appropriée pour leur adoption.
A défaut, la résolution entérinée encourt une action légitime en nullité introduite par tout copropriétaire opposant ou défaillant, en principe dans le délai de deux mois suivant la notification de son procès-verbal par le syndic.
L’assemblée générale est l’organe souverain, qui prend des décisions pour gérer la copropriété. Ces décisions prises par les copropriétaires régissent la vie de la copropriété. Si elle peut avoir des conséquences pour les copropriétaires, elle peut également en avoir pour les locataires.
En effet, rappelons que les locataires sont soumis au respect du règlement de copropriété et bien entendu aux décisions des assemblées générales.
S’ils sont soumis aux décisions d’assemblée générale, peuvent-ils pour autant contester ces délibérations ? La question se pose, d’autant plus lorsque les résolutions entraineraient un trouble pour le locataire.
C’est donc à ces questions que répond la Cour de cassation dans son arrêt du 10 septembre 2020 (n°19-14.646)
Un copropriétaire loue à un locataire exerçant une activité commerciale (autorisée par le règlement de copropriété) loue 4 lots : 3 lots ont une entrée par la rue et le 4ème nécessite un accès par la copropriété, précisons que ce dernier lot n’est pas relié aux autres.
Lors de l’assemblée générale la résolution suivante est adoptée : fermeture de la porte cochère avec un digicode le samedi. Or, le locataire exerce également son activité commerciale le samedi. Il décide d’assigner le syndicat des copropriétaires pour demander l’annulation de la résolution.
En vertu de l’article 42 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1965 « les actions en contestation des décisions des assemblées générales doivent, à peine de déchéance, être introduites par les copropriétaires opposants ou défaillants dans un délai de deux mois à compter de la notification du procès-verbal sans annexe. »
Il est expressément mentionné que ce sont les copropriétaires qui ont la qualité pour contester judiciairement une résolution. D’ailleurs, la jurisprudence a tranché la question de savoir si un locataire pouvait contester la résolution d’une assemblée générale, la Cour d’appel de Paris en date du 15 décembre 1994) a jugé qu’un locataire ne pouvait pas contester une décision d’assemblée générale.
Etant plutôt ingénieux, le locataire indique qu’il ne conteste pas la résolution mais les effets de la résolution.
Ce n’est pourtant pas ce que retient la Cour d’appel, ni la Cour de cassation en rappelant que seuls les copropriétaires peuvent contester une résolution d’assemblée générale. Le fait pour le locataire de contester l’objet de la résolution aux motifs que la résolution consistait d’un simple souhait et qu’elle excédait les pouvoirs du syndicat des copropriétaires s’analysent comme une contestation de la résolution (et non de ces effets).
En conséquence, le locataire n’a pas qualité pour contester la délibération, cette dernière devra s’appliquer.
Pourtant le locataire avait un autre argument
Le locataire conteste la délibération car la fermeture de la porte cochère le samedi toute la journée n’est pas compatible avec la destination de l’immeuble qui autorise les activités commerciales, que cela est une limite à son droit de jouissance d’un passage direct et libre vers son local d’activité et que cela constituait un trouble illicite à l’exercice de son activité commerciale.
En effet, à partir du moment où le règlement de copropriété autorise les activités commerciales au sein de la copropriété, encore faut-il que les décisions prises en assemblée générale n’y contreviennent pas.
La Cour d’appel relève dans cet arrêt que les 3 lots réunis en un espace faisait office de boutique par laquelle on entrait par la rue, et dans la mesure où le quatrième lot, pour lequel on devait entrer via la porte cochère faisait office de bureau. Ce dernier lot et ne recevait pas de public et était accessible pour les employés via le digicode alors « la décision adoptée … dans la mesure où elle ne perturbait pas l’accès à la clientèle de l’espace de vente, demeurait compatible avec l’exercice commerciale du locataire telle qu’autorisée par le règlement de copropriété ».
C’est l’argumentaire que reprend la Cour de cassation pour considérer qu’il n’y a pas trouble illicite à l’exercice de son activité commerciale. En effet, dans la mesure où les clients entrent dans la boutique par l’accès côté rue, la mise en place du digicode pour l’accès au bureau, n’empêche pas les clients d’entrer dans la boutique. Dans la mesure où les clients sont libres d’entrer dans la boutique, il n’y a pas de trouble lié à l’exercice commercial.
Bien entendu, la réponse aurait pu être différente si l’accès de la porte cochère était le seul pour accéder à la boutique du locataire. Ce n’est que dans cette hypothèse, que le locataire aurait pu faire valoir l’existence d’un trouble illicite.