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Non-respect des délais de convocation d’assemblée générale et qualité pour agir en nullité

Catégories Contestation de la décision / de l'assemblée générale Convocation
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
14 mars 2019 (18-10.379)
Observations

Confirmation de la jurisprudence fixée en 1974 concernant le non-respect des délais de convocation d'assemblée générale. 

Principe retenu

Si le délai de convocation n'a pas été respecté, le copropriétaire qui souhaite faire annuler l'assemblée générale ne doit pas voter favorablement à certaines décisions. 

Le fait de voter favorablement à certaines décisions, enlève le caractère irrégulier de la convocation. 

Analyse de la décision

Les irrégularités affectant les assemblées générales (convocation et tenue) ne se soldent pas toujours par une nullité quand une action est engagée.

La Cour de cassation réitère sa jurisprudence constante sur les conditions nécessaires pour pouvoir solliciter la nullité de l’assemblée générale dans son ensemble par un copropriétaire qui a été victime d’une notification tardive de la convocation par le syndic.

I. Forme et délai de notification de la convocation de l’assemblée générale par le syndic aux copropriétaires

Il incombe au syndic en exercice, en sa qualité d’unique représentant légal du syndicat (article 18 de la loi du 10 juillet 1965) de convoquer les copropriétaires en assemblée générale, et ce a minima une fois par an (article 7 du décret du 17 mars 1967).

Selon l’article 34 du décret du 17 mars 1967, la notification de la convocation de l’assemblée générale par le syndic aux copropriétaires s’entend soit par l’envoi d’une lettre recommandée avec demande d’avis de réception, soit par voie électronique (à la condition d’un accord écrit express individuel de chaque destinataire), soit par une remise contre émargement.

Cette notification doit respecter un délai minimal réglementaire de 21 jours, entre le lendemain de la première présentation de celle-ci à tous les copropriétaires et le jour de la réunion du syndicat (article 9 du décret du 17 mars 1967).

Régulièrement, les délais de notification ne sont pas respectés. Certains copropriétaires concernés se rendent quand même à l’assemblée générale et font alors consigner cette irrégularité dans le procès-verbal.

II. Irrégularité du délai de convocation : conditions requises pour agir en nullité

L’article 42 de la loi du 10 juillet 1965 dispose que l’action judiciaire en contestation de l’assemblée générale (résolutions ou réunion complète) doit être exercée par les copropriétaires opposants (ayant voté dans le sens contraire de la décision) ou défaillants (absents non représentés) dans le délai de deux mois suivant la notification de son procès-verbal par le syndic.

En l’espèce, le syndic professionnel d’une copropriété sise à Menton (06) notifie hors délai la convocation de l’assemblée générale du 21 juin 2010 à une SCI T.B.V. propriétaire d’un lot.

Tout en signalant et faisant retranscrire sur le procès-verbal l’irrégularité de l’assemblée générale du fait de cette convocation tardive, la SCI T.B.V. ne s’oppose pas à l’ensemble des points inscrits à son ordre du jour.

Autrement dit, elle vote favorablement certaines questions adoptées par l’assemblée générale.

Puis après la notification du procès-verbal, elle assigne le syndicat des copropriétaires pour obtenir la nullité dans son intégralité.

La Cour de cassation dans son arrêt n° 18 - 10379 du 14 mars 2019 confirme sa jurisprudence, à savoir qu’un copropriétaire ne peut solliciter l’annulation d’une assemblée générale dans sa totalité, dès lors qu’il vote favorablement à l’une de ses décisions approuvées.

Le fait qu’il fasse consigner une réserve sur la validité de l’assemblée générale ne suffit pas pour obtenir la nullité de cette dernière :

« […] Mais attendu qu'ayant retenu à bon droit qu'un copropriétaire ne peut demander l'annulation d'une assemblée générale dès lors qu'il a voté en faveur de certaines des décisions prises et constaté que la SCI T.B.V.  avait voté en faveur de plusieurs résolutions lors de l'assemblée générale du 21 juin 2010, sans que la mention en page trois du procès-verbal selon laquelle elle précisait que l'assemblée générale était entachée d'illégalité en raison du non-respect du délai de convocation lui ait conféré la qualité d'opposant ou de défaillant à l'ensemble des décisions prises, la cour d'appel en a exactement déduit que la demande était irrecevable ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé […] ».

En revanche, ce copropriétaire est en mesure d’invoquer la nullité d’une ou plusieurs résolutions prises individuellement lors de l’assemblée générale illicite s’il jouit de la qualité d’opposant à la décision concernée :

« Attendu que, pour déclarer irrecevable la demande en annulation de diverses décisions adoptées au cours de l'assemblée générale, l'arrêt retient que la demande est nouvelle, comme n'ayant pas été présentée en première instance, et a été formée après l'expiration du délai de deux mois ;

Qu'en statuant ainsi, sans rechercher si la demande subsidiaire en annulation de quinze décisions n'était pas virtuellement comprise dans la demande en annulation de l'assemblée générale et, dans l'affirmative, sans constater que cette demande initiale avait été formée hors délai, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des textes susvisés ; […] ».

Le copropriétaire présent à une assemblée générale irrégulière, qui envisage de la contester judiciairement dans son intégralité, doit préserver ses droits en votant dans le sens contraire de la majorité de chacune des résolutions, afin de ne pas engager en vain une procédure contentieuse longue et onéreuse.

Les comptes des copropriétés : la Cour de Cassation donne raison à un copropriétaire qui entendait faire respecter les règles

Catégories Comptabilité
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
05 février 2014 (12-19.047)
Observations

Les règles comptables sont régies par la loi du 10 juillet 1965, le décret du 17 mars 1967 ainsi que l'arrêté et le décret comptable du 14 mars 2005. 

Principe retenu

Les charges et les produits du syndicat, prévus au plan comptable, sont enregistrés dès leur engagement juridique par le syndic indépendamment de leur règlement. 

Analyse de la décision

I. Quand les syndics ne respectent pas les obligations comptables

Nous ne comptons plus, à l’ARC, les documents comptables soumis aux assemblées générales et qui ne respectent pas la réglementation comptable applicable aux copropriétés, beaucoup de syndics ne s’embarrassant pas avec les (nombreuses) obligations en la matière.

Et c’est ainsi que les deux principes fondamentaux que sont la comptabilité d’engagement et la séparation des exercices sont souvent bafoués, fréquemment par facilité mais aussi parfois par ruse pour arranger le résultat d’un exercice difficile à justifier.

Les copropriétaires qui votent contre l’approbation de tels comptes sont la plupart du temps minoritaires et sont tout simplement méprisés par les syndics qui voient leurs comptes approuvés à la majorité des copropriétaires présents et représentés. Mais un copropriétaire opiniâtre vient de montrer que l’on ne peut pas toujours faire n’importe quoi sans jamais avoir à en rendre compte…

II. La Cour de Cassation… casse

Le syndic en question avait omis de comptabiliser, dans les produits d’un exercice, une indemnité judiciaire obtenue dans un jugement rendu au cours de l’exercice, au motif qu’elle ne serait payée que sur l’exercice suivant.

La Cour d’appel avait cru bon de valider les comptes tels quels.

La Cour de cassation a sèchement remis les choses à leur juste place (Cass. 3ème Civ. 5 février 2014, n°12-19047) : « les charges et produits du syndicat, prévus au plan comptable, sont enregistrés dès leur engagement juridique par le syndic, indépendamment de leur règlement ». Elle a donc cassé l’arrêt d’appel et donné raison au copropriétaire qui demandait l’annulation de la résolution d’approbation de ces comptes.

Qu’on se le dise : un copropriétaire isolé peut faire valoir le droit et faire annuler une approbation de comptes non conformes aux obligations comptables.

Autrement dit, un exercice doit comporter TOUTES les charges et TOUS les produits de cet exercice, qu’ils soient ou non payés / encaissés, et seulement ces charges et ces produits.

III. Les textes, chers professionnels, les textes

La Cour de cassation renvoie donc les syndics aux textes légaux et réglementaires qu’elle a cités pour justifier sa décision :

Extraits de l’article 14-3 de la loi du 10 juillet 1965 (non modifié par la loi ALUR) :

Les comptes du syndicat comprenant le budget prévisionnel, les charges et produits de l'exercice, la situation de trésorerie, ainsi que les annexes au budget prévisionnel sont établis conformément à des règles comptables spécifiques fixées par décret. Les comptes sont présentés avec comparatif des comptes de l'exercice précédent approuvé.

Les charges et les produits du syndicat, prévus au plan comptable, sont enregistrés dès leur engagement juridique par le syndic indépendamment de leur règlement. L'engagement est soldé par le règlement. […]

Article 2, alinéa 2 du décret du 14 mars 2005 :

En application de l'article 14-3 de la même loi, sont rattachés à l'exercice les produits acquis (produits reçus et à recevoir) et les charges supportées (charges réglées et à régler) au titre de l'exercice.

Compte bancaire séparé : un arrêt de justice sans conséquence

Catégories Comptabilité
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
12 mai 2016 (15-12.575)
Observations

Précision quant aux règles comptables et à l'ouverture d'un compte bancaire. 

Principe retenu

Aucune violation de l'article 18 de la loi du 10 juillet 1965 ne peut être caractérisée lorsque les sommes reçues au nom du syndicat des copropriétaires transitent par le compte du syndic avant d'être transférés sur le compte séparé ouvert au nom du syndicat des copropriétaires. 

Analyse de la décision

Un récent arrêt de la Cour de Cassation du 12 mai 2016 (15-12.575) a jugé que le contrat de syndic ne pouvait être annulé au motif que ce dernier a fait transiter sur son compte bancaire des sommes appartenant au syndicat alors que ce dernier disposait d’un compte bancaire séparé.

Certains observateurs et syndics se sont « frotté les mains » en supposant que même en présence d’un compte bancaire séparé, le syndic pouvait tout de même déposer pendant un « certain temps » (ou plutôt dirons-nous un temps certain) les fonds sur son compte bancaire global avant de les reverser sur le compte séparé de la copropriété.

Nous allons cependant expliquer pourquoi, depuis la loi ALUR du 24 mars 2014 cette décision ne peut pas être considérée comme un arrêt de principe.

Les obligations et les sanctions en matière de compte bancaire séparé en vertu de l’ancienne version de la loi du 10 juillet 1965

L’affaire concernée par cet arrêt judiciaire remonte à novembre 2010, soit quatre ans avant l’entrée en vigueur de la loi ALUR.

L’article 18 de la loi du 10 juillet 1965, avant d’être modifié par la loi ALUR, prévoyait dans son septième alinéa  l’obligation suivante : « le syndic est chargé (…) d’ouvrir un compte bancaire séparé au nom du syndicat des copropriétaires sur lequel sont versées sans délai toutes les sommes ou valeurs reçues au nom et pour le compte du syndicat. (... )La méconnaissance par le syndic de cette obligation emporte la nullité de plein droit de son mandat à l’expiration du délai de trois mois. »

Cet article prévoit que la sanction peut être prononcée uniquement en cas de non-respect de cette obligation : il s’agit donc de la première obligation citée qui concerne l’ouverture du compte bancaire séparé.

C’est donc sur ce fondement légal que la haute juridiction a jugé que la faute commise par le syndic de faire transiter les fonds du syndicat des copropriétaires sur son compte bancaire n’entraînait pas pour autant la possibilité de prononcer judiciairement la nullité du contrat de mandat.

L’ article 18 après l’entrée en vigueur de la loi ALUR

La loi ALUR a, en 2014, modifié de façon importante la loi du 10 juillet 1965 et plus particulièrement l’article 18.

En l’occurrence, elle a repris les obligations en matière de compte bancaire séparé en rajoutant cette fois-ci que « la méconnaissance par le syndic de ces obligations emporte la nullité de plein droit de son mandat à l’expiration du délai de trois mois suivants sa désignation. »

Le législateur a donc voulu étendre la sanction de la nullité du contrat, non pas à la seule obligation relative à l’ouverture du compte bancaire séparé, mais à toutes celles citées avant l’énonciation de la sanction :

  1. l’ouverture dans un établissement bancaire d’un compte bancaire séparé au nom du syndicat ;
  2. le versement sans délai de toutes les sommes ou valeurs reçues au nom ou pour le compte du syndicat ;
  3. le fait que le compte bancaire ne peut faire l’objet ni d’une convention de fusion ni d’une compensation avec tout autre compte ;
  4. le fait que les éventuels intérêts produits par le compte sont définitivement acquis au syndicat de copropriétaires.

L’arrêt de la Cour de Cassation semble donc aujourd’hui sans conséquence puisqu’il se réfère à des dispositions légales (et en l’occurrence à celles de l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965) issues d’une version antérieure qui n’est plus d’actualité.

Si la même affaire devait être jugée aujourd’hui, au regard des dispositions du nouvel article 18, il est donc fort probable que le défaut de l’une de ces obligations serait susceptible d’entraîner la nullité judiciaire du contrat de syndic.

Les conséquences pratiques

Certains syndics vont profiter de cet arrêt pour placer les fonds de ses copropriétés mandantes sur leur compte bancaire global.

La logique est simple : afin d’être en conformité avec les exigences légales, le syndic  ouvre un compte bancaire séparé propre à la copropriété mais continue à bénéficier de la trésorerie de l’immeuble en faisant transiter les fonds sur son propre compte bancaire.

Il faudra donc que le conseil syndical soit vigilant afin de contrôler ce genre de pratique.

Pour cela, il suffira de vérifier sur le relevé bancaire de la copropriété que la date d’enregistrement de l’opération correspond bien à la date de règlement.

Concrètement, si un copropriétaire réalise son règlement d’appels de fonds le 26 mai par virement ou prélèvement par exemple, l’incidence de ce paiement sur le relevé bancaire devra être datée du 27 ou 28 mai.

A défaut, cela signifie que cette somme a transité sur un autre compte qui est sûrement celui du syndic…

 

Un compte bancaire séparé peut perdurer d’un syndic à un autre

Catégories Comptabilité
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
21 décembre 2017 (16-24.587)
Observations

Précision précieuse en matière de compte bancaire séparé en cas de changement de syndic. 

Principe retenu

En cas de changement de syndic, le compte bancaire ouvert par l'ancien syndic peut être repris par le nouveau syndic. 

Analyse de la décision

Bien que la loi du 10 juillet 1965 modifiée par la loi ALUR ait supprimé la possibilité de dérogation de compte bancaire séparé, nous sommes souvent interrogés par nos adhérents pour vérifier la réalité du statut du compte bancaire présenté par le syndic.

En effet, il y a toujours un ou plusieurs éléments qui posent problème : le libellé du compte qui présente le nom du syndic, la présentation d’un numéro d’identifiant créancier SEPA dont le créditeur n’est pas la copropriété mais le syndic, des conditions générales ou particulières ambiguës ne permettant pas d’avoir l’assurance qu’il s’agit d’un vrai compte bancaire séparé où le syndic n’a aucun intérêt sur les fonds mandants.

Autrement dit, si juridiquement la situation a évolué, sur le terrain elle est devenue plus technique sachant que les syndics et leurs banques se sont organisés pour que le compte ait « l’apparence et l’odeur » d’un compte séparé mais n’en ai pas le goût. Le fameux « canada dry ».

Ceci étant, nous avons préconisé une méthode simple à mettre en place, qui fait obstacles aux stratagèmes des syndics et de leurs banques pour présenter de faux comptes bancaires séparés.

I. Une attestation de la banque qui doit confirmer la possibilité de transmission du compte bancaire au syndic repreneur

Afin de garantir que le compte bancaire est bien séparé, il est indispensable d’avoir une attestation de la banque qui confirme que le compte est bien évidemment séparé et surtout qu’il est transférable en cas de changement de syndic. Autrement dit, que le syndic repreneur puisse continuer à gérer le compte et ce peu importe les cabinets successifs qui disposeront du mandat.

Cette confirmation impliquera que le compte n’est pas rattaché au syndic en place mais bien la propriété du syndicat de copropriétaires.

Pour éviter d’écrire ce type de mention dans l’attestation, les syndics avancent un argument qui, à présent, tombe assurément à l’eau.

II. Une obligation de transmission des fonds

L’article 18-2 de la loi du 10 juillet 1965 prévoit qu’en cas de changement de syndic, ce dernier est tenu de remettre les archives et « la totalité des fonds immédiatement disponibles » de la copropriété.

Par ce biais, il invoque qu’il est tenu de fermer le compte bancaire afin d’être en mesure de remettre au syndic repreneur un chèque du montant du solde du compte.

Par conséquent, il évoque que la banque ne peut pas indiquer dans l’attestation une affirmation qui, légalement parlant, pose problème.

III. Une réponse très claire de la Cour de Cassation

En date du 21 décembre 2017, la Cour de Cassation a rendu un arrêt qui a dû justement traiter une demande de nullité du contrat de syndic au motif que le syndic repreneur n’avait pas ouvert un compte bancaire séparé, en continuant à gérer celui ouvert par son prédécesseur.

La Cour de Cassation n’est pas tombée dans le panneau, elle a considéré que la loi oblige à ce que le syndicat de copropriétaires dispose d’un compte bancaire séparé, ce qui était bien le cas puisque le syndic a pu présenter une attestation de la banque confirmant la situation.

Ainsi, un syndic repreneur est tout à fait habilité à continuer à faire perdurer un compte même si, rappelons-le, le syndicat de copropriétaires est en droit de lui demander de changer d’établissement bancaire.

Conclusion : la banque a le droit d’indiquer dans son attestation que le compte pourra être transmissible au nouveau syndic.

Pour preuve, voici un extrait de l’attestation de la banque Monte Paschi qui présente justement ce type de mention :

COMPTE BANCAIRE

 

L’action en restitution d’une partie commune appropriée illégalement appartient à tout copropriétaire et se prescrit dans le délai de 30 ans

Catégories Prescription Règles procédurales Définition des parties communes et privatives
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
24 octobre 2019 (18-19.172)
Observations

Il faut bien distinguer la réalisation de travaux affectant les parties communes de l'appropriation des parties communes. 

En effet, les régimes juridiques en découlant sont différents. 

Principe retenu

La contestation d'une appropriation d'une partie commune se prescrit par trente ans. 

Analyse de la décision

Face à des occupations illicites de parties communes, certains syndicats hésitent à engager une procédure pour faire cesser cette situation pour divers motifs (indifférence, coût et aléa d’une instance, qui pourrait se révéler au demeurant prescrite).

La Cour de cassation rappelle dans un arrêt du 24 octobre 2019 les fondamentaux du contentieux de remise en état de parties communes occupées illégalement par un copropriétaire.

I. Droit collectif, mais également individuel

Conformément à l’article 4 de la loi du 10 juillet 1965, les parties communes générales de la résidence appartiennent à tous les propriétaires d’un lot, les parties communes spéciales uniquement à certains d’entre eux.

Ces parties communes ne peuvent donc faire l’objet d’une appropriation illicite par un copropriétaire qui empêcherait les autres résidents de pouvoir également en disposer, sans autorisation préalable de l’assemblée générale. L’article 9 de la même loi proscrit ce genre de comportement.

Si tel est le cas, et sans restitution volontaire de celle-ci par le copropriétaire dans le cadre d’un règlement amiable, la seule alternative prend la forme d’une action judiciaire.

Cette dernière peut être introduite par le syndicat des copropriétaires. L’objet du syndicat consiste dans l’administration des parties communes et dans le respect du règlement de copropriété, qui définit les parties communes et les parties privatives.

Dans ce cas, le syndic doit bénéficier d’une habilitation de l’assemblée générale consentie à la majorité de l’article 24 de la loi du 10 juillet 1965 (article 55 du décret du 17 mars 1967).

Cette action peut aussi être engagée par le propriétaire d’un lot qui doit pouvoir également utiliser cette partie commune. Cette occupation exclusive par un copropriétaire s’analyse en une dépossession d’un bien immobilier lui appartenant ainsi qu’à d’autres ou tous les autres copropriétaires.

Ce copropriétaire peut, dans la même procédure, assigner le syndicat des copropriétaires pour n’avoir pas fait cesser ce trouble de jouissance et rechercher sa responsabilité civile si cela lui cause un préjudice.

II. Délai de prescription de l’action judiciaire

Une telle action est possible dans le cadre de délais fixés par la loi.

Les travaux illicites (sans l’aval de l’assemblée générale) réalisé par un propriétaire peuvent avoir des conséquences différentes, qui conditionnent les délais de prescriptions pour engager une action en vue de leur suppression.

D’une part, si ce sont de simples aménagements (remplacement de la fenêtre de son lot par un autre modèle, de sa porte palière par un modèle divergent de la référence collective, destruction d’un mur porteur…), la procédure se prescrit désormais dans un délai de 5 ans (depuis la loi ELAN du 23 octobre 2018, 10 ans sous l’ancien régime juridique) à compter de leur exécution (article 42 de la loi du 10 juillet 1965).

D’autre part, si ce sont des opérations permettant ou représentant une appropriation des parties communes (par exemple : la construction d’un mur pour annexer une fraction du couloir à son lot), la poursuite se prescrit dans ce cas par 30 ans (article 2272 du Code civil). Nous sommes alors dans le cadre d’une action réelle, car elle porte sur le droit de propriété d’un bien immobilier.

Dans une résidence en copropriété nancéenne (54), les propriétaires d’un lot intègrent illégalement un tronçon de couloir à leur lot par l’édification d’un mur, et empêchent le propriétaire d’un autre lot d’avoir accès à ce couloir.

Face au laxisme du syndicat, le propriétaire du lot lésé assigne la copropriété ainsi que les contrevenants en restitution des parties communes et en indemnisation de son préjudice personnel.

La Cour d’appel de Nancy rejette cette demande au motif qu’elle serait soumise au délai de 10 ans et donc prescrite.

La Cour de cassation n’analyse pas cette affaire de la même manière, dans son arrêt n° 18-19172 du 24 octobre 2019 :

« […] Attendu que, pour déclarer irrecevable, comme prescrite, l'action de M. N..., l'arrêt retient que celle-ci ne tend pas à la revendication des parties communes, mais à contraindre M. et Mme M... à mettre fin au trouble résultant de cette occupation et à libérer ces parties communes, de sorte qu'il ne s'agit pas d'une action réelle et qu'elle est en conséquence soumise à la prescription décennale ;

Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si l'annexion au lot de M. et Mme M... du fond du couloir du rez-de-chaussée de l'immeuble ne caractérisait pas un acte d'appropriation d'une partie commune, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision [] ».

Cet arrêt de la Cour de cassation s’inscrit dans sa jurisprudence constante, soulignant la distinction de travaux privatifs illicites affectant les parties communes constituant de simples aménagements de ceux représentant une appropriation et de la prescription applicable à l’action judiciaire en suppression de ceux-ci.

Cette action peut être engagée aussi bien collectivement par le syndicat, représenté par son syndic, qu’individuellement par le propriétaire d’un lot dans la résidence concernée.

Le syndic ne peut pas payer des factures après la fin de son mandat

Catégories Missions du syndic Comptabilité
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
16 octobre 2013 (12-20.881)
Observations

Condamnation du cabinet SERGIC. 

 

Principe retenu

Le syndic dont le mandat a expiré ne peut plus payer les factures

Analyse de la décision

La société SERGIC n’avait pas été renouvelée dans son mandat par une copropriété mécontente (on se demande bien pourquoi...).

Malgré cela, SERGIC avait perçu une indemnité d’assurance après la fin de son mandat (donc hors mandat) et payé des factures d’ailleurs contestées par le syndicat, ceci à hauteur de 1.960,80 €, intégrant des factures d’honoraires.

SERGIC avait donc rendu un chèque au syndicat égal à l’indemnité diminuée des 1.900,80 €.

Un premier juge de proximité avait estimé que :

« La société SERGIC a été contrainte de continuer la gestion des affaires courantes pour le compte de la copropriété au titre de la gestion d’affaires et qu’elle se trouvait d'ailleurs dans la même situation que si elle avait reçu un mandat exprès ».

En gros, selon le juge de proximité : un syndic peut faire ce qu’il veut même s’il n’est plus syndic.

C’est ce jugement qui a été cassé par la Cour de cassation qui précise :

« Vu l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965 ensemble l’article 1372 du Code civil ;

Il apparaît qu’en statuant ainsi, alors que le mandat du syndic est exclusif de l’application des règles de la gestion d’affaires, la juridiction de proximité a violé les textes susvisés ; par ces motifs : casse ».

La conséquence - très intéressante pour tous les copropriétaires dont les anciens syndics continuent à faire des règlements, voire à SE faire des règlements - est qu’un syndic dont le mandat est expiré ne peut plus effectuer des paiements (y compris à lui-même). À défaut, il devra rembourser.

Mots clés associés

L’action qui tend à obtenir une remise en état après un acte d’appropriation des parties communes est une action réelle qui se prescrit par 30 ans

Catégories Prescription Non-respect du règlement de copropriété
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
11 janvier 1989 (87-13.605)
Observations

Jurisprudence constante, pour un autre arrêt en ce sens : 

L'action en restitution d'une partie commune appropriée illégalement appartient à tout copropriétaire et se prescrit par 30 ans civ.24 octobre 2019 (18-1972)

Principe retenu

En cas d'appropriation d'une partie commune, le délai d'action judiciaire est de 30 ans. 

Analyse de la décision

Le délai de 30 ans concerne les actions réelles, c’est-à-dire portant sur une chose, tandis que le délai de droit commun de 5 ans concerne les actions dites personnelles, c’est-à-dire les actions tendant à faire reconnaître un droit d’une personne contre une autre (on parle aussi de droit de créance).

Les actions personnelles concernent les actions entre le syndicat des copropriétaires et un copropriétaire (ou plusieurs), ou entre des copropriétaires entre eux, par exemple en matière de recouvrement de charges, d’actions en responsabilité…

L’action d’un syndicat de copropriétaire qui tend à faire cesser une emprise sur une partie commune et à faire condamner un copropriétaire à remettre en état les lieux concerne un droit réel du syndicat sur ce bien. Il peut donc agir dans le délai trentenaire.

L’ouverture par un copropriétaire d’un mur « partie commune » constitue une appropriation : le délai pour engager l’action judiciaire de remise en état est de 30 ans

Catégories Prescription Non-respect du règlement de copropriété
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
16 décembre 2014 (13-25.024)
Observations

Jurisprudence constante.

Il est mentionné un délai de prescription pour les actions personnelles de 10 ans, les faits ayant eu lieu avant le 25 novembre 2018.

Notons que depuis l'entrée en vigueur de la loi ELAN (soit le 25 novembre 2018) le délai de prescription pour les actions personnelles est de 5 ans. 

Principe retenu

L'ouverture par un copropriétaire d'un mur "partie commune" est une appropriation de cette partie et l'action judiciaire se prescrit par trente ans. 

Analyse de la décision

Nous sommes dans le cadre d’une copropriété composée de deux bâtiments, les bâtiments A et B, séparés par un mur mitoyen. Ce mur est qualifié de partie commune par le règlement de copropriété.  

Un copropriétaire, la SCI V. est copropriétaire de plusieurs lots, deux lots dans le bâtiment A et un troisième lot, dans le bâtiment B. Depuis l’origine, les lots n° 159 et 160 du bâtiment A sont référencés à usage commercial dans le règlement de copropriété (ils sont utilisés pour une activité de restauration). Le lot situé dans le bâtiment B est à usage d’habitation.  

À une date indéterminée (il y a plus de dix ans), le mur séparatif entre les deux bâtiments a été percé et le lot du bâtiment B (à usage d’habitation), a été transformé en cuisine pour les besoins de l’activité de restauration des locaux commerciaux du bâtiment A. De nombreuses années après le percement du mur, les copropriétaires d’un autre lot, situé dans le bâtiment B, ont assigné la SCI V. et ont demandé, entre autres, la remise en état des lieux.  

Ces copropriétaires, demandeurs à l’action, motivent leur demande en invoquant le fait que le mur est qualifié de partie commune dans le règlement de copropriété. La SCI fait valoir qu’on ne pouvait plus engager d’action, puisque le délai de prescription de 10 ans prévu par l’article 42, alinéa 1 de la loi du 10 juillet 1965 est écoulé. Les copropriétaires qui ont engagé l’action invoquent de leur côté que ce n’est pas la prescription de 10 ans qu’il faut retenir, mais la prescription trentenaire, dans la mesure où il ne s’agit pas d’une action personnelle (délai de 10 ans), mais d’une action réelle (30 ans).

Tout le monde s’accorde à dire que l’ouverture du mur constitue bien des travaux, mais la question est de savoir s’il s’agit de travaux privatifs affectant les parties communes ou, au contraire, si la nature et l’étendue de ces travaux est telle, qu’ils constituent une appropriation de parties communes.    

Deux interprétations sont, à priori, possibles :  

  • 1ère lecture :

Les travaux affectent simplement une partie commune. Le copropriétaire, en l’occurrence, la SCI, aurait dû demander, préalablement à la réalisation des travaux, l’autorisation de l’assemblée générale, conformément à l’article 25 b) de la loi du 10 juillet 1965 (« Autorisation donnée à M. et Mme… d’effectuer les travaux de percement du mur… »).  

À défaut de demande d’autorisation, en cas de contestation, on pourrait considérer qu’il s’agit d’une action personnelle dont l’action se prescrit par 10 ans (c’est ce que la SCI  prétendait).  

  • 2ème lecture :

Le mur constitue une partie commune. Il est expressément qualifié ainsi dans le règlement de copropriété. Selon cette seconde lecture, l’ouverture ne constitue pas de « simples » travaux affectant les parties communes, mais une véritable appropriation desdites parties communes.

L’action est donc une action réelle, se prescrivant par 30 ans.  

La Cour de cassation a opté pour la seconde interprétation. Elle a considéré que les travaux en cause ne sont pas de simples travaux qui affectent les parties communes, mais équivalaient à une appropriation puisqu’une partie de la structure a été détruite et le volume correspondant a été récupéré par la SCI V.  

La Cour de cassation, considérant qu’il s’agissait d’une action réelle, a retenu le principe de la prescription trentenaire.   La SCI V. a été condamnée à restituer le mur, partie commune, c’est-à-dire à reboucher l’ouverture réalisée.

II. Distinction entre action personnelle et action réelle

Après lecture attentive de l’arrêt de la Cour de Cassation, celle-ci semble être plus subtile puisqu’elle opère la distinction entre :  

  • action personnelle : il y a bien violation d’une clause du règlement, mais les travaux réalisés n’affectent pas de manière définitive les parties communes : à défaut d’autorisation de l’assemblée, l’action tendant à solliciter la remise en état se prescrit alors par 10 ans ;

 

  • action réelle (= action qui s’attache à une chose) : même hypothèse : les travaux sont irréguliers pour défaut d’autorisation préalable du syndicat, mais l’atteinte aux parties communes est clairement identifiée à partir du moment où le règlement qualifie expressément les parties communes concernées et affectées (ex : sont qualifiées de parties communes : la totalité du sol, des cours et des jardins, les fondations, les gros murs des façades, des pignons et des mitoyennetés, les murs de refend, tous murs et cloisons parcourus par des conduits ou canalisations servant à plusieurs copropriétaires, l'ossature en maçonnerie ou en béton armé …).

          Il s’agit d’une atteinte à une partie commune expressément qualifiée, l’action vise à récupérer ces parties communes le délai d’action est donc de 30 ans. C’est bien parce que « la transformation litigieuse s’est effectuée en ménageant une ouverture dans le mur séparatif entre le bâtiment A et B, lequel selon le règlement de copropriété constituant une partie commune, qu’il s’agit d’une action touchant sur la « chose » (= la partie commune dûment qualifiée).

D’ailleurs, la Cour précise bien pour terminer que « l’action tendait donc à restituer des parties communes et non pas uniquement à sanctionner la méconnaissance du règlement de copropriété ».   

Installation d’un ballon d’eau chaude privatif dans les combles, parties communes peut s’analyser en un droit de jouissance exclusif de celles-ci au profit d’un lot et relever en conséquence de la double majorité de l’article 26

Catégories Ordre du jour Travaux privatif affectant les parties communes
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
26 mars 2020 (19-10210)
Observations

Jurisprudence constante. 

Principe retenu

Lorsqu'un copropriétaire souhaite installer un équipement privatif dans les parties communes cela s'apparente à accorder un droit de jouissance privatif. 

Analyse de la décision

Le syndicat est régulièrement confronté à des sollicitations individuelles de travaux sur les parties communes par un copropriétaire.

Le syndicat se doit dans ce cas, d’identifier précisément le droit envisagé au profit du demandeur. En cas de qualification erronée, la résolution de l’assemblée générale illicite s’expose à une action judiciaire en annulation de la part de tout copropriétaire opposant ou défaillant, comme le rappelle la cour de cassation dans un récent arrêt du 26 mars 2020.

I. Ballon d’eau privatif dans les combles parties communes : autorisation de l’assemblée générale impérative

En l’espèce, une résidence en copropriété située dans le 10ème arrondissement de Paris est composée de plusieurs bâtiments, de 5 étages, ainsi que des combles parties communes au 6ème et dernier étage.

Les détenteurs d’un lot n° 13 se trouvant dans le bâtiment A au 5ème étage souhaitent installer dans les combles un ballon d’eau chaude privatif.

Dans la mesure où l’aménagement escompté affecte les parties communes, ils doivent requérir l’autorisation de l’organe décisionnaire du syndicat des copropriétaires, son assemblée générale (art. 17 de la loi du 10 juillet 1965).

Ils obtiennent l’aval de la collectivité moyennant par une résolution n° 21 d’une assemblée générale du 31 janvier 2013, soumise à la majorité des voix du syndicat des copropriétaires, dans la mesure où ils assimilent l’opération envisagée aux travaux affectant les parties communes (prévus par l’alinéa b de l’article 25 de la loi du 10 juillet 1965).

Un couple de propriétaires défaillants (absents non représentés à l’assemblée générale) contestent la régularité des diverses décisions dont la numéro 21 relative à la pose du ballon d’eau chaude dans les combles parties communes au bénéfice du lot n° 13 et sollicitent en conséquence leur nullité en assignant le 9 avril 2013 le syndicat, représenté par le syndic, auprès du T.G.I. de Paris.

Le jugement n° 13 - 05302 du 3 juillet 2015 de cette juridiction rejette cette requête, confirmé par un arrêt n° 15 - 16794 de la cour d’appel de Paris du 13 décembre 2017.

Ces deux propriétaires décident alors de se pourvoir en cassation.

II. Ballon d’eau chaude privatif dans les combles parties communes : majorité requise de l’assemblée générale

Le couple de propriétaires défaillants soulève devant la cour de cassation le même argumentaire juridique. Ils considèrent notamment que la résolution n° 21 de l’assemblée générale est illégale, en raison d’une qualification erronée de la demande du propriétaire aboutissant à l’application d’une majorité inexacte.

En effet, la requête du propriétaire ne se résume pas selon eux à une simple autorisation de travaux affectant les parties communes relevant effectivement de la majorité de l’article 25 de la loi du 10 juillet 1965, mais à un droit de jouissance exclusif de celles-ci (combles) au profit de son lot correspondant à un acte de disposition soumis dans ce cas à la double majorité de l’article 26 de la même loi.

Dans son arrêt n° 19 - 102010 du 26 mars 2020, les juges n’ont d’autre choix que de faire droit à ce recours par une interprétation littérale de la décision n° 21 de l’assemblée générale, fondée sur une confusion juridique manifeste du syndicat au profit des propriétaires du lot n° 13 du 5ème étage du bâtiment A quant à la fixation de leur ballon d’eau chaude privatif dans les combles parties communes : " …Qu'en statuant ainsi, alors que la décision n° 21 prise lors de l'assemblée générale du 31 janvier 2013 accordait, aux deux copropriétaires qui avaient sollicité cette délibération, la jouissance exclusive des combles situés au-dessus du lot 13, ce dont il résultait que la décision devait être prise à la majorité prévue à l'article 26 de la loi précitée, la cour d'appel, qui a dénaturé le procès-verbal d'assemblée générale, a violé les textes et le principe susvisés ;"

Le président de séance, sur les éventuelles recommandations du syndic, se doit de procéder à une juste qualification juridique des questions inscrites à l’ordre du jour de l’assemblée générale, afin de déterminer avec exactitude la majorité appropriée pour leur adoption.

A défaut, la résolution entérinée encourt une action légitime en nullité introduite par tout copropriétaire opposant ou défaillant, en principe dans le délai de deux mois suivant la notification de son procès-verbal par le syndic.  

Dépassement de budget : la Cour de Cassation vole enfin au secours des copropriétaires et sanctionne les syndics

Catégories Inexécution ou mauvaise exécution du mandat de syndic / responsabilité du syndic Comptabilité
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
07 février 2012 (11-11.051)
Observations

Arrêt révolutionnaire. 

Principe retenu

Le syndic peut être tenu pour responsable en cas de dépassement d'un budget voté pour la réalisation de travaux. 

Analyse de la décision

I. Les copropriétaires face à la toute puissance des syndics

Nous le disons et le redisons : l’une des plaies majeures de la copropriété vient de ce que les syndics ne sont pratiquement JAMAIS sanctionnés pour leurs fautes parce qu’ils arrivent, quatre vingt dix fois sur cent, à faire ratifier celles-ci par des assemblées générales dans lesquelles chacun sait à quel point il est facile de faire pression et - à défaut - d’exercer des manipulations (pouvoirs, mandats de gestion, complicité de certains, passivité des autres, isolement de quelques « combatifs »).

II. Un arrêt de la Cour de Cassation qui va remettre de l’ordre

En effet, la Cour de Cassation vient remettre un peu d’ordre dans cette situation inadmissible où le droit n’existe plus et où le syndic tout puissant fait sa loi.

En l’espèce, un syndic du Groupe Foncia avait cru bon de commander pour 33 570,10 euros de travaux d’ascenseurs, en exécution d'une décision d'assemblée générale ayant voté les travaux, de manière peu claire au demeurant, pour la somme de 23 100 euros.

Le copropriétaire plaignant réclamait la somme de 853,31 €, soit sa quote-part de la différence.

Or la Cour de Cassation vient de décider le 7 février 2012, ce qui est une révolution dans le petit monde de la copropriété, que « le syndic est responsable, à l'égard des copropriétaires, sur le fondement quasi délictuel, de la faute qu'il a commise dans l'accomplissement de sa mission », et peut donc devoir réparation à l’égard de chaque copropriétaire du préjudice subi par le dépassement d’un budget voté.

Ainsi, la Cour de cassation a écarté l’objection de l’absence de lien contractuel entre le syndic et chacun des copropriétaires individuels : le préjudice individuel ne s’efface pas devant le préjudice collectif non revendiqué.

La lecture de l’arrêt (pas très long) est extrêmement intéressante, car il rappelle quelques notions un peu tombées en désuétude, telles que l’obligation de réparation d’un préjudice même individuel, le devoir de conseil du syndic, la déontologie des syndics, la rigueur de rédaction des résolutions, l’entretien, la sauvegarde et l’urgence.

III. Au-delà du problème des travaux, celui du dépassement des budgets

En ce qui concerne les dépassements budgétaires, que remarquons-nous ?

Il suffit aux syndics soit de faire entériner leur mauvaise gestion par une assemblée générale manipulée soit carrément de mépriser ladite assemblée en répartissant les comptes sans approbation.

Nos contrôleurs de comptes et de gestion, qui assistent les conseils syndicaux motivés pour contrôler les comptes de leurs copropriétés, le dénoncent régulièrement.

Là encore l’arrêt du 7 février 2012 pourrait rappeler aux syndics leur DEVOIR, en particulier celui de RESPECTER le budget voté et de ne le dépasser que pour des raisons LÉGITIMES.

Ainsi, l’époque du profond mépris des syndics professionnels à l’égard des copropriétaires quand il leur est présenté des comptes avec des déficits importants est sans doute révolue : désormais, n’importe quel copropriétaire insensible aux raisons exposées pour justifier ce qui n’est rien d’autre qu’avoir outrepassé le mandat reçu, pourra demander au syndic d’assumer sa faute de gestion.

Et comme les syndics professionnels ne sont sensibles qu’à ce qui leur coûte, on peut penser que désormais les gestionnaires auront pour consigne de faire très attention au respect des budgets votés…

En conclusion, si votre syndic adore dépasser les budgets votés (de travaux ou d’opérations courantes), faites-lui lire cette décision de Cassation