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Le droit de jouissance d’un copropriétaire sur une partie commune peut concerner une enseigne commerciale et s’acquérir unilatéralement par une prescription trentenaire

Catégories Prescription Définition des parties communes et privatives
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
22 octobre 2020- (19-21.732)
Observations

Nouvelles précisions apportées par cet arrêt. 

Principe retenu

Le droit de jouissance privatif peut s'acquérir au bout de trente ans.

Analyse de la décision

Les initiatives unilatérales de copropriétaires sur les parties communes ne constituent pas des actes isolés et peuvent donner lieu à des contestations judiciaires quant à leur légalité.

Un arrêt de la Cour de cassation du 22 octobre 2020 apporte un nouvel éclairage sur cette question, via la pose d’une signalétique commerciale sur les parties communes.

I. Modalités légales d’intervention d’un copropriétaire sur les parties communes

Une résidence sise à Paris 1er arrondissement comprend notamment un lot commercial affecté depuis plus de 100 ans à la haute joaillerie, et ce, conformément à la destination de l’immeuble prévue par le règlement de copropriété.

Le propriétaire du lot installe unilatéralement sur la façade du bâtiment une enseigne commerciale à une date incertaine, qui pourrait se situer entre 1953 et 1964.

Une assemblée générale du 9 septembre 2011 adopte un projet de ravalement de la façade intégrant la dépose et la repose de l’enseigne commerciale.

Le propriétaire d’un lot, opposant à cette résolution, invoque judiciairement sa nullité. Il justifie son action sur le fait, que l’intervention légitime du détenteur d’un lot sur une partie commune, telle la façade de l’immeuble, suppose l’autorisation de l’assemblée générale à la majorité des voix du syndicat des copropriétaires selon l’article 25 alinéa b de la loi du 10 juillet 1965.

Or, cet aval impératif faisant manifestement défaut en l’espèce, la présence de cet aménagement privatif se révèle illicite et, ne peut donc être intégré par le syndicat dans le cadre des travaux d’entretien des parties communes.

A cette procédure engagée à l’encontre du syndicat, se joint le propriétaire du lot commercial concerné.

Si les deux premières juridictions judiciaires civiles écartent l’argumentation de ce contestataire (jugement TGI Paris du 18 juin 2013, décision de la cour d’appel de Paris du 17 juin 2015), la Cour de cassation fait partiellement droit à sa demande par un arrêt du 15 décembre 2016, en censurant la présence illicite et inopposable au syndicat de l’enseigne commerciale et renvoyant les parties devant la cour d’appel de Paris.

II. Conditions pour la régularisation exceptionnelle d’une intervention illicite d’un copropriétaire sur les parties communes de l’immeuble

Dans son arrêt n° 17 - 06400 du 15 mai 2019 la cour d’appel de Paris, confirmé par la Cour de cassation dans sa décision n° 19 - 21732 du 22 octobre 2020, suite à un nouveau recours du propriétaire contestataire, entérine la signalétique commerciale sur la façade de l’immeuble.

Ces derniers magistrats assimilent, tout comme leurs homologues de l’instance inférieure, la présence de l’enseigne individuelle sur la façade collective, à un droit de jouissance privatif de son propriétaire (usage exclusif de cette installation personnelle par le détenteur du lot commercial exploité en joaillerie) sur une partie commune.

Or, le droit de jouissance peut aussi bien résulter d’une décision initiale ou ultérieure du syndicat stipulée dans le règlement de copropriété, que d’une situation de fait de plus de trente ans incontestée judiciairement pendant ce laps de temps, comme en l’espèce : «... La cour d'appel a retenu à bon droit qu'un droit de jouissance privatif sur des parties communes est un droit réel et perpétuel qui peut s'acquérir par usucapion et qu'un tel droit peut avoir pour objet l'apposition d'enseignes sur les parties communes de la copropriété. Elle a constaté que la pose d'enseignes en imposte sur les portes cochères n'avait pas été autorisée par l'assemblée générale et que le règlement de copropriété ne contenait aucune stipulation sur ce point.

Elle a relevé que la société R.H.F. avait apposé les enseignes depuis 1964, voire 1953, et avait manifesté, depuis lors, son intention de se comporter en titulaire exclusif du droit de les poser.

Elle en a souverainement déduit, sans qu'il y ait lieu de caractériser une acceptation expresse des copropriétaires, qu'il ne s'agissait pas d'une simple tolérance des autres copropriétaires, mais que cette société, ayant accompli, sans interruption depuis plus de trente ans, des actes caractérisant une possession continue, ininterrompue, paisible, publique et non équivoque, avait acquis, par usucapion, un droit de jouissance privatif réel et perpétuel au maintien des enseignes."

En présence d’un aménagement exécuté illicitement par le propriétaire d’un lot sur les parties communes, la personne morale ou physique qui envisage de faire cesser l’illégalité doit apprécier à juste mesure la nature juridique de l’irrégularité et donc la prescription applicable.

Dans le cas contraire, elle s’expose à engager à l’égard du contrevenant un contentieux long, onéreux et surtout vain.

Les comptes des copropriétés : la Cour de Cassation donne raison à un copropriétaire qui entendait faire respecter les règles

Catégories Comptabilité
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
05 février 2014 (12-19.047)
Observations

Les règles comptables sont régies par la loi du 10 juillet 1965, le décret du 17 mars 1967 ainsi que l'arrêté et le décret comptable du 14 mars 2005. 

Principe retenu

Les charges et les produits du syndicat, prévus au plan comptable, sont enregistrés dès leur engagement juridique par le syndic indépendamment de leur règlement. 

Analyse de la décision

I. Quand les syndics ne respectent pas les obligations comptables

Nous ne comptons plus, à l’ARC, les documents comptables soumis aux assemblées générales et qui ne respectent pas la réglementation comptable applicable aux copropriétés, beaucoup de syndics ne s’embarrassant pas avec les (nombreuses) obligations en la matière.

Et c’est ainsi que les deux principes fondamentaux que sont la comptabilité d’engagement et la séparation des exercices sont souvent bafoués, fréquemment par facilité mais aussi parfois par ruse pour arranger le résultat d’un exercice difficile à justifier.

Les copropriétaires qui votent contre l’approbation de tels comptes sont la plupart du temps minoritaires et sont tout simplement méprisés par les syndics qui voient leurs comptes approuvés à la majorité des copropriétaires présents et représentés. Mais un copropriétaire opiniâtre vient de montrer que l’on ne peut pas toujours faire n’importe quoi sans jamais avoir à en rendre compte…

II. La Cour de Cassation… casse

Le syndic en question avait omis de comptabiliser, dans les produits d’un exercice, une indemnité judiciaire obtenue dans un jugement rendu au cours de l’exercice, au motif qu’elle ne serait payée que sur l’exercice suivant.

La Cour d’appel avait cru bon de valider les comptes tels quels.

La Cour de cassation a sèchement remis les choses à leur juste place (Cass. 3ème Civ. 5 février 2014, n°12-19047) : « les charges et produits du syndicat, prévus au plan comptable, sont enregistrés dès leur engagement juridique par le syndic, indépendamment de leur règlement ». Elle a donc cassé l’arrêt d’appel et donné raison au copropriétaire qui demandait l’annulation de la résolution d’approbation de ces comptes.

Qu’on se le dise : un copropriétaire isolé peut faire valoir le droit et faire annuler une approbation de comptes non conformes aux obligations comptables.

Autrement dit, un exercice doit comporter TOUTES les charges et TOUS les produits de cet exercice, qu’ils soient ou non payés / encaissés, et seulement ces charges et ces produits.

III. Les textes, chers professionnels, les textes

La Cour de cassation renvoie donc les syndics aux textes légaux et réglementaires qu’elle a cités pour justifier sa décision :

Extraits de l’article 14-3 de la loi du 10 juillet 1965 (non modifié par la loi ALUR) :

Les comptes du syndicat comprenant le budget prévisionnel, les charges et produits de l'exercice, la situation de trésorerie, ainsi que les annexes au budget prévisionnel sont établis conformément à des règles comptables spécifiques fixées par décret. Les comptes sont présentés avec comparatif des comptes de l'exercice précédent approuvé.

Les charges et les produits du syndicat, prévus au plan comptable, sont enregistrés dès leur engagement juridique par le syndic indépendamment de leur règlement. L'engagement est soldé par le règlement. […]

Article 2, alinéa 2 du décret du 14 mars 2005 :

En application de l'article 14-3 de la même loi, sont rattachés à l'exercice les produits acquis (produits reçus et à recevoir) et les charges supportées (charges réglées et à régler) au titre de l'exercice.

Compte bancaire séparé : un arrêt de justice sans conséquence

Catégories Comptabilité
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
12 mai 2016 (15-12.575)
Observations

Précision quant aux règles comptables et à l'ouverture d'un compte bancaire. 

Principe retenu

Aucune violation de l'article 18 de la loi du 10 juillet 1965 ne peut être caractérisée lorsque les sommes reçues au nom du syndicat des copropriétaires transitent par le compte du syndic avant d'être transférés sur le compte séparé ouvert au nom du syndicat des copropriétaires. 

Analyse de la décision

Un récent arrêt de la Cour de Cassation du 12 mai 2016 (15-12.575) a jugé que le contrat de syndic ne pouvait être annulé au motif que ce dernier a fait transiter sur son compte bancaire des sommes appartenant au syndicat alors que ce dernier disposait d’un compte bancaire séparé.

Certains observateurs et syndics se sont « frotté les mains » en supposant que même en présence d’un compte bancaire séparé, le syndic pouvait tout de même déposer pendant un « certain temps » (ou plutôt dirons-nous un temps certain) les fonds sur son compte bancaire global avant de les reverser sur le compte séparé de la copropriété.

Nous allons cependant expliquer pourquoi, depuis la loi ALUR du 24 mars 2014 cette décision ne peut pas être considérée comme un arrêt de principe.

Les obligations et les sanctions en matière de compte bancaire séparé en vertu de l’ancienne version de la loi du 10 juillet 1965

L’affaire concernée par cet arrêt judiciaire remonte à novembre 2010, soit quatre ans avant l’entrée en vigueur de la loi ALUR.

L’article 18 de la loi du 10 juillet 1965, avant d’être modifié par la loi ALUR, prévoyait dans son septième alinéa  l’obligation suivante : « le syndic est chargé (…) d’ouvrir un compte bancaire séparé au nom du syndicat des copropriétaires sur lequel sont versées sans délai toutes les sommes ou valeurs reçues au nom et pour le compte du syndicat. (... )La méconnaissance par le syndic de cette obligation emporte la nullité de plein droit de son mandat à l’expiration du délai de trois mois. »

Cet article prévoit que la sanction peut être prononcée uniquement en cas de non-respect de cette obligation : il s’agit donc de la première obligation citée qui concerne l’ouverture du compte bancaire séparé.

C’est donc sur ce fondement légal que la haute juridiction a jugé que la faute commise par le syndic de faire transiter les fonds du syndicat des copropriétaires sur son compte bancaire n’entraînait pas pour autant la possibilité de prononcer judiciairement la nullité du contrat de mandat.

L’ article 18 après l’entrée en vigueur de la loi ALUR

La loi ALUR a, en 2014, modifié de façon importante la loi du 10 juillet 1965 et plus particulièrement l’article 18.

En l’occurrence, elle a repris les obligations en matière de compte bancaire séparé en rajoutant cette fois-ci que « la méconnaissance par le syndic de ces obligations emporte la nullité de plein droit de son mandat à l’expiration du délai de trois mois suivants sa désignation. »

Le législateur a donc voulu étendre la sanction de la nullité du contrat, non pas à la seule obligation relative à l’ouverture du compte bancaire séparé, mais à toutes celles citées avant l’énonciation de la sanction :

  1. l’ouverture dans un établissement bancaire d’un compte bancaire séparé au nom du syndicat ;
  2. le versement sans délai de toutes les sommes ou valeurs reçues au nom ou pour le compte du syndicat ;
  3. le fait que le compte bancaire ne peut faire l’objet ni d’une convention de fusion ni d’une compensation avec tout autre compte ;
  4. le fait que les éventuels intérêts produits par le compte sont définitivement acquis au syndicat de copropriétaires.

L’arrêt de la Cour de Cassation semble donc aujourd’hui sans conséquence puisqu’il se réfère à des dispositions légales (et en l’occurrence à celles de l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965) issues d’une version antérieure qui n’est plus d’actualité.

Si la même affaire devait être jugée aujourd’hui, au regard des dispositions du nouvel article 18, il est donc fort probable que le défaut de l’une de ces obligations serait susceptible d’entraîner la nullité judiciaire du contrat de syndic.

Les conséquences pratiques

Certains syndics vont profiter de cet arrêt pour placer les fonds de ses copropriétés mandantes sur leur compte bancaire global.

La logique est simple : afin d’être en conformité avec les exigences légales, le syndic  ouvre un compte bancaire séparé propre à la copropriété mais continue à bénéficier de la trésorerie de l’immeuble en faisant transiter les fonds sur son propre compte bancaire.

Il faudra donc que le conseil syndical soit vigilant afin de contrôler ce genre de pratique.

Pour cela, il suffira de vérifier sur le relevé bancaire de la copropriété que la date d’enregistrement de l’opération correspond bien à la date de règlement.

Concrètement, si un copropriétaire réalise son règlement d’appels de fonds le 26 mai par virement ou prélèvement par exemple, l’incidence de ce paiement sur le relevé bancaire devra être datée du 27 ou 28 mai.

A défaut, cela signifie que cette somme a transité sur un autre compte qui est sûrement celui du syndic…

 

Un compte bancaire séparé peut perdurer d’un syndic à un autre

Catégories Comptabilité
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
21 décembre 2017 (16-24.587)
Observations

Précision précieuse en matière de compte bancaire séparé en cas de changement de syndic. 

Principe retenu

En cas de changement de syndic, le compte bancaire ouvert par l'ancien syndic peut être repris par le nouveau syndic. 

Analyse de la décision

Bien que la loi du 10 juillet 1965 modifiée par la loi ALUR ait supprimé la possibilité de dérogation de compte bancaire séparé, nous sommes souvent interrogés par nos adhérents pour vérifier la réalité du statut du compte bancaire présenté par le syndic.

En effet, il y a toujours un ou plusieurs éléments qui posent problème : le libellé du compte qui présente le nom du syndic, la présentation d’un numéro d’identifiant créancier SEPA dont le créditeur n’est pas la copropriété mais le syndic, des conditions générales ou particulières ambiguës ne permettant pas d’avoir l’assurance qu’il s’agit d’un vrai compte bancaire séparé où le syndic n’a aucun intérêt sur les fonds mandants.

Autrement dit, si juridiquement la situation a évolué, sur le terrain elle est devenue plus technique sachant que les syndics et leurs banques se sont organisés pour que le compte ait « l’apparence et l’odeur » d’un compte séparé mais n’en ai pas le goût. Le fameux « canada dry ».

Ceci étant, nous avons préconisé une méthode simple à mettre en place, qui fait obstacles aux stratagèmes des syndics et de leurs banques pour présenter de faux comptes bancaires séparés.

I. Une attestation de la banque qui doit confirmer la possibilité de transmission du compte bancaire au syndic repreneur

Afin de garantir que le compte bancaire est bien séparé, il est indispensable d’avoir une attestation de la banque qui confirme que le compte est bien évidemment séparé et surtout qu’il est transférable en cas de changement de syndic. Autrement dit, que le syndic repreneur puisse continuer à gérer le compte et ce peu importe les cabinets successifs qui disposeront du mandat.

Cette confirmation impliquera que le compte n’est pas rattaché au syndic en place mais bien la propriété du syndicat de copropriétaires.

Pour éviter d’écrire ce type de mention dans l’attestation, les syndics avancent un argument qui, à présent, tombe assurément à l’eau.

II. Une obligation de transmission des fonds

L’article 18-2 de la loi du 10 juillet 1965 prévoit qu’en cas de changement de syndic, ce dernier est tenu de remettre les archives et « la totalité des fonds immédiatement disponibles » de la copropriété.

Par ce biais, il invoque qu’il est tenu de fermer le compte bancaire afin d’être en mesure de remettre au syndic repreneur un chèque du montant du solde du compte.

Par conséquent, il évoque que la banque ne peut pas indiquer dans l’attestation une affirmation qui, légalement parlant, pose problème.

III. Une réponse très claire de la Cour de Cassation

En date du 21 décembre 2017, la Cour de Cassation a rendu un arrêt qui a dû justement traiter une demande de nullité du contrat de syndic au motif que le syndic repreneur n’avait pas ouvert un compte bancaire séparé, en continuant à gérer celui ouvert par son prédécesseur.

La Cour de Cassation n’est pas tombée dans le panneau, elle a considéré que la loi oblige à ce que le syndicat de copropriétaires dispose d’un compte bancaire séparé, ce qui était bien le cas puisque le syndic a pu présenter une attestation de la banque confirmant la situation.

Ainsi, un syndic repreneur est tout à fait habilité à continuer à faire perdurer un compte même si, rappelons-le, le syndicat de copropriétaires est en droit de lui demander de changer d’établissement bancaire.

Conclusion : la banque a le droit d’indiquer dans son attestation que le compte pourra être transmissible au nouveau syndic.

Pour preuve, voici un extrait de l’attestation de la banque Monte Paschi qui présente justement ce type de mention :

COMPTE BANCAIRE

 

Droit de jouissance et de propriété ne se confondent pas

Catégories Définition des parties communes et privatives
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
14 mars 2019 (17-23.285)
Observations

Lorsqu'un copropriétaire dispose d'un droit de jouissance privatif, la partie sur laquelle il use de ce droit reste une partie commune. 

La notion est difficile à appréhender pour les copropriétaires et les contentieux se sont multipliés ces dernières décennies sur ce sujet. 

Rappelons que la loi ELAN, oblige la mise en conformité du règlement de copropriété qui ne mentionnerait pas l'existence de partie commune à jouissance privative dans son règlement de copropriété, mais qui dans les faits ce droit de jouissance privatif existerait. 

Principe retenu

Le droit de jouissance n'est pas assimilable à un droit de propriété. 

Analyse de la décision

Les copropriétaires éprouvent régulièrement des difficultés pour appréhender la nature juridique de fractions du bâti (parties communes ou privatives), mais également les droits qui leur sont consentis sur celles-ci par le règlement de copropriété.

La Cour de cassation, dans son arrêt du 14 mars 2019, rappelle la distinction fondamentale entre la jouissance et la propriété d’un bien immobilier.

I.             Détention d’un lot en copropriété : sources et objet

L’achat d’un bien immobilier dans une résidence en copropriété implique l’existence d’un lot appelé partie privative, c’est-à-dire un local déterminé (stipulé dans l’état descriptif de division, généralement rattaché au règlement de copropriété), auquel est indissociablement rattaché la propriété indivise du gros-œuvre, d’équipements collectifs ou parties communes générales (détenues par tous les copropriétaires), voire spéciales (appartenant uniquement à certaines copropriétaires) selon l’article 1 de la loi du 10 juillet 1965.

Conformément aux principes généraux du droit, le possesseur d’un lot en copropriété a l’usage exclusif de celui-ci, la capacité de le louer ou de le céder (article 544 du Code civil).

Il a pour seules restrictions de se conformer aux prescriptions du règlement de copropriété définissant notamment les parties communes et privatives, ainsi que la destination de l’immeuble, qui peut être exclusivement bourgeoise (habitation), bourgeoise (permettant tout ou partie des professions libérales), mixte (autorisant toutes les activités commerciales ou uniquement certaines d’entre elles).

Il ne doit pas nuire non plus aux droits des autres copropriétaires de jouir librement de leurs parties privatives et des parties communes comprises dans leurs lots (article 9 de la loi du 10 juillet 1965).

II.           Droit de jouissance d’une partie commune : sources et objet

La configuration d’une résidence en copropriété peut conduire le syndicat à octroyer à un lot (transmissible) ou à un propriétaire précis (non transmissible) un privilège particulier, qualifié de jouissance exclusive ou privative sur une partie commune (cour, courette, toiture, terrasse, jardin).

Elle se distingue de la propriété d’un bien immobilier, en ce sens que le bénéficiaire en a un usage précaire, puisqu’il ne peut pas vendre uniquement ce droit d’usage.

Ce droit peut disparaître, soit à l’occasion de la mutation du bien (si la jouissance est concédée nominativement), soit par un modificatif de règlement de copropriété approuvé en assemblée générale, avec impérativement le vote favorable du copropriétaire disposant du droit de jouissance.

Le bénéficiaire de ce droit d’usage n’a la capacité de réaliser certains aménagements superficiels (démontables) que moyennant une autorisation de l’assemblée générale à la majorité des voix du syndicat, dès lors que ceux-ci affectent les parties communes ou l’aspect extérieur de l’immeuble (article 25 alinéa b de la loi du 10 juillet 1965).

Il doit supporter les menues opérations d’entretien (nettoyage), ainsi que l’intervention des prestataires du syndicat pour les opérations de réfection de la partie commune dont il peut disposer.

En l’espèce dans une copropriété sise dans le sud de la France, le propriétaire d’un lot commercial bénéficiant de la jouissance du jardin contigu et d’un hangar, sollicite et obtient d’une assemblée générale du 28 août 2014 l’autorisation de réaliser à ses frais divers travaux de destructions et de construction sur ceux-ci, dans le cadre du réaménagement de son local commercial.

Un copropriétaire opposant, considérant l’opération comme illicite, notamment pour les aménagements du jardin et du hangar, qu’il considère être une appropriation de partie commune et un changement de destination de l’immeuble, assigne le syndicat en annulation des résolutions litigieuses.

Sa demande est écartée, la Cour d’appel considérant que le jardin et le hangar sont compris dans la composition d’un lot, et étant affectés à l’usage exclusif d’un copropriétaire déterminé, sont des parties privatives. Il se pourvoit en cassation.

La Cour de cassation dans son arrêt n° 17-23285 du 14 mars 2019 infirme la décision rendue par la juridiction inférieure en précisant la nature juridique du jardin (partie commune) et l’illégalité de travaux sur celle-ci par une personne ne disposant pas de la propriété donc du droit d’en disposer, mais simplement d’un droit de jouissance :

« […] Qu'en statuant ainsi (hangar et jardins sont des parties privatives), alors qu'il ressortait de l'état descriptif de division figurant au chapitre II du règlement de copropriété que le lot n° 1 ne comportait que le droit à la jouissance exclusive et particulière du jardin et du hangar y édifié, la cour d'appel, qui a dénaturé les dispositions claires et précises de ce document, a violé le principe susvisé ; ».

Droit de jouissance et de propriété d’un bien immobilier constituent deux notions juridiques distinctes. Le syndicat doit apprécier précisément le projet d’un copropriétaire sur un bien immobilier, notamment s’il concerne une partie commune.

En effet, si l’opération envisagée entraîne l’appropriation de celle-ci, entre autre par une construction, elle suppose préalablement de procéder à la création d’un nouveau lot, par un avenant au règlement de copropriété qui fera ensuite l’objet d’une cession.

Le syndicat des copropriétaires peut consentir un droit de jouissance sur une partie commune à un lot ou à une personne

Catégories Définition des parties communes et privatives
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
06 septembre 2018 (17-22.180)
Observations

Cet arrêt confirme la jurisprudence constante de la Cour de cassation. 

Principe retenu

Tout copropriétaire doit se conformer expressément aux droits accordés par le syndicat sur une partie commune et ne pas confondre un droit d’usage accordé à une personne avec le même droit accordé à un lot.

Analyse de la décision

La configuration d’une résidence peut attiser les velléités de copropriétaires de bénéficier d’un usage exclusif sur une partie commune (terrasse, cour, jardin) contiguë de leur lot.

La Cour de Cassation rappelle dans un arrêt du 6 septembre 2018 la législation applicable.

I. La primauté du règlement de copropriété 

Le règlement de copropriété constitue la « loi du syndicat », c’est-à-dire qu’il fixe librement les parties privatives, les parties communes ainsi que les modalités de jouissance et d’administration de celles-ci, à la seule condition de ne pas enfreindre des dispositions d’ordre public (art. 8 de la loi du 10 juillet 1965).

Autrement dit, le règlement de copropriété a vocation à contenir les éventuels usages exclusifs que détient un lot sur une partie commune. Ce droit exclusif peut donc avoir été octroyé dès l’origine et stipulé tel quel dans ce document. C’est un droit réel.

II. Le rôle accessoire de l’assemblée générale

Le droit de jouissance exclusif sur une partie commune peut également être accordé ultérieurement par le syndicat, moyennant une résolution de l’assemblée générale (art. 17 de la loi de la loi du 10 juillet 1965), adoptée à la double majorité de l’article 26 du même texte.

Une telle décision ne donne pas forcément lieu à un avenant au règlement de copropriété notamment lorsque l’assemblée concède ce privilège à un copropriétaire déterminé et non à un lot. C’est un droit personnel.

Dans cette hypothèse, lors de la mutation du lot, ce droit ne se transmet pas au nouvel acquéreur, il s’éteint avec le départ du vendeur, contrairement à une jouissance privative sur la partie commune qui serait accordée à un lot, transmise au nouvel acquéreur du lot.

A titre exceptionnel, le copropriétaire qui occupe de manière publique et continue pendant trente ans une partie commune peut en revendiquer la jouissance, voire la propriété (art. 2272 du Code civil).

En l’espèce, dans un immeuble parisien, comprenant deux terrasses sur lesquelles le syndicat a consenti un droit de jouissance personnel à deux copropriétaires distinctes, l’une d’elles prétend détenir également l’usage exclusif de l’autre partie commune par une convention (non validée en assemblée générale) et par une occupation de celle-ci pendant plus de 10 ans.

Dans l’arrêt n°17 - 22180 du 6 septembre 2018, la 3ème chambre civile de la Cour de cassation rejette le recours de cette copropriétaire selon sa jurisprudence constante :

« […] Mais attendu qu'ayant relevé que l'assemblée générale du 30 mai 1956 avait autorisé Mme A..., précédente propriétaire de l'appartement, à installer une terrasse et que l'assemblée générale du 14 mai 1985 avait accordé à Mme X... le droit d'usage de la deuxième partie de la terrasse, souverainement retenu que les copropriétaires avaient souhaité octroyer de simples autorisations personnelles aux propriétaires successifs de l'appartement nommément identifiés, de sorte que Mme X... n'avait pu, en acquérant les lots obtenir un droit de jouissance exclusif sur la première partie de la terrasse et constaté, d'une part, que la convention signée le 12 septembre 1985 entre le syndicat des copropriétaires et Mme X... contrevenait aux termes de l'assemblée générale du 12 mai 1985, en ce qu'elle indiquait que le droit de jouissance était attaché aux lots 10 et 11, d'autre part, que Mme X... exerçait une action réelle en revendication d'un droit de jouissance privative, soumise à la prescription trentenaire, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, en a exactement déduit que Mme X... ne pouvait se prévaloir que d'un droit personnel et ne pouvait bénéficier de l'usucapion ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé […] »

L’assemblée générale avait autorisée un droit à titre personnel. La convention signée avec le syndicat des copropriétaires avait accordé ce droit de jouissance au lot, cela aurait pu être qualifié de droit réel.

La Cour n’a pas retenu cette convention qui était contraire à ce qui avait été décidée par l’assemblée générale. Par conséquent, le droit personnel ne permettant pas d’acquérir avec le temps, la demande de la copropriétaire a été rejetée.

Tout copropriétaire doit se conformer expressément aux droits accordés par le syndicat sur une partie commune et ne pas confondre un droit d’usage accordé à une personne avec le même droit accordé à un lot.

Le syndic ne peut pas payer des factures après la fin de son mandat

Catégories Missions du syndic Comptabilité
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
16 octobre 2013 (12-20.881)
Observations

Condamnation du cabinet SERGIC. 

 

Principe retenu

Le syndic dont le mandat a expiré ne peut plus payer les factures

Analyse de la décision

La société SERGIC n’avait pas été renouvelée dans son mandat par une copropriété mécontente (on se demande bien pourquoi...).

Malgré cela, SERGIC avait perçu une indemnité d’assurance après la fin de son mandat (donc hors mandat) et payé des factures d’ailleurs contestées par le syndicat, ceci à hauteur de 1.960,80 €, intégrant des factures d’honoraires.

SERGIC avait donc rendu un chèque au syndicat égal à l’indemnité diminuée des 1.900,80 €.

Un premier juge de proximité avait estimé que :

« La société SERGIC a été contrainte de continuer la gestion des affaires courantes pour le compte de la copropriété au titre de la gestion d’affaires et qu’elle se trouvait d'ailleurs dans la même situation que si elle avait reçu un mandat exprès ».

En gros, selon le juge de proximité : un syndic peut faire ce qu’il veut même s’il n’est plus syndic.

C’est ce jugement qui a été cassé par la Cour de cassation qui précise :

« Vu l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965 ensemble l’article 1372 du Code civil ;

Il apparaît qu’en statuant ainsi, alors que le mandat du syndic est exclusif de l’application des règles de la gestion d’affaires, la juridiction de proximité a violé les textes susvisés ; par ces motifs : casse ».

La conséquence - très intéressante pour tous les copropriétaires dont les anciens syndics continuent à faire des règlements, voire à SE faire des règlements - est qu’un syndic dont le mandat est expiré ne peut plus effectuer des paiements (y compris à lui-même). À défaut, il devra rembourser.

Mots clés associés

Le droit de jouissance d’une partie commune peut s’acquérir au bout de 30 ans

Catégories Prescription Définition des parties communes et privatives
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
24 octobre 2007 (06-19.260)
Observations

Reconnaissance par la Cour de cassation de cette possibilité. 

Principe retenu

Un droit de jouissance privatif peut s'acquérir au bout de 30 ans s'il est possible de démontrer que le copropriétaire en a eu la jouissance paisible, continue, publique, non-équivoque et à titre de propriétaire. 

Analyse de la décision

La jurisprudence a eu l’occasion de reconnaître, en l’absence de droit particulier conféré par le règlement de copropriété, qu’un copropriétaire pouvait se prévaloir d’un droit de jouissance privatif sur une partie commune. La plupart du temps, il s’agira d’une partie commune attenante à un lot ou y donnant accès : cour, jardin, terrasse, chemin…

La Cour d’appel a retenu, dans cette affaire, que les copropriétaires du rez-de-chaussée qui utilisaient depuis plus de 30 ans une partie de terrain à titre privatif n’avaient pas pu acquérir pour autant un droit de jouissance par usucapion.

La Cour de cassation, dans son arrêt de 2007, censure le juge d’appel et retient « qu'un droit de jouissance privatif sur des parties communes est un droit réel et perpétuel qui peut s'acquérir par usucapion ».

Le moyen de l’usucapion est en principe utilisé pour faire valoir un droit de propriété, et non un simple droit de jouissance. Or, le droit de jouissance n’est pas un droit de propriété : la partie concernée reste donc bien une partie commune, mais les copropriétaires concernés bénéficient du droit d’en jouir seuls – excluant une jouissance par d’autres copropriétaires – comme s’ils y avaient été autorisés par le règlement de copropriété ou une décision d’assemblée générale.

Le mandat d'un syndic de copropriété peut être révoqué à tout moment, mais ce droit, susceptible d'abus, ne peut être exercé que pour une cause légitime

Catégories Désignation / échéance du contrat / révocation du contrat de syndic
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
27 avril 1988 (86-11.718)
Observations

Depuis le décret du 02 juillet 2020 qui a réformé le contrat de syndic, on ne parle plus de révocation mais de résiliation du contrat de syndic à l'initiative du conseil syndical. 

Principe retenu

Seul un manquement du syndic à ses obligations peut justifier une révocation sans indemnité. 

Analyse de la décision

Conformément à l’article 29 du décret du 17 mars 1967, modifié par le décret du 26 mars  2015, le contrat du syndic doit expressément indiquer sa durée (qui ne peut pas excéder trois ans), ainsi que les dates calendaires de prise d’effet et d’échéance.

C’est un contrat à durée déterminée, qui est censé se poursuivre jusqu’à son terme.

Mais en pratique, les copropriétaires sont souvent confrontés à des difficultés plus ou moins graves, liées à la gestion de la copropriété faite par leur syndic.

Face à ces difficultés, qui paralysent parfois le fonctionnement de la copropriété, les copropriétaires peuvent vouloir remplacer rapidement le syndic en exercice, sans avoir à attendre la fin de son mandat.

La révocation n’est pas un non-renouvellement du contrat du syndic en cours, mais il s’agit d’une rupture anticipée de son contrat.

Cette révocation est décidée à la majorité absolue de l’article 25 et si un nouveau syndic est désigné en assemblée pour entrer en fonction avant la fin du contrat de son prédécesseur, ce dernier est automatiquement révoqué (article 18-V, alinéa 3, de la loi du 10 juillet 1965).

Mais parfois, les syndics vont jusqu’à saisir un juge, non pas pour contester leur révocation, mais pour demander à être indemnisés lorsque leur contrat a été rompu de manière anticipée.

Pour cela, ils font valoir que leur révocation par l’assemblée était abusive.

Dans ce cas, le syndic ne peut pas se faire justice lui-même en facturant des honoraires pour la période postérieure à sa révocation (Cour d’appel de Paris, 19e ch. A, 30 septembre1998, n° 1996/16113) ; mais il peut prétendre à une indemnité dans le cadre d’une action en justice.

La jurisprudence considère que seul un manquement du syndic à ses obligations peut justifier une révocation sans indemnité.

En l’absence d’un motif légitime, le syndic peut prétendre à être indemnisé par le syndicat.

Il est donc nécessaire pour le syndicat des copropriétaires, notamment à travers le conseil syndical, d’anticiper tout contentieux et de conserver toutes les preuves des manquements du syndic et de mentionner ces griefs dans la résolution d’assemblée relative à sa révocation.

Invoquer une simple rupture de confiance n’est pas suffisant.

Un arrêt de la Cour d’appel de Paris a même considéré abusive la révocation d’un syndic qui n’avait pas pu présenter sa défense devant l’assemblée générale (Cour d’appel de Paris, 12 janvier1990, Rev. Administrer, janv.1991, p.65).

En revanche, ont été retenus comme motifs légitimes, par exemple le fait que le syndic engage des travaux sans autorisation d’assemblée générale et en contradiction avec une résolution imposant la tenue d’une assemblée générale extraordinaire (Cour d’appel de Paris, 23e ch. A, 6 novembre 1996, n° 95/11679), ou encore le fait que l’un de ses préposés a reçu des mandats de vote (14 en tout) pour représenter des copropriétaires en assemblée générale alors que l’article 22 de la loi de 1965 l’interdit (Cass., 3e civ., 7 mai 2014, n° 12-26426).

Si révoquer le syndic n’est pas suffisant et que le préjudice est important, la copropriété peut aller plus loin en agissant en responsabilité contre le syndic, en vue d’obtenir des dommages et intérêts.

Un droit de jouissance exclusive sur des parties communes n’est pas un droit de propriété et ne peut constituer la partie privative d’un lot

Catégories Définition des parties communes et privatives
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
06 juin 2007 (06-13.477)
Observations

Jurisprudence constante.

Pour un autre exemple : Le droit de jouissance privatif n'est pas assimilable à un droit de propriété

 

Principe retenu

Le droit de jouissance privatif sur une partie commune n'est pas un droit de propriété. 

Analyse de la décision

Très souvent, les copropriétés sont dotées de jardins, cours, combles, terrasses, balcons, attenants à certains lots.

Pour en connaître la nature précise, à savoir partie privative ou commune, il faut s’en référer au règlement de copropriété qui doit définir ces catégories.

Il arrive que les règlements, parfois anciens et non modifiés, soient silencieux concernant certaines parties.

L’article 3 de la loi de 1965 présume, dans le silence du règlement de copropriété, certaines parties de l’immeuble comme communes, telles que le sol, le gros œuvre, les cours, les jardins, les voies d'accès, le droit de surélever un bâtiment affecté à l'usage commun, le droit de construire afférent aux parties communes… On peut noter ici que certaines parties, qui donnent pourtant lieu à nombre de litiges, comme les balcons ou les combles, ne sont pas mentionnées dans cette liste. Ces litiges donnent lieu à l’appréciation des juges au cas par cas en fonction de certains critères, liés souvent à la configuration des lieux et aux modalités d’accès à ces parties.

Un élément de complexité s’ajoute lorsque le règlement de copropriété consent à certains copropriétaires un droit de jouissance privatif sur des parties communes.

L’adjectif « privatif » peut être trompeur : il ne s’agit pas de reconnaître au copropriétaire concerné un droit de propriété sur cette partie (balcon, terrasse, cour, jardin…), celle-ci n’étant pas incluse dans son lot privatif. Il s’agit seulement de lui en donner l’usage exclusif, donc à l’exclusion des autres copropriétaires, sauf à ce que plusieurs d’entre eux bénéficient du même droit sur la même partie (par exemple l’usage de sanitaires communs situés sur un palier par les résidents de l’étage concerné).

La jurisprudence a maintes fois rappelé que le droit de jouissance privatif n’est pas un droit de propriété : le copropriétaire qui en bénéficie ne peut donc pas prendre les initiatives que pourrait prendre un propriétaire, telle que l’annexion de cette partie (comble, couloir…), la réalisation de travaux sur cette partie, sa transformation, sa vente…

Par exemple, en matière de travaux, il a été jugé que la construction d’une véranda par un copropriétaire sur un terrain sur lequel il bénéficie d’un droit de jouissance devait être autorisée par l’assemblée à la double majorité de l’article 26 de la loi de 1965, dans la mesure où elle est réalisée sur une partie commune (Cass., 3e civ., 8 novembre 2006, n° 05-19757), même si la construction d’une véranda légère et dépourvue de fondations a été admise par la Cour d’appel de Paris (CA de Paris, 23e ch. B, 5 novembre 1993, n° 92/012058).

Comme nous le verrons, l’action du syndicat des copropriétaires pour revendiquer la partie commune et faire démolir la construction irrégulière peut être exercée pendant 30 ans.

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