Formations (15)

La Cour de Cassation rappelle les règles de transmissibilité d’un droit de jouissance exclusif sur une partie commune

Catégories Définition des parties communes et privatives
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
18 janvier 2018 (16-16.950)
Observations

Jurisprudence constante.

Principe retenu

Si un copropriétaire peut revendiquer une jouissance exclusive sur une partie commune, y compris en faisant jouer le délai d’occupation de celle-ci par le précédent copropriétaire, ce privilège implique un droit incontestable et continu, résultant à titre principal d’une clause conventionnelle.

Analyse de la décision

Dans certains ensembles en copropriété, le propriétaire du ou d’un lot en rez-de-chaussée est le seul utilisateur d’un jardin et/ou d’une cour qui est contigu à son lot, et qui dans le règlement de copropriété est qualifié de partie commune.

Avec le temps, ce copropriétaire pourrait considérer qu’il a acquis un droit de jouissance exclusif sur cette partie commune.

La Cour de Cassation précise, dans un arrêt du 18 janvier 2018 le droit applicable dans ce domaine, notamment en cas de cession du lot.

I. La constitution d’un droit de jouissance exclusif sur une partie commune

Par nature, les parties communes sont accessibles à tous les copropriétaires ou à certains d’entre eux.

Le droit de jouissance privatif sur une partie commune s’entend d’un usage exclusif de celle-ci en faveur soit du lot, soit de son propriétaire (et donc de son locataire).

Cela signifie, que tout en demeurant une partie commune, cette fraction de l’immeuble est réservée à un lot, ou son copropriétaire, qui en contrepartie effectue sur celle-ci les menues opérations de maintenance.  C’est essentiellement une cour, un jardin ou une terrasse en toiture.

En revanche, les travaux d’entretien ou d’amélioration restent en principe à la charge du syndicat, puisque son objet consiste à assurer la conservation des parties communes (art. 14 de la loi du 10 juillet 1965).

Cet avantage particulier, qu’est le droit de jouissance exclusif sur une partie commune, est constitué principalement, soit :

  • dès l’origine de la mise en copropriété de l’immeuble selon une clause du règlement de copropriété (art. 8 de la loi du 10 juillet 1965) ;
  • postérieurement, par le biais d’une décision de l’assemblée générale souveraine du syndicat des copropriétaires (article 17 de la loi du 10 juillet 1965). Cet acte de disposition concernant une partie commune doit être adopté en principe à la double majorité de l’article 26 de la loi du 10 juillet 1965.

Un avenant au règlement de copropriété doit aussi être voté et enregistré au service foncier pour être opposable aux ayants droit des copropriétaires, dont les acquéreurs futurs (article 13 de la loi du 10 juillet 1965).

À titre exceptionnel, ce droit de jouissance privatif peut résulter d’un usage exclusif, continu et public du bien immobilier commun, par le propriétaire du lot, pendant au moins trente ans.

Nous sommes alors dans le cadre de la prescription acquisitive, définie par les articles 2258 et suivants du Code civil.

Ce droit de jouissance privatif d’un lot, revendiqué par le jeu de la prescription trentenaire, est différent du droit de jouissance rattaché à la qualité de copropriétaire.

II. Acquisition par prescription du droit de jouissance exclusif sur une partie commune

La Cour de Cassation, dans son arrêt du 18 janvier 2018  n°16-16950, a recherché si les éléments nécessaires pour obtenir une acquisition par prescription étaient réunis.

La réponse est négative, comme on peut le constater à la lecture de l’arrêt :

« Attendu que, pour accueillir cette demande, l’arrêt retient…d’autre part, que la cession incluait nécessairement le droit de jouissance sur les jardins attenants aux lots…sur lesquels ils disposent d’un accès privatif direct ;

Qu’en statuant ainsi, alors que la jouissance des parties communes attachée à la qualité de copropriétaire est distincte du droit de jouissance exclusif attaché à un lot, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

Par ces motifs, Casse et Annule, mais seulement en ce qu’il dit que les époux H. ont acquis par voie d’usucapion un droit réel et perpétuel de jouissance exclusive sur une partie commune dénommée ‘jardins sur l’A.’… »

Il en résulte qu’à défaut de stipulation conventionnelle, et d’une occupation exclusive incontestable, l’acquéreur d’un lot contigu d’un jardin ou d’une cour, ne peut en revendiquer l’usage privatif par la prescription trentenaire obtenue.

Mettre en avant la simple addition de ses propres années d’occupation de cette partie commune, à celles déjà faites par son vendeur et l’entretien apporté, ne suffit pas.

Si un copropriétaire peut revendiquer une jouissance exclusive sur une partie commune, y compris en faisant jouer le délai d’occupation de celle-ci par le précédent copropriétaire, ce privilège implique un droit incontestable et continu, résultant à titre principal d’une clause conventionnelle.

Le droit d’usage privatif d’une partie commune n’est pas assimilable au droit de propriété

Catégories Définition des parties communes et privatives Travaux privatif affectant les parties communes
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
23 janvier 2020 (18-24.676)
Principe retenu

Tous travaux effectués sur une partie commune même si l'on détient un droit de jouissance exclusif sur cette partie, doivent être autorisés par l'assemblée générale. 

Analyse de la décision

La distinction entre parties communes et lots privatifs est le fondement du droit de la copropriété. De cette distinction découle les différentes règles à appliquer pour respecter le droit de la copropriété et celui des copropriétaires.

Cette différence peut être plus difficile à appréhender lorsque le règlement de copropriété accorde à certains copropriétaires un droit de jouissance privatif sur une partie commune. L’arrêt de la troisième chambre civile de la Cour de cassation en date du 23 janvier 2020 (pourvoi 18-24 676) nous éclaire sur ce sujet.

  1. Le droit d'usage privatif d’une partie commune ne modifie par le caractère de la partie commune

Un règlement de copropriété prévoit que les propriétaires d’un lot disposent d’un droit à jouissance privatif d’une partie commune : le jardin. Ils y ont construit un abri de jardin sans demander l’autorisation des copropriétaires en assemblée générale, considérant qu’ils pouvaient jouir de la partie commune selon les mêmes règles relatives au lot privatif.

Il n’est pas rare que les règlements de copropriété prévoient ce genre de dispositif, c’est souvent le cas lorsque des copropriétaires sont les seuls à pouvoir accéder à certaines parties communes tel qu’un jardin.

La question se pose alors de savoir si le droit d’usage privatif sur une partie commune modifie la qualité juridique de cette partie et de ce fait les règles la régissant.

D’autant que la Cour d’appel avait considéré qu’en ayant la jouissance exclusive d’une partie commune, ils peuvent jouir de cette partie commune selon les conditions prévues pour les parties privatives.

Or, la Cour de cassation tranche cette question de manière non équivoque en considérant que « l’attribution d’un droit d’usage privatif sur une partie commune ne modifie pas le caractère de la partie commune ».

Autrement dit, le droit d’usage privatif n’étant qu’un droit qui permet d’user d’un bien sans en être propriétaire, il ne peut pas être assimilé à un droit de propriété. La partie commune même à usage exclusif d’un ou plusieurs copropriétaires n’appartient pas à un ou des copropriétaires déterminés, mais bien à l’ensemble des copropriétaires. De sorte que les règles applicables sont celles relatives aux parties communes figurant dans le règlement de copropriété.

  1. Tous travaux effectués sur une partie commune même si l’on détient un droit d’usage privatif doivent être autorisés par l’assemblée générale

Les copropriétaires ont construit un abri de jardin sur la partie commune dont ils ont la jouissance à titre privatif, sans autorisation préalable de l’assemblée générale. L’assemblée générale a alors refusé de donner l’autorisation aux copropriétaires pour la construction de l’abri de jardin (a posteriori) et a demandé la remise en état des lieux.

Or, lorsque les copropriétaires sont titulaires d’un droit de jouissance à titre privatif d’une partie commune, ils ne peuvent effectuer que des menus opérations de maintenance. Pour le reste, notamment pour la construction d’un bien, ils doivent obligatoirement obtenir au préalable l’accord des copropriétaires qui se caractérise par un vote favorable en assemblée générale.

C’est donc à bon droit que l’assemblée générale a rejeté la demande des copropriétaires. En effet, toute atteinte à une partie commune, constitue un préjudice pour chaque copropriétaire, dans la mesure où il est également copropriétaire indivisaire de la partie commune. De ce fait, il paie une quote-part de charges communes et doit donc voter sur toute modification, construction, transformation d’une partie commune.

Cette constitution portant atteinte aux parties communes, le syndicat des copropriétaires peut donc assigner en Justice les copropriétaires dans la mesure où il s’agit de sauvegarder un droit afférent à l’immeuble.

Dès lors, la construction de l’abri de jardin constitue une atteinte aux parties communes qui confère ainsi qualité au syndicat des copropriétaires fautifs à demander la remise en l’état des lieux dont découle la démolition des lieux.

La Cour de cassation le rappelle d’ailleurs expressément, « Les parties communes d’un immeuble en copropriété, même grevées d’un droit de jouissance exclusif bénéficiant à l’un des copropriétaires, ne peuvent pas faire l’objet de travaux sans autorisation de l’assemblée générale ».

Installation d’un ballon d’eau chaude privatif dans les combles, parties communes peut s’analyser en un droit de jouissance exclusif de celles-ci au profit d’un lot et relever en conséquence de la double majorité de l’article 26

Catégories Ordre du jour Travaux privatif affectant les parties communes
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
26 mars 2020 (19-10210)
Observations

Jurisprudence constante. 

Principe retenu

Lorsqu'un copropriétaire souhaite installer un équipement privatif dans les parties communes cela s'apparente à accorder un droit de jouissance privatif. 

Analyse de la décision

Le syndicat est régulièrement confronté à des sollicitations individuelles de travaux sur les parties communes par un copropriétaire.

Le syndicat se doit dans ce cas, d’identifier précisément le droit envisagé au profit du demandeur. En cas de qualification erronée, la résolution de l’assemblée générale illicite s’expose à une action judiciaire en annulation de la part de tout copropriétaire opposant ou défaillant, comme le rappelle la cour de cassation dans un récent arrêt du 26 mars 2020.

I. Ballon d’eau privatif dans les combles parties communes : autorisation de l’assemblée générale impérative

En l’espèce, une résidence en copropriété située dans le 10ème arrondissement de Paris est composée de plusieurs bâtiments, de 5 étages, ainsi que des combles parties communes au 6ème et dernier étage.

Les détenteurs d’un lot n° 13 se trouvant dans le bâtiment A au 5ème étage souhaitent installer dans les combles un ballon d’eau chaude privatif.

Dans la mesure où l’aménagement escompté affecte les parties communes, ils doivent requérir l’autorisation de l’organe décisionnaire du syndicat des copropriétaires, son assemblée générale (art. 17 de la loi du 10 juillet 1965).

Ils obtiennent l’aval de la collectivité moyennant par une résolution n° 21 d’une assemblée générale du 31 janvier 2013, soumise à la majorité des voix du syndicat des copropriétaires, dans la mesure où ils assimilent l’opération envisagée aux travaux affectant les parties communes (prévus par l’alinéa b de l’article 25 de la loi du 10 juillet 1965).

Un couple de propriétaires défaillants (absents non représentés à l’assemblée générale) contestent la régularité des diverses décisions dont la numéro 21 relative à la pose du ballon d’eau chaude dans les combles parties communes au bénéfice du lot n° 13 et sollicitent en conséquence leur nullité en assignant le 9 avril 2013 le syndicat, représenté par le syndic, auprès du T.G.I. de Paris.

Le jugement n° 13 - 05302 du 3 juillet 2015 de cette juridiction rejette cette requête, confirmé par un arrêt n° 15 - 16794 de la cour d’appel de Paris du 13 décembre 2017.

Ces deux propriétaires décident alors de se pourvoir en cassation.

II. Ballon d’eau chaude privatif dans les combles parties communes : majorité requise de l’assemblée générale

Le couple de propriétaires défaillants soulève devant la cour de cassation le même argumentaire juridique. Ils considèrent notamment que la résolution n° 21 de l’assemblée générale est illégale, en raison d’une qualification erronée de la demande du propriétaire aboutissant à l’application d’une majorité inexacte.

En effet, la requête du propriétaire ne se résume pas selon eux à une simple autorisation de travaux affectant les parties communes relevant effectivement de la majorité de l’article 25 de la loi du 10 juillet 1965, mais à un droit de jouissance exclusif de celles-ci (combles) au profit de son lot correspondant à un acte de disposition soumis dans ce cas à la double majorité de l’article 26 de la même loi.

Dans son arrêt n° 19 - 102010 du 26 mars 2020, les juges n’ont d’autre choix que de faire droit à ce recours par une interprétation littérale de la décision n° 21 de l’assemblée générale, fondée sur une confusion juridique manifeste du syndicat au profit des propriétaires du lot n° 13 du 5ème étage du bâtiment A quant à la fixation de leur ballon d’eau chaude privatif dans les combles parties communes : " …Qu'en statuant ainsi, alors que la décision n° 21 prise lors de l'assemblée générale du 31 janvier 2013 accordait, aux deux copropriétaires qui avaient sollicité cette délibération, la jouissance exclusive des combles situés au-dessus du lot 13, ce dont il résultait que la décision devait être prise à la majorité prévue à l'article 26 de la loi précitée, la cour d'appel, qui a dénaturé le procès-verbal d'assemblée générale, a violé les textes et le principe susvisés ;"

Le président de séance, sur les éventuelles recommandations du syndic, se doit de procéder à une juste qualification juridique des questions inscrites à l’ordre du jour de l’assemblée générale, afin de déterminer avec exactitude la majorité appropriée pour leur adoption.

A défaut, la résolution entérinée encourt une action légitime en nullité introduite par tout copropriétaire opposant ou défaillant, en principe dans le délai de deux mois suivant la notification de son procès-verbal par le syndic.  

Le copropriétaire doit prouver l’existence d’une faute et d’un préjudice afin que sa procédure ne soit pas considérée comme abusive

Catégories Règles procédurales
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
09 mai 2019 (18-14.360)
Observations

Principe fondamental de procédure civile à bien avoir en tête. 

Principe retenu

Toute action en responsabilité, tout contentieux doivent donc être justifiés et les preuves doivent être apportées par la personne qui assigne, sinon il y a un risque pour cette dernière d'être condamné pour procédure abusive. 

Analyse de la décision

Dans les copropriétés, nous relevons régulièrement des comportements de syndics qui sont condamnables et en parallèle des copropriétaires qui assignent de manière régulière leur syndic en responsabilité ou les assemblées générales en nullité.

La Cour de cassation rappelle dans un arrêt du 9 mai 2019 les fondamentaux d’une action judiciaire en indemnisation engagée par un copropriétaire à l’encontre d’un syndic, en raison d’un mandat et d’une gestion défaillants.

I. Obligation lors d’une action en responsabilité : prouver une faute et un préjudice

Préalablement à toute désignation par l’assemblée générale, un syndic qui entend exercer cette fonction à titre professionnel doit :

  • disposer d’une carte professionnelle non-expirée délivrée par la Chambre de Commerce et d’Industrie (organisme compétent depuis 2015) ;
  • établir une attestation pour ses préposés agissant en son nom et l’engageant par ses actes, visée par la Chambre de Commerce et d’Industrie (article 9 du décret du 20 juillet 1972).

Une copropriété désigne un syndic professionnel lors d’une assemblée générale du 2 avril 2009, et ce pour un mandat de trois ans.

L’associé majoritaire de ce cabinet cède ses parts à une société le 17 octobre 2011. La société syndic change de dirigeant, mais poursuit l’administration courante de l’immeuble et notifie la convocation de l’assemblée générale du 12 avril 2012 auprès des copropriétaires.

Ce nouveau dirigeant détient bien une carte professionnelle.

Un copropriétaire et président du conseil syndical considère que le syndic a commis des fautes et entre autre :

  • changement de syndic illégal car pas soumis préalablement à l’assemblée générale et absence de carte professionnelle ;
  • absence d’ouverture d’un compte bancaire séparé ;
  • erreur lors de la rédaction de procès-verbaux d’assemblées générales.

Par conséquent, il assigne le syndic en responsabilité et demande des dommages et intérêts. Comme il ne peut pas prouver un préjudice personnel ou commun pour le syndicat des copropriétaires, il sollicite dans son assignation une expertise judiciaire.

Ce copropriétaire n’en est pas à sa première procédure à l’encontre du syndic et du syndicat des copropriétaires.

II.Sans preuve, une procédure peut être considérée comme abusive

En l’espèce donc, c’est un copropriétaire, président du conseil syndical qui assigne le syndic afin de faire :

  • constater les infractions ;
  • sanctionner les fautes (nullité) et indemniser un préjudice qu’il ne prouve pas.

Le Tribunal de Grande Instance rejette ses demandes car la société syndic prouve :

  • qu’elle avait effectivement une carte professionnelle en bonne et due forme, entre autre lors de la cession de ses titres ;
  • que les comptes contestés ont été approuvés et que le quitus a été donné ;
  • que les deux procès verbaux ont été notifiés et non-contestés dans le délai de deux mois de l’article 42 de la loi du 10 juillet 1965.

La Cour d’appel confirme ce jugement et condamne le copropriétaire à verser au syndic des dommages et intérêts pour procédure abusive.

La Cour de cassation dans son arrêt n° 18 - 14360 du 9 mai 2019 écarte cet ultime recours en l’absence de changement de syndic et de démonstration avérée des fautes par la partie demanderesse à l’instance :

«…Mais attendu, d'une part, qu'ayant relevé que la cession des parts de la société B. I. et le remplacement de sa gérante n'avaient pas entraîné la dissolution de cette société, qui était titulaire d'une carte professionnelle, la cour d'appel en a exactement déduit que la société B. restait investie des fonctions de syndic de la copropriété ;

Attendu, d'autre part, qu'ayant souverainement retenu que M. F... ne rapportait pas la preuve d'un préjudice collectif ou personnel en lien avec une faute du syndic, la cour d'appel, abstraction faite de motifs surabondants, a pu en déduire que les demandes de M. F... n'étaient pas fondées ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ; […] ».

Toute action en responsabilité, tout contentieux doivent donc être justifiés et les preuves doivent être apportées par la personne qui assigne, sinon il y a un risque pour cette dernière : 

« Attendu que M. F... fait grief à l'arrêt d'accueillir la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

Mais attendu qu'ayant retenu que M. F... avait déjà intenté contre le syndic plusieurs actions judiciaires infructueuses et que la procédure, poursuivie en appel sur les mêmes pièces et les mêmes moyens que ceux invoqués en première instance et pertinemment rejetés sans aucune ambiguïté par le premier juge, avait fait dégénérer en abus l'exercice du droit d'agir en justice, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

Par ces motifs, rejette le pourvoi […] ».

Le syndicat peut requérir l’interdiction en son sein d’un bar/discothèque sonore

Catégories Expertise
Date de parution de l'article de loi
Juridiction
Cour d’appel de Chambéry 12 octobre 2023,
Référence
n° 22 - 01843
Observations

Le syndicat peut requérir l’interdiction en son sein d’un bar/discothèque sonore

Analyse de la décision

Le bruit, trouble commun aux copropriétés, comporte des origines variées (résidents, professionnels ou commerçants). En l’absence de solution amiable, le syndicat n’a d’autre choix que de solliciter judiciairement l’interruption de cette nuisance.

Un arrêt du 12 octobre 2023 de la cour d’appel de Chambéry rappelle les conditions nécessaires à cette fin.

I - La cessation de l’activité commerciale sonore est conditionnée à la preuve des désordres

Un immeuble savoyard est confronté au bruit d’un local en rez-de-chaussée loué et exploité en bar/discothèque.

Du fait de divergences sur l’effectivité de ces désordres, le syndicat sollicite une expertise judiciaire destinée principalement à les constater.

Suite aux conclusions de l’expertise (seuil excessif empêchant le sommeil des résidents, carence d’autorisation administrative pour cette activité), le syndicat poursuit en référé le bailleur et son preneur en interdiction de cette exploitation.

Le syndicat, via son syndic, est compétent en la matière. En effet, son objet consiste à veiller au respect par tous (propriétaires et locataires) des articles 9 et 15 de la loi du 10 juillet 1965, à savoir :

  • du droit des autres occupants de jouir tranquillement de leur lot et des parties communes ;
  • de la destination de l’immeuble (standing).

Le tribunal judiciaire de Thonon-les-Bains, dans son ordonnance n° 22 - 00255 du 11 octobre 2022, fait droit à cette demande du syndicat, au regard des preuves incontestables de son préjudice. La cour d’appel de Chambéry confirme cette décision, par un arrêt n° 22 - 01843 du 12 octobre 2023.

 II - La responsabilité du bailleur est réduite pour les infractions ignorées de son preneur

Dans cette procédure le syndicat assigne le preneur contrevenant ainsi que le propriétaire du lot.

En ce qui concerne l’occupant, le syndicat peut agir contre l’auteur des faits, en vue de la cessation de son préjudice et en indemnisation de celui-ci (art. 1240 du Code civil).

S’agissant du possesseur du local, cette démarche se justifie doublement. D’une part, il lui appartient en tant que membre du syndicat de se conformer aux prescriptions légales d’usage paisible de son bien.

D’autre part, il doit s’employer au respect par son locataire des dispositions légales et répondre dans la négative de ses fautes dommageables à l’égard des victimes (art. 1242 du Code civil).

Le propriétaire s’évertue à minorer sa responsabilité pour les nuisances invoquées. Il se fonde sur l’objet du bail « salon de thé » et sa méconnaissance initiale à son infraction par son preneur.

Dans son ordonnance du 11 octobre 2022, le tribunal judiciaire de Thonon ordonne la condamnation in solidum de ces deux parties. Autrement dit, le syndicat se trouve en capacité de requérir indistinctement de l’une d’elles le paiement de l’intégralité de la pénalité judiciairement consentie.

La cour d’appel de Chambéry, dans son arrêt du 12 octobre 2023, réforme partiellement cette décision au regard de la bonne foi du propriétaire au moment de l’assignation. En conséquence, le preneur doit le garantir.

Cela signifie, que le preneur supportera en définitive les indemnités prononcées à l’encontre de son bailleur.

Tout occupant d’un lot doit se conformer à toutes les dispositions juridiques impératives, qu’elles soient légales, réglementaires ou conventionnelles.

A défaut, il encourt, comme son propriétaire (en cas de bail) une action judiciaire du syndicat destinée à proscrire la violation et la réparation de son préjudice.