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Le mandat ne vaut que pour les questions inscrites à l’ordre du jour de l’assemblée générale

Catégories Tenue de l'assemblée générale
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
08 septembre 2016 (15-23.422)
Observations

Arrêt important. 

Principe retenu

Lorsqu'un copropriétaire donne un pouvoir à un tiers de le représenter pour l'assemblée générale, ce pouvoir ne vaut que pour les décisions préalablement inscrites à l'ordre du jour. 

Analyse de la décision

La Cour de Cassation, en date du 8 septembre 2016 (n° 15 - 23422), a rendu un arrêt important.

Celui-ci porte sur la tenue de l’assemblée générale et présente un double intérêt, tout en rappelant une jurisprudence constante en la matière : 

  • régularité des délibérations au regard de l’ordre du jour figurant dans la convocation ;
  • capacité de vote pour le mandataire et pouvoir du mandant de contester une résolution adoptée, mais irrégulière.

Les faits

Les copropriétaires d’un local commercial d’un immeuble parisien reçoivent la convocation de l’assemblée générale du syndicat avec un ordre du jour, bien sûr, déterminé.

Ne pouvant y assister, ils souhaitent malgré tout participer et donnent mandat pour y être représenté.

Cependant, à réception du procès-verbal, ils constatent que l’ordre du jour a été complété après sa notification et qu’au surplus, leur mandataire a voté favorablement pour la résolution ajoutée illégalement au cours de l’assemblée.

Ils décident alors d’engager une action judiciaire en nullité de la résolution litigieuse, au motif que :

  • l’ordre du jour ne peut être complété, dès lors que le délai de 21 jours (article 9 du décret du 17 mars 1967) est entamé ;
  • le mandat qu’ils avaient remis à leur mandataire ne valait que pour l’ordre du jour notifié régulièrement aux copropriétaires et qu’en conséquence, ils n’étaient pas liés par le vote de leur mandataire à l’égard du syndicat sur la question ajoutée au cours de l’assemblée générale.

Compte tenu de ces irrégularités manifestes, ils se retrouvaient, en regard de cette résolution, qualifiés de « copropriétaires défaillants », c’est-à-dire absents (et non représentés), et ils retrouvaient ainsi la capacité de contester judiciairement cette résolution !

La décision de la Cour de Cassation

La 3ème chambre civile de la Cour de Cassation a fait droit à la demande de ces copropriétaires :

"Attendu que la convocation contient l’ordre du jour, qui précise chacune des questions soumises à la délibération de l’assemblée générale ; qu’un mandat ne peut porter que sur les questions figurant à l’ordre du jour….

Attendu que pour déclarer la demande irrecevable, l’arrêt retient que la résolution contestée par les consorts L., qui ont été régulièrement représentés, a été votée à l’unanimité des copropriétaires et, que l’action prévue par l’article 42 (de la loi du 10 juillet 1965) n’est pas ouverte aux copropriétaires ayant voté, par le truchement de leur mandataire, en faveur de la résolution contestée ;

Qu’en statuant ainsi, alors qu’elle avait constaté que le mandataire avait voté sur une question ne figurant pas à l’ordre du jour, la Cour d’Appel a violé les textes susvisés ;"

Conclusion et conseils

Cet arrêt vient utilement rappeler les obligations respectives :

  • au mandataire à l’égard de son mandant : il ne peut aller au-delà de ce que le titulaire dispose comme droit ;
  • du syndicat vis-à-vis des copropriétaires : plus précisément dans ce dernier cas il s’agit du rôle majeur du président de séance, sans bien sûr oublier l’obligation de conseil de la part du syndic professionnel !

En effet, c’est au président que revient la charge d’une tenue régulière de l’assemblée générale du syndicat (article 15 du décret du 17 mars 1967).

Il ne doit donc, ni de son chef, ni sur demande d’un copropriétaire, ajouter une résolution à l’ordre du jour, et prendre encore plus de précautions dès lors que ce ne sont pas les copropriétaires en personne qui sont présents à cette assemblée.

Le pouvoir donné par un copropriétaire absent à l’assemblée générale doit être signé

Catégories Tenue de l'assemblée générale
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
13 septembre 2018 (17-23.292)
Observations

Par cet arrêt, la Cour de cassation pose un principe important relatif à la délégation de pouvoirs. 

Principe retenu

Une délégation de pouvoir doit être signée, sinon l'assemblée générale encourt la nullité. 

Analyse de la décision

Le déroulement et la tenue de l’assemblée générale doivent respecter des règles précisées dans le décret du 17 mars 1967.

En fonction de la taille de la copropriété, des horaires de convocation et de la durée de l’assemblée, le bureau auquel participe généralement le syndic en tant que secrétaire peut se heurter à des approximations notamment au regard de la comptabilisation des mandats des copropriétaires absents et représentés.

Ces errances ne sont pas anodines pour l’assemblée générale, comme le souligne la Cour de cassation dans son arrêt du 13 septembre 2018 (17-23292)

I. Feuille de présence : objet et modalités d’établissement

L’article 14 du décret du 17 mars 1967 dispose qu’une feuille de présence à l’assemblée générale doit être établie avant le commencement de la réunion et certifiée exacte et signée en fin de séance par le président.

Ce document atteste des copropriétaires présents ou représentés à cette réunion du syndicat, c’est donc un moyen de preuve.

Il constitue à ce titre une annexe de l’original du procès-verbal de l’assemblée générale rédigé par le secrétaire en fin de séance, paraphé et signé par le bureau.

Ce formulaire doit contenir le nom, le nombre de voix, l’adresse du propriétaire du lot, ou en cas de représentation celle de son mandataire et doit être signé par la personne présente à cette réunion du syndicat.

Le syndic, chargé en principe de la conservation des archives du syndicat des copropriétaires, doit conserver l’original du procès-verbal avec ses annexes, autrement dit la feuille de présence et les pouvoirs des copropriétaires absents et représentés.

II. L’importance des pouvoirs qui accompagnent la feuille de présence

Dans la pratique, des erreurs et omissions peuvent exister, en raison des mouvements des copropriétaires (arrivée tardive, départ prématuré), mais également des carences du bureau, président mal informé par le syndic en exercice qui assure généralement le secrétariat et détient les moyens informatiques permettant les décomptes des votes.

A l’issue de l’assemblée générale, et à tout moment, tout copropriétaire peut requérir du syndic, la copie de l’original du procès-verbal de l’assemblée générale et de ses annexes (article 33 du décret du 17 mars 1967).

En l’espèce, une copropriété a tenu son assemblée générale annuelle le 14 mai 2013.

Un couple de copropriétaires opposants exige ensuite du syndic les annexes du procès-verbal de l’assemblée générale.

Ils décident d’engager une action judiciaire en annulation de cette assemblée dans son ensemble en s’appuyant sur un grand nombre d’éléments qu’ils considèrent comme irréguliers.

Entre autre, ils évoquent des irrégularités concernant la feuille de présence et le décompte des voix des copropriétaires présents.

Plusieurs causes sont invoquées :

  • un copropriétaire qui n’a pas signé la feuille de présence n’est pas mentionné comme absent dans le procès verbal,
  • mention sur la liste des absents d’une personne qui ne fait pas partie de la copropriété,
  • arrivée en cours d’assemblée d’un copropriétaire mentionné comme présent dès le commencement, 
  • pouvoir enregistré alors qu’il n’était pas signé par le mandant.

Le Tribunal de Grande Instance de Créteil et la Cour d’appel de Paris dans sa décision n°15 - 10689 du 14 juin 2017, rejettent cette action en considérant que ces approximations étaient accessoires et se révélaient sans impact sur les résolutions de l’assemblée générale (majorités acquises et procès-verbal permettant de pallier les carences de la feuille de présence).

Ces deux copropriétaires se pourvoient en cassation.

La Cour de cassation dans son arrêt n°17 - 23292 du 13 septembre 2018 infirme partiellement la décision de la Cour d’appel en s’appuyant sur une irrégularité qui entachait la feuille de présence :

«…Attendu que, pour rejeter la demande en annulation de l'assemblée générale, l'arrêt retient que la feuille de présence est affectée d'erreurs matérielles sans conséquence sur la validité de l'assemblée générale ;

Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions des consorts Z... qui soutenaient que l'assemblée générale était nulle en raison du défaut de signature de M. et Mme Y... sur le pouvoir donné par eux, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE… ».

Cette décision est très claire.

Une délégation de pouvoir à l’assemblée générale doit être signée, cette signature atteste de la réalité du mandat.

Un mandat en blanc signé est régulier ; un mandat comportant le nom du mandataire même écrit de manière manuscrite mais non signé ne l’est pas.

Le président de séance doit être implacable lors du contrôle des mandats des copropriétaires absents et représentés et de leur prise en compte, afin de ne pas exposer le syndicat à une action judiciaire en nullité.

La loi ELAN a précisé l’article 22 de la loi du 10 juillet 1965 concernant la répartition des pouvoirs donnés par des copropriétaires absents.

Depuis le 25 novembre 2018, lorsque le syndic a reçu des mandats sans indication de mandataire, « il ne peut ni les conserver pour voter en son nom, ni les distribuer lui-même aux mandataires qu'il choisit ».

Le président de l’assemblée générale doit donc aussi maintenant s’assurer de la manière dont le syndic aurait distribué les pouvoirs en blanc reçus par ses soins.

 

Feuille de présence complète avec adresses : « aucune confidentialité ne peut être opposée » dit (elle aussi) la cour d’appel de Rennes

Catégories Tenue de l'assemblée générale
Juridiction
Cour d'appel de Rennes
Référence
06 juin 2013 (11/07662)
Observations

C'est un long combat que d'obtenir la feuille de présence en son intégralité. Ici un arrêt de la Cour d'appel de 2013 de Rennes qui établit un principe repris par toutes les juridictions. 

Ceci étant, les syndics ne semblent toujours pas entendre raison en 2021, invoquant toujours des arguments basés sur la confidentialité ou le respect des données personnelles, comme l'atteste un arrêt du Tribunal judiciaire de Paris du 24 février 2020. 

Principe retenu

La feuille de présence doit être communiquée intégralement avec les adresses des copropriétaires. La confidentialité ne saurait être invoquée pour refuser la communication de ce document. 

Analyse de la décision

  I - La communication de la feuille de présence.  

Comment faire pour informer les copropriétaires bailleurs de ce qui se passe vraiment dans votre copropriété et surtout pour ceux qui ont confié la gestion de leur logement au syndic en place ?  

Tout simplement en leur adressant un courrier.   Oui, mais comment obtenir leurs adresses ?   C’est (en principe) simple : en demandant copie de la feuille de présence (avec les adresses, ce qui est obligatoire) à votre syndic.   Mais il est possible que votre syndic n’ait aucune envie d’une part que vous constatiez que sa feuille de présence est incomplète, d’autre part que vous contactiez ses clients « bailleurs ».

Dans ce cas il vous oppose 3 fois sur 4 la « confidentialité » à laquelle – soi-disant - il est astreint.   Baliverne maintes fois dénoncée sur notre site.  La cour d’appel de Rennes se joint une fois de plus à nous dans des termes très clairs.   

II - Un arrêt très, très limpide  

Rennes, comme on sait, est avec Grenoble la ville qui a « inventé » la copropriété.  Autant dire que les magistrats de Rennes s’y connaissent et qu’on ne leur fait pas prendre la loi de 1965 pour un tract publicitaire.   La cour d’appel de Rennes vient ainsi de confirmer ce que les dirigeants de Nexity (pour ne parler que d’eux - voir abus n° 3573 : www.unarc.fr/npp4) font mine de ne pas savoir que la feuille de présence doit être fournie AVEC les adresses.  

Citons l’extrait de l’arrêt de la cour d’appel de Rennes à ce sujet, à diffuser à tous les syndics un peu durs d’oreille : «  4ème Chambre ARRÊT N° 279 R.G : 11/07662 COUR D’APPEL DE RENNES ARRÊT DU 06 JUIN 2013 »   « Monsieur et Madame C…, copropriétaires, ont régulièrement sollicité de Mademoiselle P…, syndic, la communication de la feuille de présence de l’assemblée du … par lettre des … et par lettre du … ».   Mademoiselle P…, qui est également agent immobilier soutient que la communication des adresses de copropriétaires constitue une divulgation des coordonnées des personnes qui constituent son fonds de commerce.  

 D’une part, il ne résulte pas des dispositions du décret susvisé que les copropriétaires doivent justifier des motifs de leur demande.  D’autre part, la totalité des copropriétaires étant soumis aux dispositions qui prévoient que la feuille de présence comporte l’indication de leur domicile, il ne peut être utilement invoqué que cette communication porte atteinte à leur vie privée, nonobstant la circonstance qu’ils soient client du syndic, à l’occasion d’une autre activité de ce dernier.   

En conséquence, le refus opposé par Mademoiselle P… ne se heurte à aucune contestation sérieuse il lui sera ordonné, dans un délai d’un mois à compter de la signification du présent arrêt, sous astreinte de 100 €uros par jour de retard passé ce délai d’un mois à communiquer aux consorts C… la copie conforme de la feuille de présence et des pouvoirs annexés au procès verbal de l’assemblée générale tenue le 20 août 2010 ». 

 Rappelez-vous : la feuille de présence doit comporter l’adresse des copropriétaires et non celles des syndics ou agents immobiliers qui gèrent leurs biens locatifs.  

Mots clés associés

La feuille de présence peut parfois pallier les omissions du procès-verbal de l’assemblée générale

Catégories Procès-verbal Tenue de l'assemblée générale
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
11 juillet 2019 (18-18.615)
Observations

Cet arrêt confirme la jurisprudence antérieure concernant des carences du procès-verbal. 

Principe retenu

Ainsi en matière d'omission de mention sur le procès-verbal du nom des opposants. Cette omission peut être compensée par la feuille de présence. 

Analyse de la décision

La tenue de l’assemblée générale et les mentions reprises dans le procès-verbal sont soumises à des règles édictées par la loi du 10 juillet 1965 et le décret du 17 mars 1967.

Le non-respect de ces règles peut permettre d’obtenir, par voie judiciaire, la nullité de l’assemblée générale ou simplement de certaines résolutions. Les juges ont cependant la possibilité d’interpréter les textes et de ne pas les appliquer littéralement, comme le prouve un arrêt de la Cour de cassation du 11 juillet 2019.

I. Procès-verbal de l’assemblée générale : mentions obligatoires et incidence en cas d’irrégularités

L’article 17 du décret du 17 mars 1967 dispose, que la régularité du procès-verbal de  l’assemblée générale suppose qu’il soit établi en fin de séance par le secrétaire de séance, paraphé et signé par ses soins, le président et les éventuels scrutateurs.

Il impose aussi certaines mentions : « Le procès-verbal comporte, sous l'intitulé de chaque question inscrite à l'ordre du jour, le résultat du vote. Il précise les noms des copropriétaires ou associés qui se sont opposés à la décision et leur nombre de voix, ainsi que les noms des copropriétaires ou associés qui se sont abstenus et leur nombre de voix. »

Sous la résolution doivent aussi être consignées les éventuelles réserves quant à la régularité de la résolution formulées par les opposants.

Préciser le nom des opposants à une résolution permet au juge d’identifier les copropriétaires qui peuvent agir en nullité contre une résolution de l’assemblée générale, conformément à l’article 42 de la loi du 10 juillet 1965.

Cette procédure judiciaire doit être engagée dans le délai de deux mois suivant la notification de son procès-verbal par le syndic.

II. L’omission d’une mention peut être suppléée par la feuille de présence

Nul ne doit cependant ignorer que la loi énonce quelque fois un principe, qui peut être suivi par des exceptions. 

La première source peut être le texte légal lui-même, dont les conditions se trouvent souvent détaillées dans un décret d’application.

La seconde source est la jurisprudence civile, à savoir les décisions rendues par les juridictions (Cour d’appel et surtout Cour de cassation), qui peuvent préciser le sens de dispositions ambiguës ou dégager des règles pas forcément inscrites dans les textes, mais qui proviennent de leur interprétation.

Ainsi, des copropriétaires d’une résidence nîmoise contestent plusieurs points de l’assemblée générale du 3 septembre 2015, aux motifs que le nom des copropriétaires opposants n’étaient pas consigné sous les résolutions.

La Cour de cassation dans son arrêt n° 18-18615 du 11 juillet 2019 confirme une jurisprudence constante en la matière, à savoir que les carences du procès-verbal n’invalident pas de facto les résolutions litigieuses, voire l’assemblée générale dans son ensemble, si ces manquements peuvent être incontestablement complétés par sa principale annexe, la feuille de présence :

« […] Mais attendu qu'ayant retenu que l'absence de mention sur le procès-verbal du nom du copropriétaire ayant voté contre la résolution soumise au vote était sans incidence sur la régularité du vote, dès lors que ce copropriétaire était identifiable et constaté que le rapprochement, d'une part, du procès-verbal et de la feuille de présence, d'autre part, des votes émis contre les résolutions 4.1 et 4.2 permettait d'identifier le seul copropriétaire détenteur des 919 voix exprimées contre la résolution 4.1 et pour la résolution 4.2, la cour d'appel a pu en déduire qu'il n'y avait pas lieu à annulation de la décision n° 4 […] »

Les mentions de la feuille de présence doivent être non équivoques, et donc incontestables pour être retenues par les juges.

Si le droit de la copropriété apparaît fréquemment trop rigide, les copropriétaires ne doivent néanmoins pas minorer l’influence de la jurisprudence lorsqu’ils entendent contester judiciairement une résolution.

La Cour de Cassation avec l’ARC : un gardien ou un employé d’immeuble sont bien des « préposés » du syndic et donc ne peut peuvent détenir des pouvoirs en assemblée générale

Catégories Tenue de l'assemblée générale Contrat du personnel du syndicat des copropriétaires
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
07 mai 2014 (13-11.743)
Observations

Cet arrêt est important et était attendu ! Désormais plus aucun doute n'est permis quant à la possibilité pour un gardien de recevoir une délégation de pouvoir. 

Principe retenu

Le gardien ou l'employé d'immeuble sont des "préposés" du syndic et ne peuvent recevoir de mandat de pouvoir. 

Analyse de la décision

Nous l’avions déjà expliqué après la promulgation de la loi ALUR du 24 mars 2014 et la Cour de Cassation vient de le confirmer (7 mai 2014 3ème chambre civile, numéro 13-11.743) : « Les gardiens et employés d’immeuble sont des préposés du syndic et à ce titre ne peuvent pas détenir de pouvoir en assemblée générale ».

 I. Rappel de la loi

Comme chacun sait, les copropriétaires ont la possibilité de donner mandat à toute personne de leur choix afin de se faire représenter lors de l’assemblée générale. Ce mandat ne peut cependant être consenti au profit du syndic, de son conjoint, de son partenaire lié à lui par un Pacs, et de ses préposés (loi du 10 juillet 1965 : article 22, alinéa 4).

      II. La question

Toute la question est de savoir si le gardien et les employés d’immeuble d’un syndicat de copropriétaires sont des « préposés » du syndic ou non.

Il y a longtemps que’ l’ARC a répondu par l’affirmative, ceci sans être toujours suivie (surtout par les syndics, souvent intéressés à faire voter des gardiens…).

Récemment nous avions expliqué pourquoi la loi ALUR nous avait donné raison explicitement. C’est maintenant au tour de la Cour de Cassation de confirmer notre position, dans un arrêt de la 3ème chambre civile de la Cour de Cassation (7 mai 2014 numéro 13-11.743).

III. Les explications de la Cour et ses raisons

Elles sont toutes simples.

Les juges ont en effet considéré que l’interdiction de recevoir un mandat pour représenter un copropriétaire s’applique à toute personne qui "travaille et accomplit des actes pour le compte du syndic, exécute ses ordres et ses directives et, donc, se comporte à l’égard des tiers et des copropriétaires comme son préposé.Les juges ont estimé qu’une personne peut donc être qualifiée de préposé du syndic même en l’absence de contrat de travail le liant à lui.

Insistons :

  • un préposé est une personne à qui le syndic donne des ordres et des directives : c’est le cas des gardiens et employés d’immeuble ;
  • préposé peut n’être pas lié par un contrat consenti par celui dont il est le préposé : c’est bien le cas entre gardien ou employé d’immeuble et syndic.

Merci qui ? Merci à la Cour de Cassation.

 

Le mandataire qui détient plus de 3 mandats peut subdéléguer - si cette faculté lui a été donnée par son mandant - l’un des mandats pour ramener leur nombre à celui autorisé légalement

Catégories Tenue de l'assemblée générale
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
18 décembre 2002 (01-02.867)
Observations

Jurisprudence reprise par la loi. 

Principe retenu

Limite au nombre de pouvoirs détenus en assemblée générale et possibilité de subdélégation des pouvoirs. 

Analyse de la décision

La délégation de vote, qui consiste à se faire représenter à une assemblée générale à laquelle on ne peut pas assister, est un bon moyen de faire entendre sa voix et de favoriser la prise de décision en copropriété.

Malgré l’incidence des décisions d’assemblée sur les copropriétaires, notamment financières (mais pas seulement), de nombreuses copropriétés déplorent l’absence systématique de certains copropriétaires dans les prises de décision.

D’un autre côté, la question des pouvoirs donnés en AG peut aussi se révéler un casse-tête, comme dans les petites copropriétés où plusieurs pouvoirs sont remis à une seule et même personne.

Raison pour laquelle, d’ailleurs, le législateur a favorisé les procédés de participation à distance aux assemblées générales : vote par correspondance, audio ou visioconférence (depuis la loi ELAN de 2018 et son tout récent décret d’application du 27 juin 2019)

Pour éviter des abus dans les prises de décision en assemblée, notamment par une trop forte concentration de pouvoir dans les mains d’un seul et même copropriétaire (ou plusieurs d’entre eux), le législateur a entendu limiter les possibilités de délégations de vote – ou « pouvoirs » – à un copropriétaire.

C’est l’article 22, alinéa 3, qui prévoit les modalités de délégations de vote en assemblée.

En particulier, il est indiqué que tout copropriétaire (mandant) peut déléguer son droit de vote à un mandataire et que chaque mandataire ne peut pas recevoir plus de 3 pouvoirs. Par exception, il est possible de recevoir plus de 3 pouvoirs si le total de ses voix ajoutées à celles de ses mandants ne dépasse pas 10 % des voix totales du syndicat.

A noter que la loi interdit à certaines personnes de recevoir mandat, en raison de conflits d’intérêt évidents, notamment le syndic, son conjoint, ses ascendants et descendants et ses préposés.

Cet arrêt de 2002 a eu le mérite de débloquer les situations où une seule personne (copropriétaire en pratique) se voyait remettre plusieurs pouvoirs, dépassant les plafonds légaux (3 pouvoirs ou 10 % des voix, anciennement 5 %), en autorisant le mandataire à remettre les pouvoirs à une autre personne ou plusieurs autres si le mandat l’y autorise.

Cette jurisprudence a finalement été consacrée par la loi ELAN de 2018 et l’article 22 précise désormais qu’il est possible pour un mandataire de subdéléguer son mandat à une autre personne si le mandat ne l’interdit pas.

On notera ici une subtilité : la jurisprudence considérait que la subdélégation devait être autorisée par le mandat, la loi considère désormais qu’il ne doit pas l’interdire.

La question n’était pas tout à fait tranchée en jurisprudence dans le cas du mandat qui ne donnerait aucune précision concernant la faculté de subdélégation : suivant la rédaction actuelle de l’article 22, il semblerait qu’elle soit par défaut admise et que dans l’hypothèse où le mandant voudrait l’interdire, il devrait le spécifier par écrit sur le mandat. Cette interprétation reste à confirmer. Si elle prive le copropriétaire qui donne un mandat imprécis sur ce point d’avoir entièrement la main sur son mandat  (car il ne sait pas entre quelles mains il finira), elle aurait tout de même le mérite de faciliter les prises de décision en assemblée en favorisant la représentation. La précaution consiste donc à spécifier son souhait par écrit.

Peu importent les consignes de vote données par un copropriétaire à son mandataire, seul est pris en compte le vote exprimé par le mandataire

Catégories Tenue de l'assemblée générale
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
08 septembre 2016 (15-20.860)
Observations

La Cour de cassation confirme son principe. 

Principe retenu

Le vote du mandataire engage le mandant, même s'il n'a pas respecter les consignes de vote données. 

Analyse de la décision

Les délégations de vote peuvent, au choix du mandant, être données au mandataire avec ou sans consigne de vote particulière.

Dans le cas où des consignes auraient été données au mandataire, l’assemblée générale réunie peut être confrontée à des difficultés tenant à ce que le mandataire en question ne respecte pas les consignes du copropriétaire mandant.

A cette question de savoir si le syndicat des copropriétaires doit se préoccuper du respect de ces consignes, la jurisprudence répond par la négative.

Elle considère que les consignes de vote données par un copropriétaire à son mandataire sont inopposables au syndicat des copropriétaires, c’est-à-dire qu’elles ne regardent pas le syndicat, donc l’assemblée, qui doit seulement tenir compte de ce que le mandataire a exprimé comme vote, même si celui-ci est contraire aux consignes du copropriétaire représenté.

Ainsi, pour le décompte des voix et le vote des résolutions de l’assemblée, le mandataire exprime son vote de la même façon que les autres copropriétaires et c’est ce vote exprimé, et non pas celui qu’il aurait dû exprimer conformément à la volonté de son mandant, qui sera décompté.

Vis-à-vis du syndicat des copropriétaires, le copropriétaire absent mais représenté se trouve donc engagé par le vote émis par son représentant et ne peut pas solliciter la nullité ou la modification de résolutions pour ce motif (CA de Paris, 23e ch., 25 septembre 1992, n°91/010296).

En revanche, il aura la possibilité d’engager la responsabilité civile de son mandataire pour faute dans l’exercice de sa mission, si cette faute lui a occasionné un préjudice.

L’absence de feuille de présence est une cause de nullité de l’assemblée générale

Catégories Tenue de l'assemblée générale
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
18 février 2014 (13-10.307)
Observations

Confirmation de la jurisprudence constante par la Cour de cassation.

Principe retenu

En l'absence de feuille de présence, l'assemblée générale peut être annulée judiciairement. 

Analyse de la décision

Lors de la tenue de l’AG, une feuille de présence doit être tenue et signée par chaque copropriétaire ou mandataire, en général en début de séance, et au départ (en cas de départ avant la fin de la réunion).

Ses mentions sont prévues par l’article 14 du décret de 1967, en particulier les nom et domicile de chaque copropriétaire présent ou représenté, de chaque mandataire, le nombre de voix dont dispose chaque copropriétaire, ainsi que le nombre de pouvoirs détenus par chaque mandataire…

Ce document important est annexé au PV d’assemblée (article 17).

Cette feuille doit être émargée par les copropriétaires ou leurs représentants (sauf participation à distance).

C’est le président de séance désigné lors de l’assemblée qui a la fonction de la contrôler et de la certifier exacte.

Cette vérification est précieuse car elle permet notamment de s’assurer que le nombre maximum de mandats de vote est respecté.

L’article 33 du décret permet à chaque copropriétaire d’en obtenir une copie intégrale (ainsi que celle du PV. Le syndic est alors tenu de s’exécuter, sans discuter.

Compte tenu du fait que la feuille de présence est un document impératif et qu’elle récapitule les informations essentielles permettant de s’assurer de la régularité de la tenue de l’assemblée et des conditions de vote, la Cour de cassation sanctionne sévèrement le non-respect de cette formalité.

En cas de non-respect des décisions d’assemblée générale, le syndicat des copropriétaires peut agir en justice pour en demander le respect.

Catégories Action judiciaire du syndicat des copropriétaires
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
28 mai 2020 (18-20368)
Observations

Jurisprudence constante.

Principe retenu

Le syndicat des copropriétaires peut agir en justice pour faire respecter les décisions adoptées en assemblée générale. 

Analyse de la décision

En copropriété, l’assemblée générale composée de tous les copropriétaires est souveraine : c’est par elle que doit passer toutes les décisions (hors délégation de pouvoirs) relatives à la vie de la copropriété.

En l’absence de contestation de résolution, les décisions deviennent définitives et donc incontestables. Il appartient au syndic conformément à ses missions de faire respecter et exécuter les décisions, conformément à l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965.

Mais que se passe-t-il si un copropriétaire refuse de respecter une résolution définitive, et ce malgré les actions du syndic, au motif que la décision porte atteinte à ses droits?

La Cour de cassation par son arrêt rendu le 28 mai 2020 n°18-20.368 répond à cette interrogation, en rappelant d’une part que le syndicat des copropriétaires a qualité pour agir en Justice afin de faire respecter les décisions prises en assemblée générale, lesquelles s’appliquent sans exception si elles sont définitives.

  1. Le syndicat des copropriétaires peut agir en Justice pour faire respecter les décisions adoptées en assemblée générale

Dans une copropriété dite « horizontale » c’est-à-dire composée de pavillons, il est voté lors de deux assemblées générales distinctes, des décisions concernant les modalités de pose d’un velux ainsi que d’un portail par un couple de copropriétaires sur son pavillon.

Les deux résolutions ne sont pas contestées par les copropriétaires concernés.Pour autant, ils refusent de les prendre en considération et installent le velux et le portail sans respecter les modalités définies par l’assemblée générale.

Le syndicat des copropriétaires décide alors d’engager une action en Justice pour contraindre les copropriétaires à respecter les délibérations d’assemblées générales devenues définitives. Concrètement, le syndicat des copropriétaires demande en Justice la dépose du velux et du portail sous astreinte.

Dans un premier temps, la question est de savoir si le syndicat des copropriétaires a qualité pour agir en Justice concernant la dépose du velux et du portail, qui sont indiqués dans le règlement de copropriété, comme étant des équipements privatifs, installées sur des parties privatives.

En effet, en vertu de l’article 15 de la loi du 10 juillet 1965, « le syndicat a qualité pour agir en Justice tant en demandant qu’en défendant, même contre certains des copropriétaires; il peut notamment agir, conjointement ou non avec un ou plusieurs de ces derniers, en vue de la sauvegarde des droits afférents à l’immeuble ».

Autrement dit, le syndicat peut assigner certains copropriétaires, dès lors que ces derniers portent atteinte à la copropriété. L’une des façons de porter atteinte et de ne pas respecter les décisions prises par l’assemblée générale.

En effet, la Cour de cassation a affirmé par deux arrêts rendus les 07 juin 2006 (n°05-19.117) et 30 mars 2017 (15-24.612) que le syndicat des copropriétaires a intérêt et qualité pour agir en Justice afin de faire respecter les décisions d’assemblée générale.

Par cet arrêt du 28 mai 2020, la Cour de cassation entérine sa jurisprudence, en effet, elle énonce : « l’action du syndicat des copropriétaires avait pour objet de faire appliquer les décisions adoptées par l’assemblée générale au nom de l’intérêt collectif des copropriétaires. »

Cela signifie, que si un copropriétaire refuse de se conformer aux décisions de l’assemblée générale, et ce malgré les demandes plus ou moins coercitives du syndic, le syndicat des copropriétaires (représenté par son syndic) peut engager une action en Justice pour contraindre le copropriétaire récalcitrant, même si cela concerne des parties privatives.

La seule limite à cette action porte sur la contestation en Justice de la décision votée en assemblée générale.

  1. Si elles n’ont pas été contestées, les décisions d’assemblée générale sont définitives

Les copropriétaires assignés n’ont pas contesté les décisions d’assemblée générale, imposant des modalités quant à la pose du velux et du portail. Pour autant, ils considèrent qu’ils n’ont pas à respecter les délibérations car il s’agit d’installation d’équipements privatifs n’affectant pas les parties communes de la copropriété.

La Cour d’appel donne raison sur ce point aux copropriétaires en considérant que « la résolution adoptée par l’assemblée générale restreignait les droits des copropriétaires et cette restriction était étrangère au règlement de copropriété. »

Cependant, la Cour de cassation considère au contraire, « les décisions prises en assemblée générales s’imposent aux copropriétaires tant que la nullité n’en a pas été prononcée. En retenant (…) que cette résolution avait restreint les droits des copropriétaires sur leurs parties privatives, sans avoir été transcrite dans le règlement de copropriété, tout en constatant que les décisions prises n’avaient pas été contestées et étaient devenues définitives, ce dont il résultait qu’elles s’imposaient aux copropriétaires, alors même qu’elles porteraient atteinte à leurs parties privatives, la Cour d’appel a privé de base légale sa décision. »

Autrement dit, les décisions d’assemblée générale deviennent définitives, conformément à l’article 17 de la loi du 10 juillet 1965, si elles ne sont pas contestées.

Par cet arrêt, la Cour de cassation rappelle que même si les décisions portent atteinte aux droits privatifs des copropriétaires, si elles ne sont pas contestées, elles deviennent définitives. Par conséquent, si les décisions sont définitives, elles doivent être exécutées et respectées, faute de quoi la Justice peut les contraindre.

Ainsi, en présence d’une résolution portant atteinte aux droits privatifs de chaque copropriétaire, il faut impérativement la contester judiciairement pour en être libérée, car même dans ce cas, elle s’appliquera.

Pour ce faire, il faut respecter un certain nombre de conditions : il faut voter contre la résolution ou être absent. En conséquence, si vous votez pour, vous ne pourrez pas la contester. Par ailleurs, il faut saisir le Tribunal judiciaire dans le délai de deux mois suivant la notification du procès-verbal de l’assemblée générale. Enfin, il faut prouver une irrégularité dans la décision. En l’occurrence que l’assemblée générale a pris une décision restreignant les droits des copropriétaires sur leurs parties privatives.

En conséquence, il est donc très important de contester une telle résolution, à défaut la décision deviendra définitive et il faudra la respecter malgré l’atteinte portée.  

Un accord entre copropriétaires ne remplace pas une décision d’assemblée

Catégories Tenue de l'assemblée générale
Date de parution de l'article de loi
Juridiction
Cour de cassation (troisième chambre civile)
Référence
n°22-22.758 et 30 mai 2024, n°22-23.878
Observations

Le b de l’article 25 confère à l’assemblée générale des copropriétaires l’exclusivité du pouvoir d’autoriser des travaux sur les parties communes ou affectant l’aspect extérieur de l’immeuble. Aucun accord entre copropriétaires, ni avant ni après la naissance de la copropriété ne peut s’y substituer.

Par ailleurs, le droit de construire sur les parties communes est un droit accessoire de la propriété des parties communes et ne peut être cédé comme une simple autorisation de travaux, et encore moins sur simple accord entre copropriétaires ! Il s’agit d’une aliénation de partie commune ou de droit y afférent, et dès lors qu’elle valorise la propriété de l’acquéreur, nécessairement contre paiement d’un prix.

Principe retenu

En l'absence d'autorisation donnée par l'assemblée générale des copropriétaires, à laquelle un accord entre copropriétaires ne se substitue pas, tout copropriétaire est fondé à demander la cessation d'une atteinte aux parties communes ou la destruction d'un ouvrage édifié en violation du règlement de copropriété.

Les travaux affectant les parties communes ou l'aspect extérieur de l'immeuble, dès lors qu’ils sont réalisés après la soumission de l'immeuble au statut de la copropriété, doivent être autorisés par les copropriétaires réunis en assemblée générale, peu important l'accord antérieurement obtenu du propriétaire de l'immeuble. Rappelons qu’un immeuble existant est soumis au statut de la copropriété lors du transfert de propriété d’un premier lot, mais qu’un immeuble vendu en état futur d’achèvement, ne l’est que le jour de la livraison du premier lot.

Analyse de la décision

Dans la première des deux affaires commentées, Une SCI, propriétaire de lots au rez-de-chaussée d’un immeuble en copropriété, se plaignant d'infiltrations d'eau provenant d'une terrasse accessible depuis les lots appartenant à une seconde SCI situés au premier étage, a fait assigner, après expertise, le syndicat des copropriétaires et la SCI du 1er étage aux fins d'obtenir leur condamnation à procéder aux travaux de remise en état de l'étanchéité de la terrasse.

La SCI su 1er étage demande alors reconventionnellement la condamnation de la SCI du rez-de-chaussée à supprimer les murs ayant abouti à transformer les espaces se situant sous la terrasse en locaux fermés habitables, à remettre ses lots en conformité avec le règlement de copropriété et les plans joints, ainsi qu’à supprimer cette terrasse, bien qu’elle en bénéficie de l’accès.

La Cour d’appel la déboute sur cette demande reconventionnelle, au motif que la terrasse litigieuse a été construite sur la part de jardin attribuée en jouissance privative aux lots du rez-de-chaussée par les créateurs des deux SCI, de telle manière que l'une et l'autre profitent des extensions réalisées au rez-de-chaussée, en parties habitables, et au premier étage, en terrasse, et que la SCI du 1er étage n'est, dès lors, pas fondée à obtenir la condamnation de la SCI du rez-de-chaussée à démolir l'ensemble de cette construction réalisée par leurs auteurs communs, rompant ainsi unilatéralement l'accord des deux parties.

La Cour de cassation ne l’entend pas ainsi, se fondant sur le caractère d’ordre public des dispositions de la loi du 10 juillet 1965. Elle considère qu'en l'absence d'autorisation donnée par l'assemblée générale des copropriétaires, « à laquelle un accord entre copropriétaires ne se substitue pas », tout copropriétaire est fondé à demander la cessation d'une atteinte aux parties communes ou la destruction d'un ouvrage édifié en violation du règlement de copropriété, en l’occurrence l’appropriation d’un droit de construire sur une partie commune. Et ce alors même qu’au départ ils étaient d’accord et que la construction litigieuse avait des avantages pour chacun…

Dans la seconde affaire, deux SCI et deux couples de copropriétaires ont acquis en l'état futur d'achèvement divers lots dans un immeuble édifié par un promoteur. Après la livraison de leurs lots, les copropriétaires ont assigné les SCI en démontage des installations de climatisation et de chauffage qu'elles avaient installées sur la terrasse technique du huitième étage du bâtiment B et en remise en état de ces parties communes, l’assemblée générale convoquée après la livraison des lots ayant refusé d’en régulariser l’autorisation.

La Cour d'appel de Chambéry les déboute, prenant en compte que le promoteur, vendeur et propriétaire de l'immeuble, leur avait, avant la naissance de la copropriété, délivré l'autorisation de réaliser ces installations, cette autorisation s'analysant en un droit d'usage privatif sur des parties communes, de sorte qu'il importait peu que l'assemblée générale des copropriétaires ait refusé la régularisation des travaux, qui était sans objet au regard de cette autorisation antérieure à l'existence de la copropriété.

La Cour de cassation réfute cette interprétation, se fondant là aussi sur le caractère d’ordre public de l’article 25 de la loi et notamment de son b. Dès lors que les travaux litigieux, affectant les parties communes ou l'aspect extérieur de l'immeuble, avaient été réalisés après la soumission de l'immeuble au statut de la copropriété, ils devaient être autorisés par les copropriétaires réunis en assemblée générale, peu important l'accord antérieurement obtenu du propriétaire de l'immeuble.