Sommaire entretien de la Copropriété
- Moyens de détection et d'alarme - Moyens de lutte contre l'incendie, dans les bâtiments d'habitation
I - La communication de la feuille de présence.
Comment faire pour informer les copropriétaires bailleurs de ce qui se passe vraiment dans votre copropriété et surtout pour ceux qui ont confié la gestion de leur logement au syndic en place ?
Tout simplement en leur adressant un courrier. Oui, mais comment obtenir leurs adresses ? C’est (en principe) simple : en demandant copie de la feuille de présence (avec les adresses, ce qui est obligatoire) à votre syndic. Mais il est possible que votre syndic n’ait aucune envie d’une part que vous constatiez que sa feuille de présence est incomplète, d’autre part que vous contactiez ses clients « bailleurs ».
Dans ce cas il vous oppose 3 fois sur 4 la « confidentialité » à laquelle – soi-disant - il est astreint. Baliverne maintes fois dénoncée sur notre site. La cour d’appel de Rennes se joint une fois de plus à nous dans des termes très clairs.
II - Un arrêt très, très limpide
Rennes, comme on sait, est avec Grenoble la ville qui a « inventé » la copropriété. Autant dire que les magistrats de Rennes s’y connaissent et qu’on ne leur fait pas prendre la loi de 1965 pour un tract publicitaire. La cour d’appel de Rennes vient ainsi de confirmer ce que les dirigeants de Nexity (pour ne parler que d’eux - voir abus n° 3573 : www.unarc.fr/npp4) font mine de ne pas savoir que la feuille de présence doit être fournie AVEC les adresses.
Citons l’extrait de l’arrêt de la cour d’appel de Rennes à ce sujet, à diffuser à tous les syndics un peu durs d’oreille : « 4ème Chambre ARRÊT N° 279 R.G : 11/07662 COUR D’APPEL DE RENNES ARRÊT DU 06 JUIN 2013 » « Monsieur et Madame C…, copropriétaires, ont régulièrement sollicité de Mademoiselle P…, syndic, la communication de la feuille de présence de l’assemblée du … par lettre des … et par lettre du … ». Mademoiselle P…, qui est également agent immobilier soutient que la communication des adresses de copropriétaires constitue une divulgation des coordonnées des personnes qui constituent son fonds de commerce.
D’une part, il ne résulte pas des dispositions du décret susvisé que les copropriétaires doivent justifier des motifs de leur demande. D’autre part, la totalité des copropriétaires étant soumis aux dispositions qui prévoient que la feuille de présence comporte l’indication de leur domicile, il ne peut être utilement invoqué que cette communication porte atteinte à leur vie privée, nonobstant la circonstance qu’ils soient client du syndic, à l’occasion d’une autre activité de ce dernier.
En conséquence, le refus opposé par Mademoiselle P… ne se heurte à aucune contestation sérieuse il lui sera ordonné, dans un délai d’un mois à compter de la signification du présent arrêt, sous astreinte de 100 €uros par jour de retard passé ce délai d’un mois à communiquer aux consorts C… la copie conforme de la feuille de présence et des pouvoirs annexés au procès verbal de l’assemblée générale tenue le 20 août 2010 ».
Rappelez-vous : la feuille de présence doit comporter l’adresse des copropriétaires et non celles des syndics ou agents immobiliers qui gèrent leurs biens locatifs.
La tenue de l’assemblée générale et les mentions reprises dans le procès-verbal sont soumises à des règles édictées par la loi du 10 juillet 1965 et le décret du 17 mars 1967.
Le non-respect de ces règles peut permettre d’obtenir, par voie judiciaire, la nullité de l’assemblée générale ou simplement de certaines résolutions. Les juges ont cependant la possibilité d’interpréter les textes et de ne pas les appliquer littéralement, comme le prouve un arrêt de la Cour de cassation du 11 juillet 2019.
L’article 17 du décret du 17 mars 1967 dispose, que la régularité du procès-verbal de l’assemblée générale suppose qu’il soit établi en fin de séance par le secrétaire de séance, paraphé et signé par ses soins, le président et les éventuels scrutateurs.
Il impose aussi certaines mentions : « Le procès-verbal comporte, sous l'intitulé de chaque question inscrite à l'ordre du jour, le résultat du vote. Il précise les noms des copropriétaires ou associés qui se sont opposés à la décision et leur nombre de voix, ainsi que les noms des copropriétaires ou associés qui se sont abstenus et leur nombre de voix. »
Sous la résolution doivent aussi être consignées les éventuelles réserves quant à la régularité de la résolution formulées par les opposants.
Préciser le nom des opposants à une résolution permet au juge d’identifier les copropriétaires qui peuvent agir en nullité contre une résolution de l’assemblée générale, conformément à l’article 42 de la loi du 10 juillet 1965.
Cette procédure judiciaire doit être engagée dans le délai de deux mois suivant la notification de son procès-verbal par le syndic.
Nul ne doit cependant ignorer que la loi énonce quelque fois un principe, qui peut être suivi par des exceptions.
La première source peut être le texte légal lui-même, dont les conditions se trouvent souvent détaillées dans un décret d’application.
La seconde source est la jurisprudence civile, à savoir les décisions rendues par les juridictions (Cour d’appel et surtout Cour de cassation), qui peuvent préciser le sens de dispositions ambiguës ou dégager des règles pas forcément inscrites dans les textes, mais qui proviennent de leur interprétation.
Ainsi, des copropriétaires d’une résidence nîmoise contestent plusieurs points de l’assemblée générale du 3 septembre 2015, aux motifs que le nom des copropriétaires opposants n’étaient pas consigné sous les résolutions.
La Cour de cassation dans son arrêt n° 18-18615 du 11 juillet 2019 confirme une jurisprudence constante en la matière, à savoir que les carences du procès-verbal n’invalident pas de facto les résolutions litigieuses, voire l’assemblée générale dans son ensemble, si ces manquements peuvent être incontestablement complétés par sa principale annexe, la feuille de présence :
« […] Mais attendu qu'ayant retenu que l'absence de mention sur le procès-verbal du nom du copropriétaire ayant voté contre la résolution soumise au vote était sans incidence sur la régularité du vote, dès lors que ce copropriétaire était identifiable et constaté que le rapprochement, d'une part, du procès-verbal et de la feuille de présence, d'autre part, des votes émis contre les résolutions 4.1 et 4.2 permettait d'identifier le seul copropriétaire détenteur des 919 voix exprimées contre la résolution 4.1 et pour la résolution 4.2, la cour d'appel a pu en déduire qu'il n'y avait pas lieu à annulation de la décision n° 4 […] »
Les mentions de la feuille de présence doivent être non équivoques, et donc incontestables pour être retenues par les juges.
Si le droit de la copropriété apparaît fréquemment trop rigide, les copropriétaires ne doivent néanmoins pas minorer l’influence de la jurisprudence lorsqu’ils entendent contester judiciairement une résolution.
Les irrégularités affectant les assemblées générales (convocation et tenue) ne se soldent pas toujours par une nullité quand une action est engagée.
La Cour de cassation réitère sa jurisprudence constante sur les conditions nécessaires pour pouvoir solliciter la nullité de l’assemblée générale dans son ensemble par un copropriétaire qui a été victime d’une notification tardive de la convocation par le syndic.
Il incombe au syndic en exercice, en sa qualité d’unique représentant légal du syndicat (article 18 de la loi du 10 juillet 1965) de convoquer les copropriétaires en assemblée générale, et ce a minima une fois par an (article 7 du décret du 17 mars 1967).
Selon l’article 34 du décret du 17 mars 1967, la notification de la convocation de l’assemblée générale par le syndic aux copropriétaires s’entend soit par l’envoi d’une lettre recommandée avec demande d’avis de réception, soit par voie électronique (à la condition d’un accord écrit express individuel de chaque destinataire), soit par une remise contre émargement.
Cette notification doit respecter un délai minimal réglementaire de 21 jours, entre le lendemain de la première présentation de celle-ci à tous les copropriétaires et le jour de la réunion du syndicat (article 9 du décret du 17 mars 1967).
Régulièrement, les délais de notification ne sont pas respectés. Certains copropriétaires concernés se rendent quand même à l’assemblée générale et font alors consigner cette irrégularité dans le procès-verbal.
L’article 42 de la loi du 10 juillet 1965 dispose que l’action judiciaire en contestation de l’assemblée générale (résolutions ou réunion complète) doit être exercée par les copropriétaires opposants (ayant voté dans le sens contraire de la décision) ou défaillants (absents non représentés) dans le délai de deux mois suivant la notification de son procès-verbal par le syndic.
En l’espèce, le syndic professionnel d’une copropriété sise à Menton (06) notifie hors délai la convocation de l’assemblée générale du 21 juin 2010 à une SCI T.B.V. propriétaire d’un lot.
Tout en signalant et faisant retranscrire sur le procès-verbal l’irrégularité de l’assemblée générale du fait de cette convocation tardive, la SCI T.B.V. ne s’oppose pas à l’ensemble des points inscrits à son ordre du jour.
Autrement dit, elle vote favorablement certaines questions adoptées par l’assemblée générale.
Puis après la notification du procès-verbal, elle assigne le syndicat des copropriétaires pour obtenir la nullité dans son intégralité.
La Cour de cassation dans son arrêt n° 18 - 10379 du 14 mars 2019 confirme sa jurisprudence, à savoir qu’un copropriétaire ne peut solliciter l’annulation d’une assemblée générale dans sa totalité, dès lors qu’il vote favorablement à l’une de ses décisions approuvées.
Le fait qu’il fasse consigner une réserve sur la validité de l’assemblée générale ne suffit pas pour obtenir la nullité de cette dernière :
« […] Mais attendu qu'ayant retenu à bon droit qu'un copropriétaire ne peut demander l'annulation d'une assemblée générale dès lors qu'il a voté en faveur de certaines des décisions prises et constaté que la SCI T.B.V. avait voté en faveur de plusieurs résolutions lors de l'assemblée générale du 21 juin 2010, sans que la mention en page trois du procès-verbal selon laquelle elle précisait que l'assemblée générale était entachée d'illégalité en raison du non-respect du délai de convocation lui ait conféré la qualité d'opposant ou de défaillant à l'ensemble des décisions prises, la cour d'appel en a exactement déduit que la demande était irrecevable ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé […] ».
En revanche, ce copropriétaire est en mesure d’invoquer la nullité d’une ou plusieurs résolutions prises individuellement lors de l’assemblée générale illicite s’il jouit de la qualité d’opposant à la décision concernée :
« Attendu que, pour déclarer irrecevable la demande en annulation de diverses décisions adoptées au cours de l'assemblée générale, l'arrêt retient que la demande est nouvelle, comme n'ayant pas été présentée en première instance, et a été formée après l'expiration du délai de deux mois ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher si la demande subsidiaire en annulation de quinze décisions n'était pas virtuellement comprise dans la demande en annulation de l'assemblée générale et, dans l'affirmative, sans constater que cette demande initiale avait été formée hors délai, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des textes susvisés ; […] ».
Le copropriétaire présent à une assemblée générale irrégulière, qui envisage de la contester judiciairement dans son intégralité, doit préserver ses droits en votant dans le sens contraire de la majorité de chacune des résolutions, afin de ne pas engager en vain une procédure contentieuse longue et onéreuse.
Lors de la tenue de l’AG, une feuille de présence doit être tenue et signée par chaque copropriétaire ou mandataire, en général en début de séance, et au départ (en cas de départ avant la fin de la réunion).
Ses mentions sont prévues par l’article 14 du décret de 1967, en particulier les nom et domicile de chaque copropriétaire présent ou représenté, de chaque mandataire, le nombre de voix dont dispose chaque copropriétaire, ainsi que le nombre de pouvoirs détenus par chaque mandataire…
Ce document important est annexé au PV d’assemblée (article 17).
Cette feuille doit être émargée par les copropriétaires ou leurs représentants (sauf participation à distance).
C’est le président de séance désigné lors de l’assemblée qui a la fonction de la contrôler et de la certifier exacte.
Cette vérification est précieuse car elle permet notamment de s’assurer que le nombre maximum de mandats de vote est respecté.
L’article 33 du décret permet à chaque copropriétaire d’en obtenir une copie intégrale (ainsi que celle du PV. Le syndic est alors tenu de s’exécuter, sans discuter.
Compte tenu du fait que la feuille de présence est un document impératif et qu’elle récapitule les informations essentielles permettant de s’assurer de la régularité de la tenue de l’assemblée et des conditions de vote, la Cour de cassation sanctionne sévèrement le non-respect de cette formalité.