Sommaire livraison des lots privatifs
Les Lots privatifs :
- Règlementation Acoustique et Thermique des bâtiments neufs à usage d'habitation
Le syndic est l’organe exécutif du syndicat des copropriétaires, il en est le gestionnaire et le mandataire.
A ce titre, il a un certain nombre de missions définies à l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965, dont celle d’administrer l’immeuble, de pourvoir à sa conservation à sa garde et à son entretien et, en cas d’urgence, de faire procéder de sa propre initiative à l’exécution de tous travaux nécessaires à la sauvegarde de celui-ci.
Autrement dit, il existe une dérogation à l’absence de pouvoir décisionnaire du syndic : l’initiative de l’exécution des travaux urgents. Cette initiative est soumise à une procédure strictement encadrée. En effet, l’article 37 du décret du 17 mars 1967, dispose que le syndic doit en informer tous les copropriétaires, puis convoquer immédiatement une assemblée générale.
Mais, que se passe-t-il si le syndic décide d’exécuter des travaux qui ne répondent pas au critère de l’urgence, sans autorisation de l’assemblée générale?
Dans un arrêt du 23 janvier 2020 n° 18-21357, la Cour de cassation rappelle que le syndic ne peut engager de sa propre initiative que des travaux urgents et qu’à défaut le syndicat des copropriétaires peut demander la réparation du préjudice subi.
Suite au départ en retraite d’un couple de gardiens, le syndic fait procéder à une rénovation de la loge, devenue selon lui nécessaire. Ces travaux sont diligentés sans autorisation préalable de l’assemblée générale et sont réalisés pour un montant de 42 010€
Le syndicat des copropriétaires assigne en justice le syndic pour demander réparation du préjudice subi, suite à l’exécution des travaux qu’il considère comme non-urgents.
Conformément à l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965, il entre dans les missions du syndic de réaliser les travaux urgents.
D’ailleurs, soulignons que si le syndic refuse d’effectuer les travaux rendus nécessaires par l’urgence, il engage sa responsabilité. C’est une décision de la Cour de cassation en date du 10 janvier 2012 (n°10-26.207) qui a dégagé ce principe.
Reste donc à savoir, ce qui est considéré comme travaux urgents : il y a urgence lorsqu’en lui-même, le défaut de réaction rapide entrainerait un préjudice imminent, ce qui empêche la convocation préalable d’une assemblée générale.
Or, dans cet arrêt, il est question de travaux de peinture de la loge du gardien. La Cour de cassation confirme qu’il ne s’agit pas « d’une situation d’urgence pour la sauvegarde de l’immeuble ».
Dès lors, la Cour de cassation considère que le syndic a commis une faute en engageant des travaux de sa propre initiative, alors que ces travaux n’étaient pas urgents. Ainsi, la faute « consiste en un engagement de dépense irrégulier, qui a causé un préjudice au syndicat, qui a été contraint de payer ces dépenses non choisies tant dans leur principe que dans leur montant ».
Ainsi, si le syndic engage des travaux considérés comme non-urgents, il engage sa responsabilité vis-à-vis du syndicat des copropriétaires.
Le syndic qui a commis une faute dans l’exercice de sa mission, engage sa responsabilité vis-à-vis du syndicat des copropriétaires.
Dans cet arrêt, le syndic tente de s’exonérer de sa responsabilité en invoquant que la demande émanait du conseil syndical.
Or, le conseil syndical ne dispose pas de pouvoir décisionnaire, seul le syndicat des copropriétaires réuni en assemblée générale dispose du pouvoir décisionnaire.
A titre exceptionnel, le conseil syndical dispose de pouvoir décisionnaire si et seulement si l’assemblée générale lui a délégué le pouvoir de réaliser des travaux ou si à compter du 1er janvier 2021, il dispose d’un mandat de pouvoir élargi.
En dehors de ces conditions, il est important de rappeler que le conseil syndical ne dispose d’aucun pouvoir décisionnaire.
Dès lors, le syndic ne peut se retrancher derrière une telle raison, d’autant plus qu’en tant que professionnel, il doit connaitre les textes relatifs à la copropriété.
Ainsi, le syndic est condamné au paiement d’une somme au titre du préjudice subi par le syndicat des copropriétaires.
La Cour d’appel décide de condamner le syndic à hauteur du montant des travaux réalisés.
Le syndic conteste ce montant, en indiquant que les juges n’avaient pas pris en compte l’avantage que le syndicat des copropriétés avait tiré de la rénovation de la loge du gardien.
Autrement dit, pour le syndic, il faut déduire du montant des travaux, l’avantage que le syndicat des copropriétés obtient du fait des travaux irrégulièrement exécutés.
Cependant, la Cour de cassation donne raison à la Cour d’appel, et affirme le principe selon lequel la réparation d’un dommage doit être intégrale et ne peut excéder le montant du préjudice.
En conséquence, la Haute juridiction refuse de prendre en compte l’avantage tiré de la réalisation illégale des travaux pour diminuer le montant accordé au syndicat des copropriétaires.
En effet, cela reviendrait à entériner les travaux réalisés par le syndic et à diminuer sa responsabilité.
Les initiatives unilatérales de copropriétaires sur les parties communes ne constituent pas des actes isolés et peuvent donner lieu à des contestations judiciaires quant à leur légalité.
Un arrêt de la Cour de cassation du 22 octobre 2020 apporte un nouvel éclairage sur cette question, via la pose d’une signalétique commerciale sur les parties communes.
Une résidence sise à Paris 1er arrondissement comprend notamment un lot commercial affecté depuis plus de 100 ans à la haute joaillerie, et ce, conformément à la destination de l’immeuble prévue par le règlement de copropriété.
Le propriétaire du lot installe unilatéralement sur la façade du bâtiment une enseigne commerciale à une date incertaine, qui pourrait se situer entre 1953 et 1964.
Une assemblée générale du 9 septembre 2011 adopte un projet de ravalement de la façade intégrant la dépose et la repose de l’enseigne commerciale.
Le propriétaire d’un lot, opposant à cette résolution, invoque judiciairement sa nullité. Il justifie son action sur le fait, que l’intervention légitime du détenteur d’un lot sur une partie commune, telle la façade de l’immeuble, suppose l’autorisation de l’assemblée générale à la majorité des voix du syndicat des copropriétaires selon l’article 25 alinéa b de la loi du 10 juillet 1965.
Or, cet aval impératif faisant manifestement défaut en l’espèce, la présence de cet aménagement privatif se révèle illicite et, ne peut donc être intégré par le syndicat dans le cadre des travaux d’entretien des parties communes.
A cette procédure engagée à l’encontre du syndicat, se joint le propriétaire du lot commercial concerné.
Si les deux premières juridictions judiciaires civiles écartent l’argumentation de ce contestataire (jugement TGI Paris du 18 juin 2013, décision de la cour d’appel de Paris du 17 juin 2015), la Cour de cassation fait partiellement droit à sa demande par un arrêt du 15 décembre 2016, en censurant la présence illicite et inopposable au syndicat de l’enseigne commerciale et renvoyant les parties devant la cour d’appel de Paris.
Dans son arrêt n° 17 - 06400 du 15 mai 2019 la cour d’appel de Paris, confirmé par la Cour de cassation dans sa décision n° 19 - 21732 du 22 octobre 2020, suite à un nouveau recours du propriétaire contestataire, entérine la signalétique commerciale sur la façade de l’immeuble.
Ces derniers magistrats assimilent, tout comme leurs homologues de l’instance inférieure, la présence de l’enseigne individuelle sur la façade collective, à un droit de jouissance privatif de son propriétaire (usage exclusif de cette installation personnelle par le détenteur du lot commercial exploité en joaillerie) sur une partie commune.
Or, le droit de jouissance peut aussi bien résulter d’une décision initiale ou ultérieure du syndicat stipulée dans le règlement de copropriété, que d’une situation de fait de plus de trente ans incontestée judiciairement pendant ce laps de temps, comme en l’espèce : «... La cour d'appel a retenu à bon droit qu'un droit de jouissance privatif sur des parties communes est un droit réel et perpétuel qui peut s'acquérir par usucapion et qu'un tel droit peut avoir pour objet l'apposition d'enseignes sur les parties communes de la copropriété. Elle a constaté que la pose d'enseignes en imposte sur les portes cochères n'avait pas été autorisée par l'assemblée générale et que le règlement de copropriété ne contenait aucune stipulation sur ce point.
Elle a relevé que la société R.H.F. avait apposé les enseignes depuis 1964, voire 1953, et avait manifesté, depuis lors, son intention de se comporter en titulaire exclusif du droit de les poser.
Elle en a souverainement déduit, sans qu'il y ait lieu de caractériser une acceptation expresse des copropriétaires, qu'il ne s'agissait pas d'une simple tolérance des autres copropriétaires, mais que cette société, ayant accompli, sans interruption depuis plus de trente ans, des actes caractérisant une possession continue, ininterrompue, paisible, publique et non équivoque, avait acquis, par usucapion, un droit de jouissance privatif réel et perpétuel au maintien des enseignes."
En présence d’un aménagement exécuté illicitement par le propriétaire d’un lot sur les parties communes, la personne morale ou physique qui envisage de faire cesser l’illégalité doit apprécier à juste mesure la nature juridique de l’irrégularité et donc la prescription applicable.
Dans le cas contraire, elle s’expose à engager à l’égard du contrevenant un contentieux long, onéreux et surtout vain.
L’entretien des parties communes et des équipements collectifs peut connaître des insuffisances préjudiciables pour le syndicat de copropriétaires et le syndic.
Les copropriétaires et le syndic ne doivent pas ignorer les effets d’une telle carence en cas de survenance d’un sinistre, comme le rappelle un arrêt de la Cour d’appel de Paris du 30 janvier 2019.
La conservation des parties communes et des installations collectives incombe au syndicat des copropriétaires comme le précise l’article 14 de la loi du 10 juillet 1965.
Les copropriétaires supportent les opérations de maintenance courantes qui relèvent du budget prévisionnel de fonctionnement.
Ils doivent aussi décider, lors des assemblées générales, des travaux plus importants de réparation ou de rénovation.
Ces travaux sont proposés dans l’ordre du jour de l’assemblée générale et la convocation doit comporter les éléments essentiels (devis, descriptifs techniques…) pour des travaux conséquents.
Pour sa part, le syndic, en qualité de mandataire est chargé d'administrer l'immeuble, de pourvoir à sa conservation, à sa garde et à son entretien.
Cela signifie qu’il doit notamment mandater les opérations de maintenance ou les interventions conservatoires pour contenir un désordre issu des parties communes, d’équipements collectifs et proposer à l’assemblée générale les travaux nécessaires en cas de sinistre dont la cause est une partie commune défaillante ou vétuste.
L’article 14 de la loi du 10 juillet dispose aussi que : « Le syndicat des copropriétaires est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers par le vice de construction ou le défaut d'entretien des parties communes, sans préjudice de toutes actions récursoires ».
Malheureusement, certaines résidences peuvent se voir affectées par des désordres émanant fréquemment de parties communes vétustes en raison du refus de copropriétaires de réaliser les réfections appropriées et d’un syndic complaisant.
En l’espèce, l’appartement d’une propriétaire bailleresse subit des dégâts des eaux sur plusieurs années provoqués par la toiture dégradée de l’immeuble, à tel point qu’il est inhabitable.
Elle sollicite de deux précédents syndics professionnels, qui se succèdent durant ce sinistre, les actions indispensables : mesures conservatoires et présentation des travaux de rénovation appropriés à l’assemblée générale.
En raison d’une réfection tardive de la toiture, ayant empêché pendant 16 mois toute location de son bien fortement endommagé, la victime décide d’assigner en réparation de son préjudice le syndicat des copropriétaires et ces deux syndics professionnels sur le fondement des articles 14 et 18 de la loi du 10 juillet 1965.
La Cour d’appel de Paris dans son arrêt n° 15 - 15805 du 30 janvier 2019 reconnaît ces responsabilités :
« […] Relevant que seule la toiture de l’immeuble se trouvant au-dessus de l’appartement et présentant des défaillances telles qu’elles rendaient nécessaire la pose renouvelée de bâches, le tribunal a exactement énoncé que les dégâts affectant l’appartement de Mme L. avaient pour origine la toiture partie commune mal entretenue par le syndicat des copropriétaires dont la responsabilité se trouve engagée au titre de l’article 14 de la loi du 10 juillet 1965. Le jugement sera confirmé en ce que la responsabilité de plein droit du syndicat des copropriétaires a été retenue …
Les premiers juges ont exactement énoncé, que la société F. (syndic précédent), en ne procédant ni à la déclaration des sinistres auprès de l’assureur de la copropriété, ni à l’inscription de projets de travaux et de demande de devis pour les assemblées générales, ni à aucune investigation pour connaitre la cause des sinistres, a commis une faute dans la gestion des désordres affectant l’appartement de Mme L. et ayant pour origine une partie commune de l’immeuble dont elle avait la charge de l’administration ;
Le jugement sera confirmé en ce que la société F. a été condamnée à garantir le syndicat des copropriétaires des condamnations mises à sa charge…
Les premiers juges ont exactement retenu que la société A. (syndic antérieur) a fait procéder de sa propre initiative à des travaux d’une ampleur limitée mais urgents à deux reprises, conformément à l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965 et qu’il ne peut lui être reproché de ne pas avoir engagé de plus amples travaux dans la mesure où les travaux de couverture finalement exécutés en 2010 se sont élevés à plus de 80000 €, somme que le syndic n’aurait pas pu engager au nom de la copropriété de son propre chef.
Le jugement doit être confirmé en ce qu’il a mis hors de cause la société A., aucune faute susceptible d’engager sa responsabilité délictuelle ne pouvant être retenue…
La cour condamne le syndicat à payer au copropriétaire 248 € de frais d’huissier, 5888 € de dépenses travaux de peinture et de revêtement de sol et 14946 euros de perte de loyer pour une période de 16 mois […] »
En cas de défaillance d’un syndic, face à des désordres causés par la vétusté de parties communes, le conseil syndical ne doit pas hésiter à le relancer tant que de besoin jusqu’à ce qu’il fasse voter les travaux nécessaires.
A défaut, il faut envisager de changer de syndic, à plus forte raison si cela cause un préjudice à un résident ou à un copropriétaire.
Il est fréquent que des parties communes non ou mal entretenues soient à l’origine de divers désordres et en particulier de dégâts des eaux.
C’est ainsi que si le syndic est passif et que l’assemblée générale ne cherche pas à faire exécuter des travaux de rénovation ou réparation, pour le plus souvent limiter les charges, les conséquences peuvent être lourdes.
La Cour de Cassation, dans son arrêt du 21 décembre 2017 (16-25753), rappelle sa jurisprudence dans ce domaine.
I. La coresponsabilité du syndic et du syndicat peut être retenue dans un sinistre causé par les parties communes et les équipements collectifs
En 2002, dans un immeuble géré par le syndic professionnel, le Cabinet Paul GABET, le plafond du 5ème étage s’effondre, en raison d’une étanchéité commune dégradée, obligeant deux copropriétaires à quitter leur logement.
Diverses actions judiciaires (en référé et au fond) sont alors introduites contre ce syndic regroupant :
En première instance le T.G.I de Paris condamne l’ancien syndic Paul GABET, qui décide d’interjeter appel.
La Cour d’Appel de Paris dans un arrêt n° 12 - 03418 confirme partiellement le jugement de première instance, dans la mesure où il décide d’un partage de responsabilité entre le syndic et le syndicat des copropriétaires.
Le syndicat des copropriétaires se pourvoit en cassation, et voit son recours écarté :
« Attendu que le syndicat des copropriétaires fait grief à l'arrêt de limiter la part de responsabilité du syndic à 40 % du préjudice subi ;
Mais attendu qu'ayant relevé… que le syndicat des copropriétaires, qui était nécessairement informé de l'état de la construction dont la conception était en cause, était en mesure de décider des travaux pour remédier au défaut d'étanchéité des étages supérieurs et que le syndic avait manqué à ses obligations d'information et de diligence… , la cour d'appel a pu en déduire que la responsabilité des désordres devait être partagée entre le syndicat des copropriétaires et le syndic .. ; "
Le syndicat des copropriétaires a donc été considéré comme responsable à hauteur de 60%.
Dans ce dossier, les fuites étaient répétitives depuis de nombreuses années sans qu’aucune action n’ait été entreprise ni par le syndic ni par le conseil syndical.
II. Les obligations du syndicat et du syndic en matière de travaux d’entretien des parties communes et des équipements collectifs
L’objet du syndicat des copropriétaires consiste à entretenir les parties communes et les équipements collectifs de la résidence (art. 14 de la loi du 10 juillet 1965).
Il incombe à l’assemblée générale du syndicat de se prononcer sur les travaux de rénovation des parties communes et des installations collectives (art. 17 de la loi du 10 juillet 1965) selon les éléments essentiels (le plus souvent devis) annexés à la convocation (art. 11 alinéa 3 du décret du 17 mars 1967).
Le syndic, qui est chargé de l’administration de l’immeuble (opérations de maintenance, exécution des résolutions de l’assemblée générale), doit informer l’assemblée générale des risques liés à des défauts d’entretien ou des éléments vétustes causant un risque pour la sécurité de la copropriété, et si nécessaire mettre à l’ordre du jour des travaux d’ampleur. C’est pour cette absence de diligence et une information incomplète transmise au syndicat des copropriétaires qu’il a été reconnu responsable à hauteur de 40% des dommages.
La Cour d’appel a considéré que le syndicat était en mesure de prendre des initiatives et de décider de travaux ayant pour objet l’étanchéité des étages.
Le syndicat et son conseil syndical doivent, pour minorer ces contentieux onéreux, contrôler et suppléer aux défaillances du syndic, en faisant établir à défaut les devis de rénovation et en alertant les copropriétaires des conséquences dommageables, en cas de refus injustifié d’adopter en assemblée générale la résolution de travaux appropriée.
Le recours à un syndic professionnel ne suffit donc pas toujours à assurer une bonne administration de l’immeuble, et préserver le syndicat contre des actions en réparation de copropriétaires lésés par ses carences.
La vigilance du conseil syndical doit rester de mise.
Les copropriétaires éprouvent régulièrement des difficultés pour appréhender la nature juridique de fractions du bâti (parties communes ou privatives), mais également les droits qui leur sont consentis sur celles-ci par le règlement de copropriété.
La Cour de cassation, dans son arrêt du 14 mars 2019, rappelle la distinction fondamentale entre la jouissance et la propriété d’un bien immobilier.
L’achat d’un bien immobilier dans une résidence en copropriété implique l’existence d’un lot appelé partie privative, c’est-à-dire un local déterminé (stipulé dans l’état descriptif de division, généralement rattaché au règlement de copropriété), auquel est indissociablement rattaché la propriété indivise du gros-œuvre, d’équipements collectifs ou parties communes générales (détenues par tous les copropriétaires), voire spéciales (appartenant uniquement à certaines copropriétaires) selon l’article 1 de la loi du 10 juillet 1965.
Conformément aux principes généraux du droit, le possesseur d’un lot en copropriété a l’usage exclusif de celui-ci, la capacité de le louer ou de le céder (article 544 du Code civil).
Il a pour seules restrictions de se conformer aux prescriptions du règlement de copropriété définissant notamment les parties communes et privatives, ainsi que la destination de l’immeuble, qui peut être exclusivement bourgeoise (habitation), bourgeoise (permettant tout ou partie des professions libérales), mixte (autorisant toutes les activités commerciales ou uniquement certaines d’entre elles).
Il ne doit pas nuire non plus aux droits des autres copropriétaires de jouir librement de leurs parties privatives et des parties communes comprises dans leurs lots (article 9 de la loi du 10 juillet 1965).
La configuration d’une résidence en copropriété peut conduire le syndicat à octroyer à un lot (transmissible) ou à un propriétaire précis (non transmissible) un privilège particulier, qualifié de jouissance exclusive ou privative sur une partie commune (cour, courette, toiture, terrasse, jardin).
Elle se distingue de la propriété d’un bien immobilier, en ce sens que le bénéficiaire en a un usage précaire, puisqu’il ne peut pas vendre uniquement ce droit d’usage.
Ce droit peut disparaître, soit à l’occasion de la mutation du bien (si la jouissance est concédée nominativement), soit par un modificatif de règlement de copropriété approuvé en assemblée générale, avec impérativement le vote favorable du copropriétaire disposant du droit de jouissance.
Le bénéficiaire de ce droit d’usage n’a la capacité de réaliser certains aménagements superficiels (démontables) que moyennant une autorisation de l’assemblée générale à la majorité des voix du syndicat, dès lors que ceux-ci affectent les parties communes ou l’aspect extérieur de l’immeuble (article 25 alinéa b de la loi du 10 juillet 1965).
Il doit supporter les menues opérations d’entretien (nettoyage), ainsi que l’intervention des prestataires du syndicat pour les opérations de réfection de la partie commune dont il peut disposer.
En l’espèce dans une copropriété sise dans le sud de la France, le propriétaire d’un lot commercial bénéficiant de la jouissance du jardin contigu et d’un hangar, sollicite et obtient d’une assemblée générale du 28 août 2014 l’autorisation de réaliser à ses frais divers travaux de destructions et de construction sur ceux-ci, dans le cadre du réaménagement de son local commercial.
Un copropriétaire opposant, considérant l’opération comme illicite, notamment pour les aménagements du jardin et du hangar, qu’il considère être une appropriation de partie commune et un changement de destination de l’immeuble, assigne le syndicat en annulation des résolutions litigieuses.
Sa demande est écartée, la Cour d’appel considérant que le jardin et le hangar sont compris dans la composition d’un lot, et étant affectés à l’usage exclusif d’un copropriétaire déterminé, sont des parties privatives. Il se pourvoit en cassation.
La Cour de cassation dans son arrêt n° 17-23285 du 14 mars 2019 infirme la décision rendue par la juridiction inférieure en précisant la nature juridique du jardin (partie commune) et l’illégalité de travaux sur celle-ci par une personne ne disposant pas de la propriété donc du droit d’en disposer, mais simplement d’un droit de jouissance :
« […] Qu'en statuant ainsi (hangar et jardins sont des parties privatives), alors qu'il ressortait de l'état descriptif de division figurant au chapitre II du règlement de copropriété que le lot n° 1 ne comportait que le droit à la jouissance exclusive et particulière du jardin et du hangar y édifié, la cour d'appel, qui a dénaturé les dispositions claires et précises de ce document, a violé le principe susvisé ; ».
Droit de jouissance et de propriété d’un bien immobilier constituent deux notions juridiques distinctes. Le syndicat doit apprécier précisément le projet d’un copropriétaire sur un bien immobilier, notamment s’il concerne une partie commune.
En effet, si l’opération envisagée entraîne l’appropriation de celle-ci, entre autre par une construction, elle suppose préalablement de procéder à la création d’un nouveau lot, par un avenant au règlement de copropriété qui fera ensuite l’objet d’une cession.
La configuration d’une résidence peut attiser les velléités de copropriétaires de bénéficier d’un usage exclusif sur une partie commune (terrasse, cour, jardin) contiguë de leur lot.
La Cour de Cassation rappelle dans un arrêt du 6 septembre 2018 la législation applicable.
Le règlement de copropriété constitue la « loi du syndicat », c’est-à-dire qu’il fixe librement les parties privatives, les parties communes ainsi que les modalités de jouissance et d’administration de celles-ci, à la seule condition de ne pas enfreindre des dispositions d’ordre public (art. 8 de la loi du 10 juillet 1965).
Autrement dit, le règlement de copropriété a vocation à contenir les éventuels usages exclusifs que détient un lot sur une partie commune. Ce droit exclusif peut donc avoir été octroyé dès l’origine et stipulé tel quel dans ce document. C’est un droit réel.
Le droit de jouissance exclusif sur une partie commune peut également être accordé ultérieurement par le syndicat, moyennant une résolution de l’assemblée générale (art. 17 de la loi de la loi du 10 juillet 1965), adoptée à la double majorité de l’article 26 du même texte.
Une telle décision ne donne pas forcément lieu à un avenant au règlement de copropriété notamment lorsque l’assemblée concède ce privilège à un copropriétaire déterminé et non à un lot. C’est un droit personnel.
Dans cette hypothèse, lors de la mutation du lot, ce droit ne se transmet pas au nouvel acquéreur, il s’éteint avec le départ du vendeur, contrairement à une jouissance privative sur la partie commune qui serait accordée à un lot, transmise au nouvel acquéreur du lot.
A titre exceptionnel, le copropriétaire qui occupe de manière publique et continue pendant trente ans une partie commune peut en revendiquer la jouissance, voire la propriété (art. 2272 du Code civil).
En l’espèce, dans un immeuble parisien, comprenant deux terrasses sur lesquelles le syndicat a consenti un droit de jouissance personnel à deux copropriétaires distinctes, l’une d’elles prétend détenir également l’usage exclusif de l’autre partie commune par une convention (non validée en assemblée générale) et par une occupation de celle-ci pendant plus de 10 ans.
Dans l’arrêt n°17 - 22180 du 6 septembre 2018, la 3ème chambre civile de la Cour de cassation rejette le recours de cette copropriétaire selon sa jurisprudence constante :
« […] Mais attendu qu'ayant relevé que l'assemblée générale du 30 mai 1956 avait autorisé Mme A..., précédente propriétaire de l'appartement, à installer une terrasse et que l'assemblée générale du 14 mai 1985 avait accordé à Mme X... le droit d'usage de la deuxième partie de la terrasse, souverainement retenu que les copropriétaires avaient souhaité octroyer de simples autorisations personnelles aux propriétaires successifs de l'appartement nommément identifiés, de sorte que Mme X... n'avait pu, en acquérant les lots obtenir un droit de jouissance exclusif sur la première partie de la terrasse et constaté, d'une part, que la convention signée le 12 septembre 1985 entre le syndicat des copropriétaires et Mme X... contrevenait aux termes de l'assemblée générale du 12 mai 1985, en ce qu'elle indiquait que le droit de jouissance était attaché aux lots 10 et 11, d'autre part, que Mme X... exerçait une action réelle en revendication d'un droit de jouissance privative, soumise à la prescription trentenaire, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, en a exactement déduit que Mme X... ne pouvait se prévaloir que d'un droit personnel et ne pouvait bénéficier de l'usucapion ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé […] »
L’assemblée générale avait autorisée un droit à titre personnel. La convention signée avec le syndicat des copropriétaires avait accordé ce droit de jouissance au lot, cela aurait pu être qualifié de droit réel.
La Cour n’a pas retenu cette convention qui était contraire à ce qui avait été décidée par l’assemblée générale. Par conséquent, le droit personnel ne permettant pas d’acquérir avec le temps, la demande de la copropriétaire a été rejetée.
Tout copropriétaire doit se conformer expressément aux droits accordés par le syndicat sur une partie commune et ne pas confondre un droit d’usage accordé à une personne avec le même droit accordé à un lot.
La jurisprudence a eu l’occasion de reconnaître, en l’absence de droit particulier conféré par le règlement de copropriété, qu’un copropriétaire pouvait se prévaloir d’un droit de jouissance privatif sur une partie commune. La plupart du temps, il s’agira d’une partie commune attenante à un lot ou y donnant accès : cour, jardin, terrasse, chemin…
La Cour d’appel a retenu, dans cette affaire, que les copropriétaires du rez-de-chaussée qui utilisaient depuis plus de 30 ans une partie de terrain à titre privatif n’avaient pas pu acquérir pour autant un droit de jouissance par usucapion.
La Cour de cassation, dans son arrêt de 2007, censure le juge d’appel et retient « qu'un droit de jouissance privatif sur des parties communes est un droit réel et perpétuel qui peut s'acquérir par usucapion ».
Le moyen de l’usucapion est en principe utilisé pour faire valoir un droit de propriété, et non un simple droit de jouissance. Or, le droit de jouissance n’est pas un droit de propriété : la partie concernée reste donc bien une partie commune, mais les copropriétaires concernés bénéficient du droit d’en jouir seuls – excluant une jouissance par d’autres copropriétaires – comme s’ils y avaient été autorisés par le règlement de copropriété ou une décision d’assemblée générale.
Compte tenu de sa mission d’assurer le bon entretien et la bonne conservation de l’immeuble, il doit faire procéder aux travaux nécessaires, lorsqu’ils ont été votés en assemblée.
Mais il arrive très souvent que des copropriétaires soient confrontés à la nécessité d'une intervention rapide : rupture de canalisation dans les parties communes, panne du système de chauffage...
S'il s'avère que les travaux sont urgents et nécessaires à la sauvegarde de l'immeuble, le syndic non seulement peut, mais doit y faire procéder de sa propre initiative, conformément à l'article 18 de la loi du 10 juillet 1965.
À défaut, il engage sa responsabilité.
Il faut toutefois noter que la jurisprudence a considéré qu'il n'était pas responsable si l'assemblée avait opposé un refus catégorique aux travaux.
En l'espèce, une pile maçonnée de soutènement d'un mur de refend en sous-sol de l'immeuble s'est effondré. Il ressort du dossier que l'architecte de la copropriété avait attiré l'attention du cabinet de syndic sur ce danger, mais qu'aucune suite n'a été donnée par le syndic.
La Cour de cassation reproche alors au syndic sa négligence, eu égard à son devoir de veiller à la conservation de l'immeuble. D'autant plus que l'architecte avait invité le cabinet de syndic "à faire d'urgence un piochement des sols des caves aux endroits affaissés... afin de pouvoir mesurer l'importance de l'affouillement sous les fondations"
Dès lors, le syndic ne pouvait prétendre ignorer le problème de la copropriété ni sa gravité.
En conséquence, en s'abstenant de faire procéder aux travaux urgents, le syndic a manqué à ses obligation qui lui incombaient et a commis une faute qui a concouru à la réalisation de l'entier dommage.
Autrement dit, le syndic doit être d'une extrême vigilance quant à la réalisation des travaux urgents, il doit de suite faire procéder à leur réalisation s'il ne veut pas voir sa responsabilité engagée.
Il doit donc se prémunir contre tous dommages affectant la copropriété, tout en étant certain que les travaux sont bien qualifiés "d'urgents" pour ne pas qu'il engage sa responsabilité en exécutant des travaux non-urgents.
Ce cas soulevé en jurisprudence, en comparaison du précédent, montre bien à quel point l'appréciation de l'urgence par le syndic doit être juste.
D'un côté, il est responsable de ne pas avoir pris l'initiative de travaux pourtant urgents, de l'autre il est responsable d'avoir pris l'initiative de travaux qui n'étaient pas urgents.
Le législateur ayant entendu limiter ses prérogatives propres, le syndic qui fait procéder à des travaux non urgents et sans attendre d'obtenir une autorisation en assemblée générale outrepasse ses pouvoirs et engage sa responsabilité.
La même logique conduit les juges à sanctionner le syndic qui ferait procéder à des travaux non conformes à la décision d'assemblée (CA de Dijon, 7 décembre 2010, n° 09/01439) ou d'un montant supérieur en raison de travaux supplémentaires non approuvés en assemblée (Cass., 3e civ., 11 mai 2010, n° 09-14340).