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Les leçons de la Cour de cassation concernant l’approbation des comptes en présence de frais privatifs et la retranscription du procès-verbal

Catégories Procès-verbal Comptabilité
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
15 avril 2015 (14-13.255)
Observations

Cet arrêt est très intéressant en ce qu'il apporte des précisions concernant les frais privatifs imputables à un seul copropriétaire débiteur dans le compte du syndicat des copropriétaires.

En plus de cela, il apporte des informations quant à la retranscription sur le procès-verbal des questions mentionnées dans l'ordre du jour.

Principe retenu

Les frais privatifs imputables à certains copropriétaires doivent apparaitre dans le compte du syndicat des copropriétaires pour que l'approbation des comptes soit valable; 

La transcription de la question sur le procès-verbal de l'assemblée générale n'a pas besoin d'être identique à celle figurant à l'ordre du jour.

Analyse de la décision

Les délibérations des assemblées générales peuvent être contestées conformément à l’article 42 de la loi du 10 juillet 1965 sous certaines conditions. En effet, seuls les copropriétaires défaillants ou opposants peuvent contester une délibération de l’assemblée générale.

Les contestataires ont un délai de deux mois suivant la notification du procès-verbal pour saisir la justice en annulation des délibérations.

Néanmoins, pour pouvoir contester une délibération, il est nécessaire de prouver que la délibération est entachée d’une irrégularité.

Dès lors, pour tout copropriétaire qui souhaite contester une délibération, il est fondamental de savoir si elle est irrégulière ou non. La loi apporte beaucoup d’éléments permettant de déduire si la délibération est régulière ou non.

Par exemple, si la majorité n’est pas la bonne pour l’adoption de la décision, il est possible de contester la décision. Pour d’autres cas, la loi est muette et c’est la jurisprudence qui nous apporte d’importantes indications.

Par cet arrêt rendu par la Cour de cassation en date du 15 avril 2015 (n°14-13255), des informations précieuses nous sont apportées quant à l’irrégularité d’une délibération concernant l’approbation des comptes en raison de l’absence des frais privatifs relatifs à un seul copropriétaire dans le compte du syndicat des copropriétaires.

Par ailleurs, cette décision précise également les modalités de transcription sur le procès-verbal de la question figurant à l’ordre du jour de l’assemblée générale.

I. Les frais privatifs, imputables aux seuls copropriétaires concernés doivent apparaitre sur le compte du syndicat des copropriétaires.

Suite à l’assemblée générale, des époux copropriétaires contestent judiciairement plusieurs résolutions La première d’entre elles, concerne l’approbation des comptes.

En effet, les copropriétaires considèrent que l’approbation des comptes est irrégulière puisque les frais privatifs imputables à un seul copropriétaire, n’apparaissent pas sur le compte du syndicat des copropriétaires.  

Cette question est très intéressante, car la répartition des charges communes se fait en principe en fonction des tantièmes de chaque copropriétaire. Cependant, la loi du 10 juillet 1965 et le contrat-type du syndic permettent de mettre à la charge d’un seul copropriétaire concerné des frais afférents à certaines demandes comme l’établissement d’un état daté ou la convocation d’une assemblée générale extraordinaire à la demande d’un seul copropriétaire.

En cas de frais privatifs, il est bien précisé que les frais sont imputables au(x) seul(s) copropriétaire(s) concerné(s), de sorte que généralement plusieurs copropriétaires ou membres du conseil syndical s’étonnent de retrouver dans le compte banque du syndicat des copropriétaires cette somme et pensent que le syndic a commis une erreur.

D’ailleurs, la Cour d’appel considère dans cette affaire que ‘les frais de l’assemblée générale du 19 janvier 2009, convoquée à la demande de l’un des copropriétaires constituent une charge personnelle de ce copropriétaire, lui ont été facturés comme tels et n’ont pas à figurer dans l’état des dépenses de la copropriété pour l’exercice 2008-2009. »

Cependant, la Cour de cassation raisonne différemment et énonce : « est entachée de nullité la résolution d’une assemblée générale approuvant des comptes irréguliers (….) les comptes auraient dû faire apparaitre les frais relatifs à la tenue de l’assemblée générale, quand bien même ces frais auraient été supportés par le copropriétaire, à l’initiative de la tenue de cette assemblée. »

Autrement dit, les frais privatifs imputables au(x) seul(s) copropriétaire(s) concerné(s) tel que les frais de mise en demeure en cas de copropriétaire débiteur, les frais d’opposition sur mutation en cas de vente de lot privatifs, doivent impérativement apparaitre dans le compte du syndicat des copropriétaires.

Le cas échéant, les comptes sont irréguliers ! La sentence est forte.

Cela signifie comptablement, que le syndic doit inscrire cette somme au débit du compte du syndicat des copropriétaires, parallèlement l’affecter sur le sous-compte du copropriétaire concerné. Dès que le copropriétaire concerné paie les frais, le syndic doit rembourser le compte du syndicat des copropriétaires.

Ainsi, dans les faits seul le copropriétaire concerné paie les frais, mais il faut impérativement que cette somme apparaisse dans le compte du syndicat des copropriétaires.

II. La transcription de la question sur le procès-verbal d’assemblée générale, n’a pas besoin d’être identique à celle figurant à l’ordre du jour

Les copropriétaires ont également contesté une autre délibération concernant des travaux, au motif que la question inscrite au procès-verbal, n’est pas identique mot pour mot à celle figurant à l’ordre du jour.

La question est donc de savoir si la délibération encourt une nullité si elle n’est pas reproduite telle qu’elle figure à l’ordre du jour.

Cette question est primordiale dans la mesure où elle peut ouvrir la voie à de multiples contentieux et une contestation sans borne des délibérations.

L’article 17 du décret du 17 mars 1967 qui fixe les modalités du procès-verbal prévoit qu’il est établi un procès-verbal de chaque assemblée qui est signé, à la fin de la séance par le Président, secrétaire et les éventuels scrutateurs. Le procès-verbal doit contenir les éventuels mandats de vote distribués, l’intitulé de chaque question inscrite à l’ordre du jour, le résultat des votes. Ils précisent le nom et nombre de voix des opposants et abstentionnistes. Ainsi que les éventuelles réserves et les incidents techniques ayant empêché la visioconférence.

En revanche, le texte ne précise pas si l’intitulé des questions inscrites à l’ordre du jour doit être recopié en termes identiques, à défaut, si cela constitue une irrégularité.

C’est donc la Cour de cassation qui est tenue de répondre à cette question. Elle indique alors « qu’aucune disposition n’imposait la stricte identité de rédaction du projet de résolution et du texte définitivement adopté, sauf à nier la liberté de discussion et de vote des copropriétaires lors de l’assemblée générale ».

Autrement dit, il est donc impossible de contester la régularité d’une délibération au motif que la question mentionnée dans le procès-verbal de l’assemblée générale  n’était pas recopiée mot pour mot comme l’ordre du jour.

Néanmoins, il existe une limite importante, en effet, la reformulation de la question ne doit en aucun cas dénaturer l’objet de la résolution.

En conséquence, il est possible de modifier la rédaction de la question à l’ordre du jour sur le procès-verbal tant qu’elle a le même sens que celle mentionnée dans la convocation.

Dès lors, si le sens changerait, il y aurait une irrégularité.

Par ailleurs, la Cour de cassation invoque un élément fondamental de l’assemblée générale : la liberté de discussion. Ainsi, il est reconnu que chaque délibération peut faire l’objet d’un débat entre les copropriétaires. Ce débat et le sens du débat n’ont pas à être mentionnés sur le procès-verbal de l’assemblée générale.

Ainsi, la Cour de cassation apporte de précieuses informations quant à la régularité des résolutions.

Le mandat ne vaut que pour les questions inscrites à l’ordre du jour de l’assemblée générale

Catégories Tenue de l'assemblée générale
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
08 septembre 2016 (15-23.422)
Observations

Arrêt important. 

Principe retenu

Lorsqu'un copropriétaire donne un pouvoir à un tiers de le représenter pour l'assemblée générale, ce pouvoir ne vaut que pour les décisions préalablement inscrites à l'ordre du jour. 

Analyse de la décision

La Cour de Cassation, en date du 8 septembre 2016 (n° 15 - 23422), a rendu un arrêt important.

Celui-ci porte sur la tenue de l’assemblée générale et présente un double intérêt, tout en rappelant une jurisprudence constante en la matière : 

  • régularité des délibérations au regard de l’ordre du jour figurant dans la convocation ;
  • capacité de vote pour le mandataire et pouvoir du mandant de contester une résolution adoptée, mais irrégulière.

Les faits

Les copropriétaires d’un local commercial d’un immeuble parisien reçoivent la convocation de l’assemblée générale du syndicat avec un ordre du jour, bien sûr, déterminé.

Ne pouvant y assister, ils souhaitent malgré tout participer et donnent mandat pour y être représenté.

Cependant, à réception du procès-verbal, ils constatent que l’ordre du jour a été complété après sa notification et qu’au surplus, leur mandataire a voté favorablement pour la résolution ajoutée illégalement au cours de l’assemblée.

Ils décident alors d’engager une action judiciaire en nullité de la résolution litigieuse, au motif que :

  • l’ordre du jour ne peut être complété, dès lors que le délai de 21 jours (article 9 du décret du 17 mars 1967) est entamé ;
  • le mandat qu’ils avaient remis à leur mandataire ne valait que pour l’ordre du jour notifié régulièrement aux copropriétaires et qu’en conséquence, ils n’étaient pas liés par le vote de leur mandataire à l’égard du syndicat sur la question ajoutée au cours de l’assemblée générale.

Compte tenu de ces irrégularités manifestes, ils se retrouvaient, en regard de cette résolution, qualifiés de « copropriétaires défaillants », c’est-à-dire absents (et non représentés), et ils retrouvaient ainsi la capacité de contester judiciairement cette résolution !

La décision de la Cour de Cassation

La 3ème chambre civile de la Cour de Cassation a fait droit à la demande de ces copropriétaires :

"Attendu que la convocation contient l’ordre du jour, qui précise chacune des questions soumises à la délibération de l’assemblée générale ; qu’un mandat ne peut porter que sur les questions figurant à l’ordre du jour….

Attendu que pour déclarer la demande irrecevable, l’arrêt retient que la résolution contestée par les consorts L., qui ont été régulièrement représentés, a été votée à l’unanimité des copropriétaires et, que l’action prévue par l’article 42 (de la loi du 10 juillet 1965) n’est pas ouverte aux copropriétaires ayant voté, par le truchement de leur mandataire, en faveur de la résolution contestée ;

Qu’en statuant ainsi, alors qu’elle avait constaté que le mandataire avait voté sur une question ne figurant pas à l’ordre du jour, la Cour d’Appel a violé les textes susvisés ;"

Conclusion et conseils

Cet arrêt vient utilement rappeler les obligations respectives :

  • au mandataire à l’égard de son mandant : il ne peut aller au-delà de ce que le titulaire dispose comme droit ;
  • du syndicat vis-à-vis des copropriétaires : plus précisément dans ce dernier cas il s’agit du rôle majeur du président de séance, sans bien sûr oublier l’obligation de conseil de la part du syndic professionnel !

En effet, c’est au président que revient la charge d’une tenue régulière de l’assemblée générale du syndicat (article 15 du décret du 17 mars 1967).

Il ne doit donc, ni de son chef, ni sur demande d’un copropriétaire, ajouter une résolution à l’ordre du jour, et prendre encore plus de précautions dès lors que ce ne sont pas les copropriétaires en personne qui sont présents à cette assemblée.

Le pouvoir donné par un copropriétaire absent à l’assemblée générale doit être signé

Catégories Tenue de l'assemblée générale
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
13 septembre 2018 (17-23.292)
Observations

Par cet arrêt, la Cour de cassation pose un principe important relatif à la délégation de pouvoirs. 

Principe retenu

Une délégation de pouvoir doit être signée, sinon l'assemblée générale encourt la nullité. 

Analyse de la décision

Le déroulement et la tenue de l’assemblée générale doivent respecter des règles précisées dans le décret du 17 mars 1967.

En fonction de la taille de la copropriété, des horaires de convocation et de la durée de l’assemblée, le bureau auquel participe généralement le syndic en tant que secrétaire peut se heurter à des approximations notamment au regard de la comptabilisation des mandats des copropriétaires absents et représentés.

Ces errances ne sont pas anodines pour l’assemblée générale, comme le souligne la Cour de cassation dans son arrêt du 13 septembre 2018 (17-23292)

I. Feuille de présence : objet et modalités d’établissement

L’article 14 du décret du 17 mars 1967 dispose qu’une feuille de présence à l’assemblée générale doit être établie avant le commencement de la réunion et certifiée exacte et signée en fin de séance par le président.

Ce document atteste des copropriétaires présents ou représentés à cette réunion du syndicat, c’est donc un moyen de preuve.

Il constitue à ce titre une annexe de l’original du procès-verbal de l’assemblée générale rédigé par le secrétaire en fin de séance, paraphé et signé par le bureau.

Ce formulaire doit contenir le nom, le nombre de voix, l’adresse du propriétaire du lot, ou en cas de représentation celle de son mandataire et doit être signé par la personne présente à cette réunion du syndicat.

Le syndic, chargé en principe de la conservation des archives du syndicat des copropriétaires, doit conserver l’original du procès-verbal avec ses annexes, autrement dit la feuille de présence et les pouvoirs des copropriétaires absents et représentés.

II. L’importance des pouvoirs qui accompagnent la feuille de présence

Dans la pratique, des erreurs et omissions peuvent exister, en raison des mouvements des copropriétaires (arrivée tardive, départ prématuré), mais également des carences du bureau, président mal informé par le syndic en exercice qui assure généralement le secrétariat et détient les moyens informatiques permettant les décomptes des votes.

A l’issue de l’assemblée générale, et à tout moment, tout copropriétaire peut requérir du syndic, la copie de l’original du procès-verbal de l’assemblée générale et de ses annexes (article 33 du décret du 17 mars 1967).

En l’espèce, une copropriété a tenu son assemblée générale annuelle le 14 mai 2013.

Un couple de copropriétaires opposants exige ensuite du syndic les annexes du procès-verbal de l’assemblée générale.

Ils décident d’engager une action judiciaire en annulation de cette assemblée dans son ensemble en s’appuyant sur un grand nombre d’éléments qu’ils considèrent comme irréguliers.

Entre autre, ils évoquent des irrégularités concernant la feuille de présence et le décompte des voix des copropriétaires présents.

Plusieurs causes sont invoquées :

  • un copropriétaire qui n’a pas signé la feuille de présence n’est pas mentionné comme absent dans le procès verbal,
  • mention sur la liste des absents d’une personne qui ne fait pas partie de la copropriété,
  • arrivée en cours d’assemblée d’un copropriétaire mentionné comme présent dès le commencement, 
  • pouvoir enregistré alors qu’il n’était pas signé par le mandant.

Le Tribunal de Grande Instance de Créteil et la Cour d’appel de Paris dans sa décision n°15 - 10689 du 14 juin 2017, rejettent cette action en considérant que ces approximations étaient accessoires et se révélaient sans impact sur les résolutions de l’assemblée générale (majorités acquises et procès-verbal permettant de pallier les carences de la feuille de présence).

Ces deux copropriétaires se pourvoient en cassation.

La Cour de cassation dans son arrêt n°17 - 23292 du 13 septembre 2018 infirme partiellement la décision de la Cour d’appel en s’appuyant sur une irrégularité qui entachait la feuille de présence :

«…Attendu que, pour rejeter la demande en annulation de l'assemblée générale, l'arrêt retient que la feuille de présence est affectée d'erreurs matérielles sans conséquence sur la validité de l'assemblée générale ;

Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions des consorts Z... qui soutenaient que l'assemblée générale était nulle en raison du défaut de signature de M. et Mme Y... sur le pouvoir donné par eux, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE… ».

Cette décision est très claire.

Une délégation de pouvoir à l’assemblée générale doit être signée, cette signature atteste de la réalité du mandat.

Un mandat en blanc signé est régulier ; un mandat comportant le nom du mandataire même écrit de manière manuscrite mais non signé ne l’est pas.

Le président de séance doit être implacable lors du contrôle des mandats des copropriétaires absents et représentés et de leur prise en compte, afin de ne pas exposer le syndicat à une action judiciaire en nullité.

La loi ELAN a précisé l’article 22 de la loi du 10 juillet 1965 concernant la répartition des pouvoirs donnés par des copropriétaires absents.

Depuis le 25 novembre 2018, lorsque le syndic a reçu des mandats sans indication de mandataire, « il ne peut ni les conserver pour voter en son nom, ni les distribuer lui-même aux mandataires qu'il choisit ».

Le président de l’assemblée générale doit donc aussi maintenant s’assurer de la manière dont le syndic aurait distribué les pouvoirs en blanc reçus par ses soins.

 

Les comptes des copropriétés : la Cour de Cassation donne raison à un copropriétaire qui entendait faire respecter les règles

Catégories Comptabilité
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
05 février 2014 (12-19.047)
Observations

Les règles comptables sont régies par la loi du 10 juillet 1965, le décret du 17 mars 1967 ainsi que l'arrêté et le décret comptable du 14 mars 2005. 

Principe retenu

Les charges et les produits du syndicat, prévus au plan comptable, sont enregistrés dès leur engagement juridique par le syndic indépendamment de leur règlement. 

Analyse de la décision

I. Quand les syndics ne respectent pas les obligations comptables

Nous ne comptons plus, à l’ARC, les documents comptables soumis aux assemblées générales et qui ne respectent pas la réglementation comptable applicable aux copropriétés, beaucoup de syndics ne s’embarrassant pas avec les (nombreuses) obligations en la matière.

Et c’est ainsi que les deux principes fondamentaux que sont la comptabilité d’engagement et la séparation des exercices sont souvent bafoués, fréquemment par facilité mais aussi parfois par ruse pour arranger le résultat d’un exercice difficile à justifier.

Les copropriétaires qui votent contre l’approbation de tels comptes sont la plupart du temps minoritaires et sont tout simplement méprisés par les syndics qui voient leurs comptes approuvés à la majorité des copropriétaires présents et représentés. Mais un copropriétaire opiniâtre vient de montrer que l’on ne peut pas toujours faire n’importe quoi sans jamais avoir à en rendre compte…

II. La Cour de Cassation… casse

Le syndic en question avait omis de comptabiliser, dans les produits d’un exercice, une indemnité judiciaire obtenue dans un jugement rendu au cours de l’exercice, au motif qu’elle ne serait payée que sur l’exercice suivant.

La Cour d’appel avait cru bon de valider les comptes tels quels.

La Cour de cassation a sèchement remis les choses à leur juste place (Cass. 3ème Civ. 5 février 2014, n°12-19047) : « les charges et produits du syndicat, prévus au plan comptable, sont enregistrés dès leur engagement juridique par le syndic, indépendamment de leur règlement ». Elle a donc cassé l’arrêt d’appel et donné raison au copropriétaire qui demandait l’annulation de la résolution d’approbation de ces comptes.

Qu’on se le dise : un copropriétaire isolé peut faire valoir le droit et faire annuler une approbation de comptes non conformes aux obligations comptables.

Autrement dit, un exercice doit comporter TOUTES les charges et TOUS les produits de cet exercice, qu’ils soient ou non payés / encaissés, et seulement ces charges et ces produits.

III. Les textes, chers professionnels, les textes

La Cour de cassation renvoie donc les syndics aux textes légaux et réglementaires qu’elle a cités pour justifier sa décision :

Extraits de l’article 14-3 de la loi du 10 juillet 1965 (non modifié par la loi ALUR) :

Les comptes du syndicat comprenant le budget prévisionnel, les charges et produits de l'exercice, la situation de trésorerie, ainsi que les annexes au budget prévisionnel sont établis conformément à des règles comptables spécifiques fixées par décret. Les comptes sont présentés avec comparatif des comptes de l'exercice précédent approuvé.

Les charges et les produits du syndicat, prévus au plan comptable, sont enregistrés dès leur engagement juridique par le syndic indépendamment de leur règlement. L'engagement est soldé par le règlement. […]

Article 2, alinéa 2 du décret du 14 mars 2005 :

En application de l'article 14-3 de la même loi, sont rattachés à l'exercice les produits acquis (produits reçus et à recevoir) et les charges supportées (charges réglées et à régler) au titre de l'exercice.

Compte bancaire séparé : un arrêt de justice sans conséquence

Catégories Comptabilité
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
12 mai 2016 (15-12.575)
Observations

Précision quant aux règles comptables et à l'ouverture d'un compte bancaire. 

Principe retenu

Aucune violation de l'article 18 de la loi du 10 juillet 1965 ne peut être caractérisée lorsque les sommes reçues au nom du syndicat des copropriétaires transitent par le compte du syndic avant d'être transférés sur le compte séparé ouvert au nom du syndicat des copropriétaires. 

Analyse de la décision

Un récent arrêt de la Cour de Cassation du 12 mai 2016 (15-12.575) a jugé que le contrat de syndic ne pouvait être annulé au motif que ce dernier a fait transiter sur son compte bancaire des sommes appartenant au syndicat alors que ce dernier disposait d’un compte bancaire séparé.

Certains observateurs et syndics se sont « frotté les mains » en supposant que même en présence d’un compte bancaire séparé, le syndic pouvait tout de même déposer pendant un « certain temps » (ou plutôt dirons-nous un temps certain) les fonds sur son compte bancaire global avant de les reverser sur le compte séparé de la copropriété.

Nous allons cependant expliquer pourquoi, depuis la loi ALUR du 24 mars 2014 cette décision ne peut pas être considérée comme un arrêt de principe.

Les obligations et les sanctions en matière de compte bancaire séparé en vertu de l’ancienne version de la loi du 10 juillet 1965

L’affaire concernée par cet arrêt judiciaire remonte à novembre 2010, soit quatre ans avant l’entrée en vigueur de la loi ALUR.

L’article 18 de la loi du 10 juillet 1965, avant d’être modifié par la loi ALUR, prévoyait dans son septième alinéa  l’obligation suivante : « le syndic est chargé (…) d’ouvrir un compte bancaire séparé au nom du syndicat des copropriétaires sur lequel sont versées sans délai toutes les sommes ou valeurs reçues au nom et pour le compte du syndicat. (... )La méconnaissance par le syndic de cette obligation emporte la nullité de plein droit de son mandat à l’expiration du délai de trois mois. »

Cet article prévoit que la sanction peut être prononcée uniquement en cas de non-respect de cette obligation : il s’agit donc de la première obligation citée qui concerne l’ouverture du compte bancaire séparé.

C’est donc sur ce fondement légal que la haute juridiction a jugé que la faute commise par le syndic de faire transiter les fonds du syndicat des copropriétaires sur son compte bancaire n’entraînait pas pour autant la possibilité de prononcer judiciairement la nullité du contrat de mandat.

L’ article 18 après l’entrée en vigueur de la loi ALUR

La loi ALUR a, en 2014, modifié de façon importante la loi du 10 juillet 1965 et plus particulièrement l’article 18.

En l’occurrence, elle a repris les obligations en matière de compte bancaire séparé en rajoutant cette fois-ci que « la méconnaissance par le syndic de ces obligations emporte la nullité de plein droit de son mandat à l’expiration du délai de trois mois suivants sa désignation. »

Le législateur a donc voulu étendre la sanction de la nullité du contrat, non pas à la seule obligation relative à l’ouverture du compte bancaire séparé, mais à toutes celles citées avant l’énonciation de la sanction :

  1. l’ouverture dans un établissement bancaire d’un compte bancaire séparé au nom du syndicat ;
  2. le versement sans délai de toutes les sommes ou valeurs reçues au nom ou pour le compte du syndicat ;
  3. le fait que le compte bancaire ne peut faire l’objet ni d’une convention de fusion ni d’une compensation avec tout autre compte ;
  4. le fait que les éventuels intérêts produits par le compte sont définitivement acquis au syndicat de copropriétaires.

L’arrêt de la Cour de Cassation semble donc aujourd’hui sans conséquence puisqu’il se réfère à des dispositions légales (et en l’occurrence à celles de l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965) issues d’une version antérieure qui n’est plus d’actualité.

Si la même affaire devait être jugée aujourd’hui, au regard des dispositions du nouvel article 18, il est donc fort probable que le défaut de l’une de ces obligations serait susceptible d’entraîner la nullité judiciaire du contrat de syndic.

Les conséquences pratiques

Certains syndics vont profiter de cet arrêt pour placer les fonds de ses copropriétés mandantes sur leur compte bancaire global.

La logique est simple : afin d’être en conformité avec les exigences légales, le syndic  ouvre un compte bancaire séparé propre à la copropriété mais continue à bénéficier de la trésorerie de l’immeuble en faisant transiter les fonds sur son propre compte bancaire.

Il faudra donc que le conseil syndical soit vigilant afin de contrôler ce genre de pratique.

Pour cela, il suffira de vérifier sur le relevé bancaire de la copropriété que la date d’enregistrement de l’opération correspond bien à la date de règlement.

Concrètement, si un copropriétaire réalise son règlement d’appels de fonds le 26 mai par virement ou prélèvement par exemple, l’incidence de ce paiement sur le relevé bancaire devra être datée du 27 ou 28 mai.

A défaut, cela signifie que cette somme a transité sur un autre compte qui est sûrement celui du syndic…

 

Un compte bancaire séparé peut perdurer d’un syndic à un autre

Catégories Comptabilité
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
21 décembre 2017 (16-24.587)
Observations

Précision précieuse en matière de compte bancaire séparé en cas de changement de syndic. 

Principe retenu

En cas de changement de syndic, le compte bancaire ouvert par l'ancien syndic peut être repris par le nouveau syndic. 

Analyse de la décision

Bien que la loi du 10 juillet 1965 modifiée par la loi ALUR ait supprimé la possibilité de dérogation de compte bancaire séparé, nous sommes souvent interrogés par nos adhérents pour vérifier la réalité du statut du compte bancaire présenté par le syndic.

En effet, il y a toujours un ou plusieurs éléments qui posent problème : le libellé du compte qui présente le nom du syndic, la présentation d’un numéro d’identifiant créancier SEPA dont le créditeur n’est pas la copropriété mais le syndic, des conditions générales ou particulières ambiguës ne permettant pas d’avoir l’assurance qu’il s’agit d’un vrai compte bancaire séparé où le syndic n’a aucun intérêt sur les fonds mandants.

Autrement dit, si juridiquement la situation a évolué, sur le terrain elle est devenue plus technique sachant que les syndics et leurs banques se sont organisés pour que le compte ait « l’apparence et l’odeur » d’un compte séparé mais n’en ai pas le goût. Le fameux « canada dry ».

Ceci étant, nous avons préconisé une méthode simple à mettre en place, qui fait obstacles aux stratagèmes des syndics et de leurs banques pour présenter de faux comptes bancaires séparés.

I. Une attestation de la banque qui doit confirmer la possibilité de transmission du compte bancaire au syndic repreneur

Afin de garantir que le compte bancaire est bien séparé, il est indispensable d’avoir une attestation de la banque qui confirme que le compte est bien évidemment séparé et surtout qu’il est transférable en cas de changement de syndic. Autrement dit, que le syndic repreneur puisse continuer à gérer le compte et ce peu importe les cabinets successifs qui disposeront du mandat.

Cette confirmation impliquera que le compte n’est pas rattaché au syndic en place mais bien la propriété du syndicat de copropriétaires.

Pour éviter d’écrire ce type de mention dans l’attestation, les syndics avancent un argument qui, à présent, tombe assurément à l’eau.

II. Une obligation de transmission des fonds

L’article 18-2 de la loi du 10 juillet 1965 prévoit qu’en cas de changement de syndic, ce dernier est tenu de remettre les archives et « la totalité des fonds immédiatement disponibles » de la copropriété.

Par ce biais, il invoque qu’il est tenu de fermer le compte bancaire afin d’être en mesure de remettre au syndic repreneur un chèque du montant du solde du compte.

Par conséquent, il évoque que la banque ne peut pas indiquer dans l’attestation une affirmation qui, légalement parlant, pose problème.

III. Une réponse très claire de la Cour de Cassation

En date du 21 décembre 2017, la Cour de Cassation a rendu un arrêt qui a dû justement traiter une demande de nullité du contrat de syndic au motif que le syndic repreneur n’avait pas ouvert un compte bancaire séparé, en continuant à gérer celui ouvert par son prédécesseur.

La Cour de Cassation n’est pas tombée dans le panneau, elle a considéré que la loi oblige à ce que le syndicat de copropriétaires dispose d’un compte bancaire séparé, ce qui était bien le cas puisque le syndic a pu présenter une attestation de la banque confirmant la situation.

Ainsi, un syndic repreneur est tout à fait habilité à continuer à faire perdurer un compte même si, rappelons-le, le syndicat de copropriétaires est en droit de lui demander de changer d’établissement bancaire.

Conclusion : la banque a le droit d’indiquer dans son attestation que le compte pourra être transmissible au nouveau syndic.

Pour preuve, voici un extrait de l’attestation de la banque Monte Paschi qui présente justement ce type de mention :

COMPTE BANCAIRE

 

L’approbation des comptes ne vaut pas approbation des comptes individuels des copropriétaires

Catégories Comptabilité
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
1er février 2018 (16-26.992)
Observations

Confirmation de la jurisprudence antérieure. 

Principe retenu

L'approbation des comptes ne vaut pas approbation de la répartition individuelle des charges. 

Analyse de la décision

Nous sommes souvent interrogés par des copropriétaires qui sont aussi parfois membres du conseil syndical pour connaître les conséquences de l’approbation des comptes et leurs possibilités de recours en cas de contestation portant sur leur propre situation comptable.

Nous allons reprendre ce que prévoit la loi du 10 juillet 1965 ainsi que le décret du 14 mars 2005 pour ensuite mettre en exergue la récente décision de la Cour de Cassation du 1er février 2018 (16-26992).

I. Un délai pour contester les décisions de l’assemblée générale et un autre pour les copropriétaires

L’article 42 de la loi du 10 juillet 1965 prévoit deux délais de recours.

  • Le premier concerne les décisions prises en assemblée générale, assorties d’un délai de contestation très court ouvert aux copropriétaires opposants ou défaillants un délai de deux mois à compter de la notification du procès-verbal.
  • Le second concerne les copropriétaires, qui disposent d’un délai plus long de dix ans pour contester les charges qui leur sont imputées ou encore leur répartition.

Par ailleurs, conformément à l’article 8 du décret du 14 mars 2005, les copropriétaires sont amenés à se prononcer au cours de l’assemblée générale sur l’approbation des dépenses de l’exercice en vue de régulariser les excédents, les insuffisances de charges ou de produits.

Ainsi, il s’agit donc d’une décision qui concerne le syndicat de copropriétaires et non directement les copropriétaires.

Par conséquent, même si un copropriétaire approuve les comptes, il reste dans son droit de contester non pas le montant global des charges mais leur répartition, qui a un impact direct sur sa situation comptable.

II. Une décision confirmée par la Cour de cassation

 La Cour de Cassation a censuré sèchement la décision de la Cour d’Appel de Bastia en considérant :

« •  l’article 45-1 du décret du 17 mars 1967 précise bien que "l'approbation des comptes du syndicat par l'assemblée générale ne constitue pas une approbation du compte individuel de chacun des copropriétaires", ce qui est logique : l’approbation des comptes est un acte entre le syndicat des copropriétaires et le syndic qui présente ses comptes, alors que la répartition des charges relève de l’application du règlement des copropriétaires, contrat entre les copropriétaires et entre les copropriétaires et le syndicat ; dès lors, chaque copropriétaire en tant que partie au contrat est libre de contester l’application qui en est faite par l’autre partie sans qu’on puisse lui opposer un acte ayant eu lieu entre d’autres parties !

•  dès lors que l’action du copropriétaire ne concerne pas une décision de l’assemblée mais une contestation de son compte comme l’article 45-1 lui en donne le droit, la prescription applicable n’est pas celle du 2ème alinéa de l’article 42 mais de son 1er alinéa, à savoir celle s’appliquant aux actions personnelles entre des copropriétaires, ou entre un copropriétaire et le syndicat, qui se prescrivent par un délai de dix ans ! »

Par conséquent, cet arrêt est clair l’approbation des comptes ne vaut pas approbation de la répartition des charges.

 

La Cour de Cassation avec l’ARC : un gardien ou un employé d’immeuble sont bien des « préposés » du syndic et donc ne peut peuvent détenir des pouvoirs en assemblée générale

Catégories Tenue de l'assemblée générale Contrat du personnel du syndicat des copropriétaires
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
07 mai 2014 (13-11.743)
Observations

Cet arrêt est important et était attendu ! Désormais plus aucun doute n'est permis quant à la possibilité pour un gardien de recevoir une délégation de pouvoir. 

Principe retenu

Le gardien ou l'employé d'immeuble sont des "préposés" du syndic et ne peuvent recevoir de mandat de pouvoir. 

Analyse de la décision

Nous l’avions déjà expliqué après la promulgation de la loi ALUR du 24 mars 2014 et la Cour de Cassation vient de le confirmer (7 mai 2014 3ème chambre civile, numéro 13-11.743) : « Les gardiens et employés d’immeuble sont des préposés du syndic et à ce titre ne peuvent pas détenir de pouvoir en assemblée générale ».

 I. Rappel de la loi

Comme chacun sait, les copropriétaires ont la possibilité de donner mandat à toute personne de leur choix afin de se faire représenter lors de l’assemblée générale. Ce mandat ne peut cependant être consenti au profit du syndic, de son conjoint, de son partenaire lié à lui par un Pacs, et de ses préposés (loi du 10 juillet 1965 : article 22, alinéa 4).

      II. La question

Toute la question est de savoir si le gardien et les employés d’immeuble d’un syndicat de copropriétaires sont des « préposés » du syndic ou non.

Il y a longtemps que’ l’ARC a répondu par l’affirmative, ceci sans être toujours suivie (surtout par les syndics, souvent intéressés à faire voter des gardiens…).

Récemment nous avions expliqué pourquoi la loi ALUR nous avait donné raison explicitement. C’est maintenant au tour de la Cour de Cassation de confirmer notre position, dans un arrêt de la 3ème chambre civile de la Cour de Cassation (7 mai 2014 numéro 13-11.743).

III. Les explications de la Cour et ses raisons

Elles sont toutes simples.

Les juges ont en effet considéré que l’interdiction de recevoir un mandat pour représenter un copropriétaire s’applique à toute personne qui "travaille et accomplit des actes pour le compte du syndic, exécute ses ordres et ses directives et, donc, se comporte à l’égard des tiers et des copropriétaires comme son préposé.Les juges ont estimé qu’une personne peut donc être qualifiée de préposé du syndic même en l’absence de contrat de travail le liant à lui.

Insistons :

  • un préposé est une personne à qui le syndic donne des ordres et des directives : c’est le cas des gardiens et employés d’immeuble ;
  • préposé peut n’être pas lié par un contrat consenti par celui dont il est le préposé : c’est bien le cas entre gardien ou employé d’immeuble et syndic.

Merci qui ? Merci à la Cour de Cassation.

 

L’approbation des comptes ne peut pas être annulée en raison de travaux réalisés dans des conditions autres que celles votées en assemblée générale

Catégories Contestation de la décision / de l'assemblée générale Comptabilité
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
14 mars 2019 (17-26.190)
Observations

Jurisprudence constante en matière d'approbation des comptes. 

Principe retenu

 L’approbation des comptes emporte seulement constatation de la régularité comptable et financière des comptes du syndicat 

Analyse de la décision

Peut-on demander judiciairement la nullité de l’approbation des comptes au motif qu’ils incluent des travaux qui ont été réalisés dans des conditions autres que celles votées en assemblée générale ?

C’est sur cette question que la Cour de cassation a eu à se prononcer dans un arrêt du 14 mars 2019 (Cass. 3e civ., 14 mars 2019, n° 17-26190).

I. L’objet de l’approbation des comptes est uniquement de constater la régularité comptable et financière des comptes

En l’espèce, un copropriétaire a assigné son syndicat de copropriétaires en annulation d’une résolution ayant approuvé les comptes de l’exercice écoulé, qui comportaient une dépense de travaux.

Or, l’entreprise qui a finalement réalisé les travaux n’est pas celle dont le devis avait été retenu par l’assemblée générale des copropriétaires qui avait voté les travaux.

La Cour de cassation rejette la demande du copropriétaire au motif que :

« L’approbation des comptes emporte seulement constatation de la régularité comptable et financière des comptes du syndicat ».

Le fait que les travaux n’aient pas été réalisés dans les conditions votées en assemblée générale ne constitue donc pas une irrégularité entraînant la nullité de la délibération incriminée.

L’arrêt n’offre donc pas de possibilité de remettre en cause l’exécution de travaux en passant par une demande d’annulation de la délibération approuvant les comptes.

II. Rappel sur les effets de l’approbation des comptes

Une telle jurisprudence reste conforme à la loi et aux décisions judiciaires déjà rendues en la matière.

Rappelons qu’une approbation des comptes sans réserve a pour effet principal de ratifier les dépenses engagées par le syndic et de valider l’excédent ou le déficit par rapport au budget prévisionnel, avant de le répartir sur les comptes individuels de chacun des copropriétaires.

Le vote favorable a pour conséquence d'interdire toute révision ultérieure des comptes, sauf dans les hypothèses prévues par l'article 1269 du Code de procédure civile « d’erreur, d’omission ou de présentation inexacte ».

Ce principe a été plusieurs fois rappelé par la jurisprudence (Cass. 3e civ., 27 avril 1988, n° 86-17431 et 9 novembre 1988, n° 87-13128 ; Cass. 3e civ., 22 mars 1989, n° 87-17329 ; CA d’Aix-en-Provence, 16 mars 1995, n° 83/6277).

Cet article 1269 vient donc très largement réduire les possibilités de remettre en cause l’approbation de comptes lorsqu’elle a été votée, et l’arrêt de la Cour de cassation s’inscrit dans ce cadre.

L’approbation des comptes n’a, en revanche, pas d’incidence sur le compte individuel de chaque copropriétaire qui conserve son droit à contester la répartition des charges et donc l’imputation qui en est faite sur son compte individuel, dans la mesure où « l'approbation des comptes du syndicat par l'assemblée générale ne constitue pas une approbation du compte individuel de chacun des copropriétaires » (article 45-1 du décret du 17 mars 1967).

C’est là un principe rappelé par la jurisprudence de la Cour de cassation, notamment dans un arrêt récent du 1er février 2018, n°16-26992 (voir notre article intitulé : L’approbation des comptes ne vaut pas approbation des comptes individuels des copropriétaires).

S’agissant des conséquences du refus d’approbation, celui-ci entraîne logiquement le refus de donner quitus au syndic pour sa gestion et la nécessité de soumettre à nouveau les comptes à une délibération ultérieure.

Le syndic ne peut pas payer des factures après la fin de son mandat

Catégories Missions du syndic Comptabilité
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
16 octobre 2013 (12-20.881)
Observations

Condamnation du cabinet SERGIC. 

 

Principe retenu

Le syndic dont le mandat a expiré ne peut plus payer les factures

Analyse de la décision

La société SERGIC n’avait pas été renouvelée dans son mandat par une copropriété mécontente (on se demande bien pourquoi...).

Malgré cela, SERGIC avait perçu une indemnité d’assurance après la fin de son mandat (donc hors mandat) et payé des factures d’ailleurs contestées par le syndicat, ceci à hauteur de 1.960,80 €, intégrant des factures d’honoraires.

SERGIC avait donc rendu un chèque au syndicat égal à l’indemnité diminuée des 1.900,80 €.

Un premier juge de proximité avait estimé que :

« La société SERGIC a été contrainte de continuer la gestion des affaires courantes pour le compte de la copropriété au titre de la gestion d’affaires et qu’elle se trouvait d'ailleurs dans la même situation que si elle avait reçu un mandat exprès ».

En gros, selon le juge de proximité : un syndic peut faire ce qu’il veut même s’il n’est plus syndic.

C’est ce jugement qui a été cassé par la Cour de cassation qui précise :

« Vu l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965 ensemble l’article 1372 du Code civil ;

Il apparaît qu’en statuant ainsi, alors que le mandat du syndic est exclusif de l’application des règles de la gestion d’affaires, la juridiction de proximité a violé les textes susvisés ; par ces motifs : casse ».

La conséquence - très intéressante pour tous les copropriétaires dont les anciens syndics continuent à faire des règlements, voire à SE faire des règlements - est qu’un syndic dont le mandat est expiré ne peut plus effectuer des paiements (y compris à lui-même). À défaut, il devra rembourser.

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